Annexe 3.8 - Entretien, université privée vietnamienne

[Entretien, université privée vietnamienne1098]

Entretien mené en Août 2008 avec un cadre d’une université vietnamienne privée du domaine de la gestion, de l’économie, des langues vivantes.

Objet : il s’agissait de comparer les réponses obtenues lors de l’entretien avec un cadre d’une université publique à celles d’un cadre d’une université privée.

Le manque d’expertise scientifique

Le problème lié au manque de ressources humaines et d’expertise scientifique est central dans les établissements du privé. C’est la cause principale qui bloque leur développement et empêche totalement les formations de 3ème cycle. L’accélération de la mobilité internationale des étudiants ne profite pas à améliorer cette expertise dans le secteur éducatif. Nombreux des étudiants partis en 3ème cycle tentent de rester à l’étranger pour des motifs économiques et à long terme, s’ils le peuvent, ils rentrent au pays et se valorisent dans les activités ou services commerciaux, mais pas ou rarement dans l’éducation.

La difficulté de rentabiliser les infrastructures.

Rares sont les universités locales à être propriétaires des locaux. La garantie d’une bonne rentabilité passe par la location immobilière et une rentabilité à court terme.

La croissance récente des établissements privés.

La croissance du privé continue à profiter de l’attractivité de l’éducation supérieure auprès de la population mais aussi des coopérations internationales qui permettent d’élargir l’offre et d’améliorer la qualité ou de moderniser les équipements1099.

La limite de la croissance des établissements privés

Contrairement au public, les établissements privés n’ont pas la possibilité d’étendre leur activité en dehors des campus officiels

L’investissement étranger en 2009-10 oui mais…

Les nouveaux textes de loi qui régissent les IDE en éducation tendent à faciliter les investissements. L’arrivée des campus ou universités privées étrangères pourrait toutefois être progressive. Même si le public potentiel existe, les investisseurs étrangers seront probablement prudents avant d’investir dans du long terme au regard de certaines désaccords qui existeraient encore au niveau de l’État

à propos des IDE en éducation et qui sont ressentis dans le secteur privé local.

Recrutement des enseignants : liberté limitée

L’ouverture des établissements privés est récemment conditionnée au respect d’un quota de personnel permanent de 40 à 50% de l’effectif. Ceci amène bon nombre d’établissements, par manque de personnel qualifié sur le marché du travail, à assimiler des vacataires au statut de permanents pour gonfler les effectifs des permanents. Les exigences qualitatives pour le recrutement des enseignants sont moins importantes car les ressources manquent cruellement dans l’ensemble du secteur privé.

Les nominations sont sous la responsabilité de l’université, il n’y pas d’influence extérieur tant pour : le contrôle de l’expertise scientifique des personnes, que pour les concours internes, que par rapport au jeu des influences politiques externes.

Les étudiants

On constate globalement la baisse du niveau des étudiants à tous les stades du système éducatif est donc, par effet domino, au niveau du supérieur. Il n’a pas été constaté d’amélioration de la qualité durant ces dernières années mais plutôt une détérioration. Les étudiants recrutés dans le privé ont généralement un niveau plus faible puisque le privé est souvent considéré comme un choix par dépit pour ceux qui n’ont pas pu être intégrés dans le public.

Autonomie de l’université / tutelle de l’État

L’université privée est globalement soumise aux mêmes réseaux d’influences qui interfèrent dans toute la vie des universités publiques. L’organisation est identique même si il n’y pas de texte officiel l’imposant. La duplicité des systèmes public et privé en termes de contrôle et d’influence du pouvoir est uns sorte de principe. La nomination du recteur et vice-recteur est proposée à la tutelle d’État. Dans les faits, comme dans le public, ces deux personnes font implicitement parties du PCV.

Assouplissement du pouvoir d’influence du PCV

On note la volonté et la tendance de l’État de privilégier les compétences et la jeunesse plutôt que l’appartenance au parti. C’est ainsi que théoriquement, des personnes hors du PCV pourraient postuler à des hautes fonctions. Ce n’est pour l’instant plus un discours qu’un fait, mais cela traduit un assouplissement qui permettrait le renouvellement des cadres et une amélioration du niveau de compétence.

L’autonomie de fonctionnement

Chaque année l'université privée doit négocier le quota d'effectifs à recruter auprès du MOET, ceci en fonction des critères/quota relatifs à la superficie /étudiant, au nombre de prof/étudiants, etc.

Le rôle de régulation et de contrôle de l’État

L'université peut pratiquer un tarif à son souhait, si celui-ci ne dépasse pas le plafond imposé par le MOET et le Ministère des Finances. Chaque augmentation de tarif doit être négociée auprès de ces institutions. Des contestations provenant de familles à propos d’augmentation trop élevées sont déjà apparues dans certaines universités.

Les tarifs du privé

Les droits sont généralement doublés comparativement au secteur public dans l’université de la personne interviewée1100.

Les salaires des enseignants

Les salaires sont supérieurs dans le privé mais sont très relatifs. Le tableau des salaires évolue pour mieux répondre au manque d'expertise et à la concurrence entre établissements du privé et notamment ceux qui viennent d’ouvrir.

Les vases communicants du public au privé

Plusieurs enseignants du public travaillent aussi pour le privé pour des motifs économiques et pour compenser le manque d’enseignants dans le privé. La proportion est assez élevée, malgré les quotas d’enseignants permanents imposés par le MOET lors des créations des universités privées.

Passer le concours d’entrée est obligatoire pour tous

Tous les étudiants qui souhaitent suivre un cycle universitaire privé ou public, doivent passer le concours d'entrée à l'université.

Pas d’information disponible sur l’insertion

Il n’y a pas de statistiques disponibles et précises sur l’insertion.

La formation continue est fortement représentée.

Il n’y pas de chiffres disponibles précis mais « De nombreuses personnes suivent les cours du soir ou des programmes non-diplômants, surtout de langues vivantes et d'informatique »

Les investissements à court termes

Les universités privées ont majoritairement des objectifs de rentabilité à court terme et engrangent des bénéfices « non négligeables ». « Rares sont ceux qui pensent au développement durable, en investissant à long terme dans ce domaine. Ceux-ci, s'ils existent, sont des gens qui pensent vraiment au futur de l'éducation avec quand même un esprit d'entreprenariat »

Des relations difficiles et émergentes avec les entreprises

Les activités du privé sont trop récentes et non pas eu encore le temps d’obtenir la confiance auprès des entreprises ou de la société civile. Il est très difficile de s'imposer comme une marque éducative auprès des acteurs. Malgré quelques tentatives de rapprochements, on est encore très loin d’obtenir la participation nécessaire des entreprises. On assiste depuis deux ans, à la signature d’accord entre des entreprises et des universités publiques pour le recrutement des diplômés.

Un accompagnement des jeunes uniquement promotionnel

Les activités d'orientation et d'information sont essentiellement promotionnelles pour assurer notamment le recrutement avant les concours. Sinon il n’existe pas franchement de stratégie d’accompagnement des étudiants pendant leurs cursus et pour l’insertion professionnelle, or « Ce n'est pas assez à mon avis, car cet accompagnement devrait exister tout au long des cursus »

Des coopérations internationales émergentes

La plupart des projets internationaux est répartie par le MOET et profite essentiellement au secteur public. Il faut que le privé améliore sa notoriété auprès des partenaires internationaux et notamment les nouveaux. Des coopérations internationales voient ainsi le jour notamment avec des grandes universités, principalement anglo-saxonnes. Les coopérations ne concernent pas seulement les partenaires étrangers, elles concernent aussi les universités locales privées et publiques pour créer des synergies et parfois aboutir à un effet de masse suffisant pour accueillir des programmes délocalisés étrangers.

Notes
1098.

La personne souhaite rester anonyme.

1099.

On doit cependant noter que le développement grâce aux échanges internationaux n’est pas vérifié et sans doute très limité dans les zones rurales.

1100.

Il faut ajouter à ces frais les charges imputables à tous les étudiants, du privé comme du public (les livres, les petits équipements, les cours supplémentaires de langue, etc.), pour finalement obtenir un rapport de 1/3 et ce dans tout le système d’enseignement en général.