Depuis plus de dix années, la situation n’a pas fondamentalement changée : il y a avant tout un problème qualitatif de l’offre locale. Il se révèle notamment par l’inadéquation des compétences acquises par les diplômés comparativement à celles requises par le marché des emplois qualifiés710. Le niveau des compétences est toujours estimé faible et tendrait même à se détériorer, comme en témoignent différents acteurs sociaux711 :
Que disent certains experts de l’éducation à propos des diplômés des universités ?
‘« Bien qu’ils soient dynamiques, enthousiastes et avides d’apprendre, (ils) manquent de connaissances pratiques et se heurtent souvent à des difficultés dans l’application de leurs connaissances théoriques et l’adaptation à leur nouvel emploi ».’Selon un chef d’entreprise : « Seulement 20% des ingénieurs s’adaptent aux programmes de formation des entreprises. Pis encore, leurs niveaux théoriques sont loin de répondre aux exigences de leur métier».
Comme en témoigne le vice-premier ministre, l’État n’a de cesse de pointer ces inadaptations. Ainsi Monsieur Nguyen Thien Nhan insiste sur un point évident mais qu’il juge nécessaire de préciser712 : « […] la formation doit répondre aux besoins de la société et des entreprises ».
Mais le problème qualitatif ne se limite pas à l’enseignement supérieur, le mal est plus profond et touche tout le milieu éducatif713 et chacun sait que les bases des apprentissages se construisent bien en amont dans la vie d’un élève. C’est par exemple confirmé dans un rapport de l’UNESCO, qui signale que la qualité du supérieur passe par celle de l’éducation de base, par la revalorisation éducative, sociale et économique de la profession d’enseignant et par une rénovation des contenus, des programmes et des méthodes d’enseignement714.
Ce manque de qualité n’est pas récent et il est largement constaté dans les milieux universitaires715. De plus, la situation s’aggrave et remet sérieusement en cause les objectifs très ambitieux de l’État.
Après plus de vingt ans de rénovation, les progrès et les changements sont visibles dans la majorité du système éducatif. Des résultats très satisfaisants ont été ainsi obtenus rapidement et avec peu de moyens. Mais il est à présent reproché au système éducatif son manque de transparence et d’efficacité, son incapacité de s’adapter aux besoins du marché de l’emploi, sa pauvre qualité et l’accès limité à l’enseignement supérieur716. Ceci se traduit par une dégradation du niveau de formation des diplômés717 et comme nous l’avons constaté, par un risque important, relatif à chaque discipline, de remise en cause de leurs objectifs de carrière. Il est donc préconisé aussi bien une refonte des méthodes pédagogiques qu’une refonte des programmes.
La faible qualité des compétences et surtout l’inadéquation de leurs compétences avec les besoins du marché de l’emploi sont corrélées au démarrage du Doi Moi et aux adaptations de l’offre qu’il aurait dû entraînées. Hénaff Nolwen, Doi Moi et globalisation : vers un accroissement des inégalités en matière d'éducation, op. cit. page 20
Extraits de l’article Emploi : adapter la formation aux réalités du monde du travail, Le courrier du Vietnam, Le Ha/CVN, le 22/08/08.
Ibid.
Une étude conduite en 2001 démontre que moins de 40% des élèves interrogés de CM2 avaient atteint un niveau d’autonomie suffisant dans l’apprentissage des mathématiques. Banque Mondiale, 2004, cité par Nolwen Hénaff, « Le financement et contrôle de l’éducation. Le cas du Viêt-nam », op. cit., page 13.
Réf : Les problèmes qualitatifs du Viêt-nam, UNESCO, Conférence Mondiale de l’Unesco sur l’enseignement supérieur (1998). Jacques Hallak, Formation et enseignement supérieurs au Vietnam - Transition et enjeux, op. cit., page 59.
De nombreuses sources témoignent de cette situation. En voici quelques unes, parmi d’autres :
- le colloque international Éducation/formation : La recherche de qualité, op. cit.
- la recherche menée par Tu Huyen Nguyen Xuan, 2006, « Formation de formateurs, ingénierie de la formation, mutations et compétences professionnelles, contributions à un projet de professionnalisation des enseignants », op. cit., annexe 3.8.
- le rapport Jacques Hallak, Formation et enseignement supérieurs au Vietnam - Transition et enjeux, op. cit.
Nolwen Hénaff, Presentation of the report « Skills for productivity, employment growth and development in Vietnam », op. cit.
Les évaluations sont faites à partir des mentions obtenues aux examens universitaires et cette dégradation est constatée par les enseignants eux-mêmes, voir annexe 3.8 et Source, Ambassade de France en République Socialiste du Viêt-nam, document de synthèse de préfaisabilité — Université Française au Vietnam, op. cit.