La musique, les chants et les danses

De manière générale, la musique, les chants et les danses sont trois pratiques artistiques et culturelles pour lesquelles les Baka sont reconnus aux yeux des Bantu, et ceci nationalement. Les chants sont présents au quotidien car comme le souligne Turnbull (1962 : 58) “… by singing and chatting loudly they scared away any of the animals that might otherwise have been startled into attack”. En effet, les femmes baka, ainsi que les groupes d’enfants, chantent régulièrement lorsqu’elles se rendent en forêt (comme évoqué précédemment, au village, l’activité humaine est telle que le bruit éloigne, de fait, les animaux). Dans cette communauté, il existe plusieurs styles de musique listés ci-dessous.

  • Les polyphonies vocales, pour lesquelles la technique employée est appelée yodle (i.e. passage en voix de tête)127, c’est essentiellement pour cette pratique que les Baka, à l’instar des Aka ou autres Mbuti, sont réputés (vidéo 19 et photo 8, annexe DVD). Cette technique ne se retrouve pas au sein d’autres groupes de chasseurs-cueilleurs du Gabon. L’accompagnement des yodles est réalisé rythmiquement par un ou plusieurs tambours à une membrane [ndùm], éventuellement une poutre frappée [mbàndā] et un ou plusieurs vieux bidons en plastique. Le danseur peut porter une ceinture à sonnailles autour de la taille (cf. vidéo 4 et photos en annexe DVD).
  • Les berceuses à une voix dont aucune n’a été répertoriée en yodle, ni accompagnée d’instrument.
  • Les chants fang, appris à leurs contacts, exécutés en monophonie (le plus souvent à l’unisson) (photo 8, annexe DVD). Ces chants peuvent être, ou non, accompagnés de tambours ndum ou de bidons.

On observe donc dans ce domaine, l’introduction de certains éléments empruntés à l’environnement bantu (voire occidentales) comme l’utilisation de certains matériaux inconnus auparavant (les boîtes de conserve remplacent les calebasses pour la fabrication des sonnailles), certaines pratiques de danse dont les exécutions s’éloignent des schémas traditionnels baka ; les Bantu faisant parfois appel à eux pour leurs diverses cérémonies (baptêmes, mariages, enterrements, etc.).

Les chants sont reliés à des pratiques mystiques dont quelques exemples sont fournis dans les sections suivantes. Certaines pratiques anciennes, tout en restant ancrées dans les pratiques culturelles actuelles, sont transformées de manière folklorique le temps d’une soirée afin de répondre aux attentes de touristes blancs acheminés par l’association Edzengui 128 . Néanmoins, comme la préparation d’un tel spectacle requiert la participation d’une dizaine d’individus durant une après-midi entière pour la confection des parures d’Edzengui (cf. ci-après) et qu’il n’y a pas de réelle motivation ni spirituelle ni financière (à hauteur du travail effectué), les Baka sont peu enclins à reproduire fréquemment ce genre de manifestation.

Notes
127.

Lorsque l’on se tient un peu à l’écart des chanteuses, l’on peut percevoir une certaine similitude entre quelques voix (souvent les plus âgées) et le cri du daman (essentiellement audible la nuit). Cette analogie n’est pas étonnante dans une perspective d’interaction générale des Baka avec leur environnement. Il en est de même de certains mouvements de danse très ressemblants aux comportements animaliers (de surcroît parés de raphia).

128.

Cette association est loin de faire l’unanimité auprès de la communauté baka, pour plus de détails concernant cet aspect, se référer à Paulin & al, 2009.