Notion de diglossie

Doit-on parler de multilinguisme ou de diglossie, et par là-même de biclanie ou de diclanie, de bianthroponymie ou de dianthroponymie ?

‘« Originally diglossia would exclude the use of the high variety in everyday conversation (such as Classical Arabic). Diglossia is nowadays also used to describe any situation where two different languages or varieties of the same language are used and spoken in everyday life for different, often complementary functions in a speech community, one, however, being characteristically associated with sociolinguistically high, the other with low functions, that is one being considered more prestigious than the other. »’

D’après Wolff (2000 : 323), il est effectivement possible de parler de diglossie dans la mesure où une nette différence de statut social existe entre la langue fang, en haut de l’échelle, et le baka en bas. Néanmoins, il est important de prendre en compte toutes les langues même si certaines sont quasiment inexistantes pour toute une tranche de la population. En effet, le français est la seule des trois langues en présence à bénéficier d’un statut national officiel, elle est la langue de l’enseignement et bénéficie du statut le plus prestigieux sur l’échelle sociale énoncée par les Baka. Or, la majorité d’entre eux ne sont jamais allés à l’école et encore, de nos jours, leurs enfants ne s’y rendent pas pour les raisons évoquées ci-dessus. Ainsi, la plupart des Baka n’a du français qu’une connaissance passive limitée (voire une compréhension nulle pour certains individus n’ayant pas accès à la radio), les rares personnes capables de converser en français sont des enfants issus de mariages mixtes (du fait de leur scolarisation).

Il est donc clairement établi que le français est en position de diglossie, en tant que langue d’enseignement et des médias, par rapport au fang d’une part, langue de communication utilisée dans la cour de récréation, et au baka d’autre part qui n’a sa place qu’au sein de la communauté baka. La situation semble plus délicate entre le fang et le baka dans la mesure où ces deux langues sont utilisées dans de nombreux domaines communs et ce sont les individus en présence qui vont déterminer la langue de communication plutôt que l’activité en tant que telle (même si l’agriculture, activité émanant essentiellement des Fang eu égard aux CC, sera davantage sujette à l’emploi du fang). Pour autant, le fang se pose en tant que langue de communication interethnique dans la région de Minvoul, et la langue baka est encore utilisée seule (i.e. même en présence de Fang) dans tous les domaines mystico-religieux (cérémonies initiatiques, rituels, contes, etc.). Toutefois, il s’avère essentiel de ne pas négliger la fonction d’élévation sociale de la langue fang même dans le domaine religieux, il suffit parfois de l’arrivée d’un seul individu fang au milieu d’une foule de Baka pour que ces derniers changent automatiquement de langue de communication comme cela a pu se produire lors de l’enterrement d’un jeune baka au village de Mféfélam (cf. infra).

Figure 68. Tableau récapitulatif des trois langues en situation de diglossie
Etablissement scolaire Médias (radio, TV) Communication interethnique Travaux rémunérés Foyer, communauté 100% baka Domaine mystico-religieux
Enseignement Cour
français fang français (fang) fang (français) fang baka baka