Eclairage, rôle du feu au village

Dans les huttes, il y a toujours un petit feu autour duquel les membres de la famille se couchent afin d'avoir chaud mais pas seulement ; d'après Turnbull, le feu permet également d'éloigner les animaux, en particulier les insectes. Or, j’ai remarqué que dans chaque maison il n’y a aucun feu, seule une lampe à pétrole est éclairée et laissée en veille toute la nuit. Ainsi, hormis dans les grandes pièces uniques faisant usage de cuisine collective où un feu demeure toute la nuit, nous ne retrouvons pas cela dans les chambres des habitations ou très peu. Il est évident que la lampe à pétrole ne peut remplir les deux fonctions du feu précédemment citées : elle aurait plutôt tendance à attirer les insectes non désirés (d’ailleurs certains individus se plaignent régulièrement du grand nombre de moustiques dans leur maison sans pour autant remédier à ce problème). Est-ce par analogie qu'ils placent cette lampe au milieu de leur chambre sans prendre réellement conscience de la différence de fonctions ? L’habitude de dormir à proximité d’une source lumineuse implique ici des comportements non adéquats. En effet, le changement de mode de vie, et plus spécifiquement d’habitat, entraîne des attitudes non adaptées au nouvel environnement.

Pour autant, cette préférence pour les lampes à pétrole n’est pas si récente si l’on se réfère à leur présence sur les photos de Morel datant des années 1960 (cf. annexe DVD). Il s’agit là principalement d’un changement endogène dans la mesure où les Baka savent, encore de nos jours, fabriquer des bougies. Le côté « pratique » a été privilégié aux dépens du côté « financier ». Dans la même dynamique de changement, un habitant de Bitouga a souhaité fournir de l’électricité au village. Pour ce faire, il a acheté un groupe électrogène et l’a fait fonctionner à raison d’une heure chaque soir. Il pensait que la communauté contribuerait à l’achat du pétrole nécessaire à l’alimentation du groupe électrogène mais les autres membres de la communauté ne se sont pas sentis concernés. Aucune réelle utilité n’a été perçue par les habitants d’éclairer le village, sachant qu’ils évoluent sans peine en son sein dans une quasi obscurité, et qu’ils pratiquent aisément la chasse nocturne en pleine forêt. Ce projet a donc périclité et le groupe électrogène a été abandonné ; les femmes continuent de préparer à manger à proximité d’une source de lumière due au feu de cuisson ou à la lampe à pétrole.

D’une manière générale, les villages, tout comme les campements d’ailleurs, sont situés à proximité d’un point d’eau et Bitouga n’échappe pas à cette règle (cf. carte p 133). D’après le docu-fiction de Linares (2003), il est en effet possible de voir, chez les Baka du Cameroun, que le campement a été installé tout proche d’un point d’eau et que les huttes ont été construites en arrondi autour d’une placette centrale, les ouvertures donnant toutes sur cette place centrale.