2.3.6 Conclusion : la relativité des modèles

La recherche des ressources financières dépend des capacités, du stade de développement et des objectifs de chaque pays. On constate cependant que les pays les moins avancés n’ont pas véritablement le choix et ont besoin de la communauté internationale pour construire les fondements de leur système éducatif et pour assurer un programme d’Education Pour Tous. Á propos de ce dernier la proposition des Nations-Unies est de sortir du débat de l’aide internationale du contexte des négociations en créant une sorte de fond d’aide universel.

La majorité des pays émergents qui ont réussi leur envolée économique compense l’énorme coût de l’éducation par des moyens tels que la privatisation et l’autofinancement partiel ou total des familles. Ils tentent ainsi de désendetter l’État et de diminuer leur dépendance financière envers la communauté internationale. Ils supposent que l’autofinancement est un investissement volontaire et rentable pour la carrière professionnelle des futurs diplômés. Ils écartent les risques liés aux imperfections du marché de l’emploi, à l’incapacité pour les étudiants de connaître les réalités du marché de l’emploi, au manque de communications entre la création des programmes de formation et les compétences nécessaires à un hypothétique marché de l’emploi.

La tendance des pays est de privilégier des pôles universitaires et de sélectionner les meilleurs étudiants. C’est une politique élitiste qui ne garantit pas forcément aux meilleurs étudiants l’accès aux établissements d’excellence sélectionnés par l’État. En Asie de l’Est, la majorité des pays tend à promouvoir des politiques permettant la parité, voire la domination de la proportion d’établissements privés. L’État tente de limiter les problèmes d’iniquité entraînés par la politique de privatisation en offrant des bourses limitées par les budgets. Le système de crédits semble plus adapté pour répondre aux besoins des familles si toutefois, ils étaient appliqués avec mesure pour ne pas entraîner le surendettement.

Les bourses et les crédits doivent soutenir les jeunes en amont, durant la période de scolarité obligatoire. C’est là que se forme les véritables capacités et potentialité, les motivations et donc la véritable source pour le capital humain. En référence aux études réalisées aux USA, le fait que certains jeunes issus de milieux défavorisés arrivent aux portes de l’enseignement supérieur et soient prêts à tout entreprendre pour atteindre leur objectif, est une information capitale. Elle nécessite d’être confirmée au sein de chaque pays, mais elle permettrait de mieux équilibrer les efforts à consentir pour soutenir les systèmes éducatifs.

La recherche de ressources est complétée par des moyens qui pour l’instant sont secondaires comparativement à ceux développés par certains pays, principalement empruntés d’une culture plus commerciale, tels que les USA ou comme l’Australie, dont les outils tels que les donations par des anciens étudiants, des entreprises, les activités annexes des établissements, sont largement intégrés dans le budget. Il faudra pourtant du temps pour que les pays en développement puissent en faire autant, car cet objectif demande : le développement des relations avec l’environnement économique - une expertise scientifique reconnue pertinente pour le retour d’investissement des entreprises – le développement des outils markéting de promotion de la marque des établissements (par exemple vers le réseau des alumni).

Contrairement aux modèles de financement dominant dans les pays développés européens, ou exceptionnellement dans certains pays asiatiques, comme la Malaisie, la majorité des pays en développement s’oriente donc vers des modèles fortement privatifs, inspirés des pays anglo-saxons, tels que l’Australie ou les États-Unis. Cependant, tous ces modèles, qu’ils soient fortement subventionnés ou pas, rencontrent des problèmes d’équité et ne peuvent pas garantir le principe fondamental d’égalité de l’éducation, ni de non ségrégation sociale. Les modèles des pays développés induisent donc l’élitisme et ne garantissent pas forcément l’accès des meilleurs jeunes issus des milieux défavorisés aux meilleures formations supérieures, même si proportionnellement, comme sur le modèle dominant européen, il paraîtrait souhaitable de proposer la gratuité à tous les jeunes, la réalité budgétaire exclue cette éventualité pour les pays en développement.

On retiendra que comparativement aux pays développés, les pays en développement d’Asie de l’Est construisent cependant leurs systèmes éducatifs en fonction de contingences très spécifiques à leur époque et à la réalité de leur environnement culturel :

Les pays en développement doivent trouver un modèle qui génère le moins d’inégalités sociales et de discrimination. Aucun modèle ne peut garantir l’égalité des chances aux jeunes lycéens ou aux étudiants qui ont le potentiel de pouvoir poursuivre leurs projets d’étude. Pourtant, même si l’on sait par ailleurs que le modèle libéral est le plus discriminatoire, la majorité des pays émergents se tournent vers une stratégie d’ouverture, vers la privatisation, l’autofinancement des familles et l’appel à l’investissement privé et étranger.