3.2.1.1.4 Alliance

Alliance à la génération d’Ego (G0)

Partant d’un Ego masculin, une distinction importante est faite entre les femmes des « frères aînés » et les femmes des « cadets ». En effet, sachant que le lévirat et le néposat impliquent l’héritage de (ou des) femme(s) d’un frère aîné ou d’un oncle utérin en cas de décès de celui-ci, Ego désigne ces femmes comme sa propre femme, à savoir [wà-lè] (litt. celle de-PP1S), ou [wɔ́-sɛ̀] (litt. femme, épouse).

Figure 58. Schéma des référents pour le terme
Figure 58. Schéma des référents pour le terme wàlè.

Ego aura le même type de comportement envers ces femmes que vis-à-vis de son épouse, néanmoins elle reste dans le domaine de l’« épouse virtuelle » dans la mesure où Ego ne peut en aucun cas avoir de relations sexuelles avec l’une d’entre elles du vivant de ses « frères aînés ». Il s’agit de la même interdiction évoquée pour le néposat (cf. supra). Inversement, toutes ces « épouses virtuelles » peuvent appeler Ego [kɔ̄-lè] (litt. époux-PP1S) au même titre que leur propre mari (cf. schéma ci-après).

Des appellations descriptives (secondaires) peuvent néanmoins être utilisées pour préciser qu’il s’agit d’épouses de « frères aînés » comme [wɔ̄-gbébā-lè], positionnant ainsi ces femmes en fonction du lien d’alliance qui les unit aux « frères ». Ce procédé est l’unique manière de désigner les épouses des « frères cadets » [wɔ̄-tàdī-lè]181, dans la mesure où ces femmes ne peuvent recevoir l’appellation d’épouse de la part d’Ego, du fait qu’elles ne sont pas sujettes au lévirat en sa faveur. Il s’agit alors d’appellations transparentes.

Ego peut également appeler wale « mon épouse » toutes les sœurs cadettes de sa femme, et réciproquement, celles-ci peuvent nommer Ego comme leur propre mari kɔle. Une relation de plaisanterie existe entre Ego et les sœurs cadettes de sa femme ; elles peuvent le taquiner sans craindre de représailles de sa part. A la mort de son épouse, Ego peut prendre une de ces cadettes en mariage. Cela renvoie directement à la notion de sororat donnée par Rivière (1995 : 61) : « un veuf se remarie avec une sœur cadette de son épouse décédée ». Toutefois, cette pratique, acceptée par la communauté, n’a pas valeur d’obligation.

Par ailleurs, il existe un terme [gí-] désignant la « belle-famille » (cf. ci-après) qu’Ego peut utiliser pour nommer sa femme, soit [gí-lè-wà-ndā] (litt. belle famille-PP1S-celle de-maison) signifiant en quelque sorte « ma belle-famille de la maison » ; renvoyant à l’idée que ceux qui sont de la même maison (la maisonnée) sont de la même famille (d’après Brisson, 1984 : 187, « ceux de la même famille » se dit [wà-lɛ̀-ndā kpódē] soit littéralement « ceux de-enfant-maison un », c’est-à-dire que « ceux de la maison ne font qu’un », ils appartiennent à la même famille.

Figure 59. Schéma des référents pour le terme
Figure 59. Schéma des référents pour le terme k ɔ̄ lè.

Ego féminin peut nommer son mari [kɔ̄-lè] (litt. époux-PP1S), ainsi que tous les individus la désignant expressément en tant que wale comme nous venons de le voir ; c’est-à-dire les époux de ses sœurs aînées, les frères cadets de son mari et les fils de la sœur de son mari.

Une asymétrie apparaît dans ce cas précis où le terme dépendant kɔ̄- est utilisé alors que pour Ego masculin, l’on trouve le dépendant wà- « celui, celle de ».

Notes
181.

Il existe également une autre dénomination pour wɔtadile, il s’agit d’un terme emprunté au fang mbɔm, signifiant « belle-sœur », qui a été phonologisé et auquel le pronom personnel 1ère personne du singulier a été ajouté soit mbɔmale.