a) La marque collective « Goûtez l’Ardèche », découpage départemental

[La marque collective « Goûtez l’Ardèche »213, découpage départemental]

« Goûtez l’Ardèche » est une marque collective créée par la Chambre d’agriculture de l’Ardèche en 1995, accessible à tous les produits. Une démarche spécifique est élaborée pour les fruits entre le technicien de la Chambre et les principales coopératives ardéchoises. L’objectif est d’associer sous cette marque une démarche qualité, avec la constitution d’un cahier des charges par espèce ; une communication commune, avec des affiches, logos et conditionnements communs ; et une mise en marché structurée autour des trois principales OP coopératives : Rhodacoop, Coopeyrieux et Vivacoop (près d’Aubenas). Une première tentative est menée pour la cerise et pour l’abricot, productions communes à l’ensemble du département. Malgré ce projet a priori cohérent, une quantité minime de fruits est vendue sous la marque214, avant que celle-ci ne soit totalement abandonnée par les opérateurs de la filière. Comment expliquer cet échec ?

Les trois coopératives participant à la démarche n’ont pas réussi à s’entendre sur des critères de qualité différenciant réellement la production « Goûtez l’Ardèche », par conséquent aucune valeur ajoutée n’a pu être dégagée. Comment différencier une cerise ? Les débats ont porté sur le calibre. Les OP du nord du département, où la production est plus importante et largement irriguée, souhaitaient imposer un calibre supérieur, tandis que celle du Sud, où la production est peu irriguée demandait un seuil de calibre plus petit. Finalement, l’accord fut nivelé par le bas, ce qui ne correspondait pas au « haut de gamme » des principaux metteurs en marché.

Deux de ces OP, et les plus importantes, avaient un approvisionnement venant de la Drôme et de l’Ardèche, sans grande différence qualitative. Elles ont donc préféré continuer à segmenter leur production selon leurs propres stratégies d’entreprises (marques propres) plutôt que par la marque « Goûtez l’Ardèche », qui aurait occasionné des charges logistiques supplémentaires.

Enfin, le choix initial de concentrer la mise en marché de toute la production « Goûtez l’Ardèche » était inspiré de l’initiative de la cerise de Bessenay215. Seulement, les opérateurs choisis – les coopératives - traitent de gros volumes, et leurs marchés que sont l’export et les GMS ne sont pas réceptifs à une telle qualification. Aujourd’hui, les produits utilisant « Goûtez l’Ardèche » comme les miels et charcuteries, se vendent davantage sur le marché départemental et régional. En outre, il n’y a pas eu de mise en marché commune des fruits « Goûtez l’Ardèche » entre les trois OP. Elles sont restées en position concurrentielle les unes par rapport aux autres quant à leurs propres marques, n’investissant que très peu pour cette marque commune.

L’échelle départementale définie pour la marque « Goutez l’Ardèche » ne correspond pas à l’échelle d’approvisionnement des opérateurs sélectionnés pour assurer la commercialisation. Les limites départementales découpent le bassin, produisant une segmentation de la production qui leur occasionne des charges logistiques supplémentaires pour l’identifier. L’échelle régionale est-elle plus efficace ?

Notes
213.

Les sources concernant cette initiative proviennent de nos enquêtes personnelles réalisées avec le technicien de la Chambre d’agriculture de l’Ardèche, un président et un directeur de deux coopératives impliquées dans la démarche, en 2006.

214.

Pour la coopérative Rhodacoop, 300t d’abricots sont commercialisées en « Goûtez l’Ardèche » la première année, 90t la seconde, puis la marque n’est plus utilisée (entretien auprès du président, avril 2006).

215.

Bessenay est une commune du département du Rhône, au cœur d’un petit bassin de production de cerises. Une marque commerciale a été créée et la mise en marché des cerises de Bessenay est assurée par un seul expéditeur privé. Il valorise la petite notoriété commerciale sur le marché régional, ainsi qu’à l’expédition.