3.3.5.2 Un développement essentiellement quantitatif

Les effectifs ont cependant fortement progressé grâce notamment à : l’augmentation et la différenciation de l’offre publique mais surtout privée, locale ou étrangère ; à la création d’universités ouvertes ; à l’augmentation de l’assiette de recrutement du secteur privé527 ; à l’élévation du pouvoir d’achat de la population ; à une démographie favorable jusque dans les années 2000, qui a conforté la demande 528 ; à la croissance de la demande du secteur économique ; à la libéralisation progressive de l’information disponible auprès des étudiants ; à l’allégement du processus d’autorisation de circulation dans le pays529 qui facilite la mobilité des étudiants.

[Figure 3.2 - Progression des effectifs du système éducatif. (réalisé par l'auteur, source MOET)]

Cette progression a été possible grâce au processus de massification des niveaux inférieurs, de la primaire au secondaire, qui a permis en aval, la croissance soutenue et constante des effectifs du secondaire supérieur et donc des candidats au concours530. Ainsi, le taux de progression du secondaire supérieur est pratiquement équivalent à celui des effectifs universitaires (7% à 8% depuis 2001)531. Il existe donc pour l’instant un équilibre entre les effectifs des différents niveaux. Les effectifs d’entrée à l’université sont entièrement régulés par le concours, en s’appuyant sur le niveau d’exigence et les quotas de places offertes532.

Tant attendu et craint par des millions de familles, le concours d’entrée est donc un élément essentiel de régulation de la politique universitaire533. Il est très sélectif puisque seul un sixième des élèves s’y présentant accède à l’université. C’est ainsi qu’en 2003, 185 039 candidats issus des classes de terminale ont réussi le concours sur les 1,28 million d’inscrits. En 2005, moins de 15% de la tranche d'âge des 20-25 ans a ainsi atteint un niveau de première année universitaire, soit environ 400 étudiants pour 100 000 habitants, contre 1 100 en Indonésie, 2 000 en Thaïlande, 2 500 à Singapour et 3 600 en France.

[Figure 3.3 - Effectif de l'enseignement supérieur (réalisé par l'auteur, source MOET)]
[Figure 3.3 - Effectif de l'enseignement supérieur (réalisé par l'auteur, source MOET)]

Les effectifs de l’enseignement supérieur général ont augmenté de 72% entre 1999 et 2007534. Ils étaient plus de 1 500 000 en 2007(figures 3.2 et 3.3, supra). Á ce rythme les effectifs prévisionnels de l’État seront largement atteints en 2010535.

La demande insatisfaite reste donc extrêmement forte et augure une importante marge de progression du marché de l’éducation dans son ensemble. La rareté des places accentue le bon positionnement d’une offre publique universitaire. Comparativement à l’offre privée, elle est privilégiée dans la mesure où elle capte totalement la demande du public. Malgré les rigueurs budgétaires, elle garde un avantage financier puisqu’elle continue à percevoir des aides de l’État. Elle a le grand avantage de pouvoir sélectionner les meilleurs étudiants qui sont potentiellement par ailleurs les seuls boursiers par le truchement des attributions au mérite. Elle s’appuie sur le meilleur corps enseignants du pays grâce à des enseignants et un personnel qui gardent le statut, certes précaire en termes de valorisation salariale, de fonctionnaire, mais aussi l’emploi à vie.

L’offre publique de formation universitaire possède donc un positionnement avantageux garanti et protégé pour l’instant par le statut des établissements, leur notoriété, les avantages financiers et le recrutement. Mais pour combien de temps ? Ces atouts suffisent-ils à compenser l’évolution de la demande du public, les exigences nouvelles du marché de l’emploi ? L’offre publique pourrait-elle être un jour être concurrencée par l’offre privée et notamment être attaquée sur des critères qualitatifs ?

Notes
527.

Le secteur privé accueille principalement les candidats qui ont été reçus avec les notes les plus basses au concours d’entrée, puisqu’il correspond souvent au dernier choix d’étude que les étudiants établissent par ordre de priorité.

528.

Le taux de natalité a été très fort jusqu’en 1997, en moyenne de 1,97% de progression. 50% de la population a moins de 25 ans, le nombre d’habitants a progressé de 20 millions en 20 ans, entre 1986 et 2006.

529.

Toute personne souhaitant s’installer dans une ville doit demander l’autorisation aux autorités locales en présentant son livret de famille. Ceci permet de contrôler les flux migratoires vers les grands centres urbains, cette politique pourrait être efficace si elle n’était pas entachée de problème de corruption de fonctionnaires qui délivrent l’autorisation sous réserve d’enveloppes, ou si elle n’était finalement pas contradictoire avec les objectifs de croissance que des métropoles, comme HCMVille, tirent largement vers le haut.

530.

Voir infra, figure 3.2, permettant de comparer la progression des effectifs du supérieur à celle des effectifs généraux.

531.

La progression des effectifs du supérieur secondaire a été relativement identique, dans le public (9,2%) comparativement au secteur privé (11,8%), figure 3.3 et tableaux 3.7 à 3.9 en annexe.

532.

Ce contrôle permet par ailleurs une discrimination positive, notamment en faveur des minorités ethniques.

533.

Il est accessible aux lycéens d’un certain niveau académique qui choisissent parmi quatre groupes de matières et trois établissements. La note au concours détermine un classement et un ordre de priorité. En 2003, les estimations indiquaient qu’environ 50% des bacheliers en milieu rural ne passait pas le concours, 20% à 30% dans les grandes villes, voir annexe 3.5 et figure 3.7 en annexe.

534.

Etudiants tous niveaux confondus du 1er au 3ème cycle : 893 754 étudiants en 1999-2000 contre plus de 1 500 000 en 2006-2007, voir tableaux 3.7 à 3.9 en annexe.

535.

Ces effectifs portent le ratio étudiant/habitant à 55, pour un prévisionnel de 45 habitants en 2020, avec un taux de croissance moyen des effectifs de plus de 8% et taux de croissance de la population de 1,23%.