Toutes ces réformes ou projets sont menés dans le cadre des orientations socialistes avec le souci de faciliter le développement d’un marché de l’éducation tout en maintenant le contrôle politique du parti. Ainsi, la stratégie de développement permet l’ouverture d’un marché éducatif, mais parallèlement, la tutelle doit logiquement continuer à exercer son autorité et le Parti doit maintenir son pouvoir. Les réformes se mettent en place avec un manque de moyens financiers, au milieu d’une administration fortement bureaucratique et dans un environnement décisionnel dominé par un jeu d’influences et d’intérêts collectifs ou particuliers.
Le Viêt-nam est à présent un État de droit589. Sa dernière constitution590 inclut pour la première fois l'intelligentsia, ce qui se manifeste sous la forme d’un assouplissement du régime dans le sens du confucianisme 591. Elle ne reconnaît cependant pas la séparation des pouvoirs, conformément à la doctrine socialiste qui prône un état uni et centralisé592. Les concessions libérales se portent donc essentiellement sur le système économique et sur certains outils de l’appareil d’État, qui sont nécessaires à son fonctionnement593. Le parti coordonne ainsi les organes étatiques et déterminent les grandes orientations politiques. La Constitution fait également référence au Front de la Patrie du Vietnam et aux syndicats594.
C’est dans ce contexte politique que se jouent les réformes et surtout le processus de décision qui doit en garantir leur application. Quatre organes majeurs institutionnels sont censés garantir, contrôler, dynamiser le fonctionnement de l’appareil éducatif, suivant un modèle unique595 de démocratie indirecte socialiste596 :
L’administration de ces organes est fortement bureaucratique597 et limite l’évolution du système éducatif598. Fer de lance de l’ancien système centralisé socialiste, ses puissantes organisations, comprenant des milliers de fonctionnaires et adhérents, n’ont pas encore pleinement profitées du processus de rénovation contrairement à certaines entreprises d’État.
Elles interfèrent fortement et de manière croisée dans tout l’environnement des établissements599 :
Tout ce processus « […] est une source de confusion dans les responsabilités, de rigidité et de blocages pour la détermination de la politique à conduire et pour la gestion courante de toutes les ressources » 603 . La confusion résulte notamment du cloisonnement entre les différents organes ou niveaux hiérarchiques et même parfois entre leurs propres départements.
La Constitution affirme le caractère démocratique du régime et l'état de droit (art. 2). L'article 7 affirme le principe des élections au suffrage universel. L’État de droit peut dans sa plus simple forme, se définir comme un système institutionnel dans lequel la puissance publique est soumise au droit. Il consiste dès lors au respect de la hiérarchie des normes, en l’égalité des sujets de droit, en l’indépendance de la Justice Référence Vie Publique.fr, consulté le 8/07/2008.
Le concept d’État de droit selon Michel Senellart revêt multiples significations : sens juridique et sens politique ; conceptions formelle, matérielle et substantielle. Premier axe polémique du développement de l’idée d’État de droit : l’opposition au despotisme (pouvoir absolu ou autorité confiés à une seule personne). Critique de l’interprétation de C. Schmitt (l’État de droit opposé à l’État-puissance, Machtstaat). L’opposition classique entre gouvernement de la loi et gouvernement des hommes (Montesquieu, Rousseau). Michel Senellart, Professeur à l'École normale supérieure lettres et sciences humaines (ENS LSH), légalement École normale supérieure de Fontenay-Saint-Cloud. Base de ressources audio visuelles de l’ENS Média, consulté le 8/07/2008.
Constitution de la République socialiste du Vietnam – 15-04-1992 - Maison du droit Vietnamo-Française - VNM 1992 CO 1 (DF), consultation du site le 12/06/2008.
Puisque le confucianisme préconisait la gouvernance par les sages. Notons que Platon considérait lui aussi que la politique devait être l’affaire des Hommes les plus sages et les plus intelligents.
L'article 4 affirme le rôle de leader et l'exclusivité du pouvoir politique du Parti communiste vietnamien (PCV) : « Le Parti communiste du Vietnam, avant-garde de la classe ouvrière vietnamienne, représentant fidèle des droits et des intérêts de la classe ouvrière, laborieuse et de toute la nation, guidé parle marxisme-léninisme et la pensée de Ho Chi Minh, est la force qui dirige l’État et la société ».
Le cadre de la réforme de l’administration publique de 2001 à 2010 (Public Administration Reform, 2001-2010), a suivi les recommandations des organisations internationales (UNDP 2006), cité par Nolwen Hénaff, « Le financement et contrôle de l’éducation. Le cas du Viêt-nam », op. cit., page 279.
Voir annexe 3.5 et figure 3.6.
A notre connaissance, il est possible de l’apparenter au modèle cubain.
Dans la mesure où suivant une constitution proclamant l’État de droit, le pouvoir législatif élu par le peuple et exécutif s’y attenant, sont sous l'influence d'un parti unique qui n'est pas élu.
Nolwen Hénaff, « Le financement et contrôle de l’éducation. Le cas du Viêt-nam », op. cit., page 278.
On note par exemple la lenteur avec laquelle l’administration met en place les réformes pour : alléger le processus d’admission et réformer le concours d’entrée à l’université, modifier le cadre des programmes et gérer les ressources humaines (en particulier dans le cadre des nominations).
Voir figure 3.7.
Notamment par le MOLISA (Ministry of Labour, Invalids and Social Affairs), le MOST : Ministère des sciences et de la technologie (Ministry of Science, Technology and Environment), ou certains ministères qui, dans leur secteur respectif, sont à l’origine de la création d’établissements tels que l’agriculture ou la santé.
Qui comprend notamment le PCV, l'Union de la jeunesse communiste, l’Union des femmes, la Fédération des travailleurs, l’Association des agriculteurs, etc.
En référence à l’article 4.
(Nguyen Tung, Nguyen Duong Binh, 1999 : 85-108) mais aussi entre le collectif et l’individu (Boudarel, 1983 : 31-106). Nolwen Hénaff, Jean-Yves Martin (dir), Travail, emploi et ressources humaines au Viêt-nam : Quinze ans de Renouveau, op. cit., page 10.