b) Les opérateurs externes à la Moyenne Vallée du Rhône : l’aval

L’amont et l’aval de la filière fruits voient intervenir des opérateurs extérieurs à la Moyenne Vallée du Rhône. En amont des exploitations, la production des fournitures est assurée par des entreprises d’échelle nationale. Quelques pépiniéristes sont présents localement, mais également intégrés dans des réseaux commerciaux nationaux (Chazoule, 2005). Les circuits de l’aval sont constitués par des opérateurs localisés dans toute la France et en Europe (Figure 7).

Figure 7: Zoom sur les opérateurs de l'aval de la filière
Figure 7: Zoom sur les opérateurs de l'aval de la filière

Les clients des expéditeurs constituent le premier niveau de l’aval. Ce sont les opérateurs de seconde mise en marché, encore appelée « stade de gros », qui correspond à la réception d’une diversité de gros lots homogènes et calibrés de fruits, qui sont ensuite re-fractionnés en lots de taille moyenne pour pouvoir être distribués aux distributeurs, détaillants, et restaurateurs. C’est donc l’étape inverse de celle de la première mise en marché. Elle est assurée par deux types de professionnels qui se partagent les achats de fruits auprès des premiers metteurs en marché : les grossistes en achètent 40% des volumes et les centrales d’achats des grandes et moyennes surfaces (GMS) en achètent 46%66.

Les grossistes sont les professionnels traditionnellement chargés de cette fonction. Situés sur un marché de gros67 ou hors marché68, ils assurent la recherche, la réception, le fractionnement et l’assortiment en lots commercialisables. Cette catégorie de professionnels rassemble une très grande diversité d’entreprises, allant de groupes internationaux comme POMONA, nationaux comme CRENO qui possède une station d’achat en Moyenne Vallée du Rhône (à Bourg-les-Valence), à de petites entreprises régionales. Leurs achats peuvent être des transactions directes entre un expéditeur et un grossiste, ou avoir lieu sur les marchés de production et les M.I.N. de toute la France. En effet, si nous avons pu identifier six grossistes de taille extrêmement variable situés dans la Moyenne Vallée du Rhône, les expéditeurs commercialisent en priorité en direction de marchés plus éloignés, vers la moitié nord de la France et à l’export.

Le second type d’opérateur du stade de gros, les centrales d’achats, assurent la recherche, le référencement, la négociation puis l’achat des fruits nécessaires à l’approvisionnement de l’ensemble des magasins liés à une enseigne de grande distribution. Les marchandises sont stockées en entrepôts, puis les magasins (chef de rayon) passent leurs commandes au fur et à mesure de leurs besoins. En France, six centrales d’achats interviennent pour les principales enseignes de la grande distribution : Carrefour, Casino, Auchan, Leclerc, Intermarché et Système U. Selon la politique des enseignes, la marge de manœuvre accordée aux magasins dans leur approvisionnement est variable. Si Casino est très centralisé, les magasins Intermarché, Système U et Monoprix peuvent s’approvisionner directement auprès de coopératives ou de producteurs-expéditeurs régionaux. Pour pouvoir vendre aux centrales d’achats, les expéditeurs doivent faire référencer leur marchandise. Pour cela, ils doivent pouvoir offrir des volumes garantis et homogènes, une certaine gamme et des critères de qualité correspondant à la demande de l’enseigne. Ensuite, les transactions se font directement entre l’expéditeur et la centrale d’achats. Comme pour le stade d’expédition, le stade de gros recouvre donc des fonctions logistiques et commerciales. En revanche, elles concernent essentiellement des opérateurs d’envergure nationale et internationale, situés hors de la Moyenne Vallée du Rhône même si quelques succursales, magasins d’enseigne ou petits grossistes y sont présents.

La transformation agroalimentaire dans la filière fruits est essentiellement conçue comme un débouché pour les fruits peu valorisables en frais, vendus de manière opportuniste par les opérateurs de première et de seconde mise en marché. Les engagements sous contrats pour une production adaptée aux exigences industrielles sont encore rares, contrairement à certaines productions légumières et maraîchères (tomate notamment). Si quelques IAA de la Moyenne Vallée du Rhône sont spécialisées dans le travail des fruits, leurs liens avec la production locale ne sont pas systématiques et mal connus, comme pour les opérateurs de la seconde mise en marché.

Enfin, en ce qui concerne la distribution, nous ne disposons pas de chiffres spécifiques à la Moyenne Vallée du Rhône, ni à la région Rhône-Alpes. Les statistiques établies pour les fruits et légumes à l’échelle de la France montrent qu’elle est fortement concentrée par les enseignes des GMS qui réalisent 72% du chiffre d’affaires et des volumes des ventes au détail de fruits et légumes69. Etant donné la structuration des achats des GMS par leurs centrales d’achats, les fruits issus de la Moyenne Vallée du Rhône sont donc distribués dans toute la France. Néanmoins, la politique de vente parfois peu adaptée à préserver la qualité de ces produits frais a conféré à la grande distribution une réputation plutôt négative auprès des consommateurs en ce qui concerne la qualité des fruits vendus (Cavard et Moreau-Rio, 2002; Roty et Dubuisson-Quellier, 2005). Les détaillants spécialisés et les marchés de plein vent ont ainsi conservé une place non négligeable dans la distribution des fruits et légumes (Figure 8), supérieure à celle qu’ils occupent pour l’ensemble de la distribution alimentaire. Si une petite partie de la production de la Moyenne Vallée du Rhône est vendue en circuits courts ou spécialisés pour la consommation locale, l’aval est donc principalement situé hors du bassin de production et la majorité de la consommation des fruits de la Moyenne Vallée du Rhône concerne l’échelle nationale.

Figure 8: Répartition des parts de marché de la distribution des fruits et légumes 1997-2004

Extrait de : P. Cavard, C. Baros, 2005. Le commerce de proximité, concepts de distribution, modes de vie des consommateurs. Paris, CTIFL, p.21.

Notes
66.

CTIFL, Observatoire des entreprises de gros, 2006.

67.

Les marchés de consommation, ou de gros, sont implantés à proximité des agglomérations urbaines qu’ils approvisionnent en fournissant l’alimentation de la ville ou de la région. Ils peuvent être classés MIN. Ils confrontent : des offreurs (grossistes, courtiers, importateurs, parfois des centrales) à des acheteurs (détaillants spécialisés ou généralistes sédentaires ou forains, magasins indépendants de la grande distribution, des demi-grossistes, des opérateurs de la restauration hors foyer, etc.). Les grossistes sur marché vendent essentiellement aux acheteurs fréquentant ce marché : détaillants, restaurateurs, autres grossistes, etc. Ils approvisionnent généralement l’agglomération concernée par le marché et ses alentours.

68.

Les grossistes hors marché exercent leurs activités dans des entrepôts, souvent en milieu rural. Ils offrent souvent une gamme de services plus étendue, proposant des livraisons, des préemballages, des ventes sur commande à leurs clients.

69.

CTIFL, 2006.