2. Type 2 : Expédition nationale – export

La stratégie de type 2, appelée « expédition nationale-export », concerne des exploitations dont la totalité de la production est conditionnée sur l’exploitation et expédiée depuis l’exploitation, en direction des marchés nationaux et exports.

a) Mutualisation des charges de commercialisation autour d’une même stratégie de qualité

Tableau 24: caractéristiques des exploitations du type 2
N°EA Localisation Surface de verger Système de production Statut (nombre d’associés) Main d’œuvre salariée
5 Sud Drôme 30 ha Abricots + vigne (13 ha) SCEA (5) 6,5 UTA
8 Sud Drôme 96 ha Pêche/pomme/abr/poire/cerise GAEC (4) 26 UTA
13 Nord Drôme 130 ha Pêche/abr/pomme/poire/cerise/
prune
GAEC (3) 32 UTA
25 Nord Ardèche 17,5 ha Cerise/abr/pêche/pomme + 25 vaches laitières Individuelle 5 UTA

Cette stratégie concerne quatre exploitations de l’échantillon (Tableau 24) qui doivent cumuler les fonctions de production, conditionnement et de mise en marché. Les producteurs rencontrés ont entre 40 et 50 ans pour trois d’entre eux, le dernier ayant plus de 50 ans. Excepté le cas d’une exploitation individuelle de taille moyenne, située sur le plateau ardéchois, les trois autres exploitations sont en fait de véritables petites sociétés familiales de production-expédition fruitière. Elles sont tenues par plusieurs associés issus de la même famille, souvent frères et sœur, ou père et enfants. Deux exploitations sont particulièrement grandes, avec 96 ha de vergers pour l’une et 130 ha pour l’autre, dont 70 ha dans la Crau. Si les vergers présentent les six espèces de fruits, la pêche-nectarine reste dominante puisqu’elle occupe respectivement 50 ha et 70 ha259. Ce sont les deux exploitations de l’échantillon qui embauchent le plus de personnes, avec 30 et 35 UTA dont 6 et 2 UTA salariés permanents260. En revanche, la troisième exploitation ne présente que 30 ha spécialisés en abricotiers261, mais réalise également une activité viticole en zone d’AOC Croze-Hermitage.

La marge de la première mise en marché est maintenue sur les exploitations. Les producteurs ont choisi de ne pas laisser cette marge à un metteur en marché. Ainsi, les charges du conditionnement et du travail commercial reviennent aux exploitations. Or, le travail de commercialisation dans la filière fruits a beaucoup évolué ces dernières années. Il ne suffit plus de maintenir des relations avec des commissionnaires à Rungis ou des grossistes répartis dans toute la France. Dans le contexte d’une concurrence extérieure pressante, d’une forte emprise de la grande distribution et d’une restructuration des métiers d’expédition et de grossistes (cf chapitre 2), les interlocuteurs se renouvellent rapidement, les exigences en termes de prix, de quantités et de qualité se renforcent. La fonction commerciale devient tout aussi pointue que fondamentale. Les producteurs rencontrés en 2006 soulignent ce contexte commercial « en pleine mouvance, tout est en train d’évoluer », créateur d’incertitude à moyen terme et exigeant «une grande mobilité », c’est-à-dire la capacité de « changer rapidement de client ». Pour répondre à cette situation, les quatre exploitations présentent chacune une stratégie bien construite, qui compose habilement entre minimisation des charges commerciales, majoration de la marge et fidélisation des clients par une qualité spécifique.

Ainsi, chacun des cas montre que l’organisation de la commercialisation (mais pas le conditionnement) devient aujourd’hui une fonction à la fois stratégique et particulièrement coûteuse. Selon la taille des exploitations (en termes de volumes produits et de capacité de travail) les orientations sont différentes. Pour les plus grandes, la fonction commerciale est internalisée. Cela suppose l’augmentation des volumes traités via la création d’une société commerciale et le rachat d’une production extérieure à l’exploitation. Pour les exploitations moins importantes, elle est externalisée par diverses modalités d’accord avec des unions commerciales plus grandes. Contrairement aux exploitations du type 1 où il y a délégation totale de la mise en marché, dans ce cas le producteur garde le statut d’ « expéditeur » : il conserve ses anciennes relations commerciales et surtout sa propre station de conditionnement, son nom et sa marque. Et dans chacun de ces schémas organisationnels de mutualisation de la fonction commerciale, des stratégies de production particulières sont développées pour maximiser la marge de l’exploitation.

Notes
259.

Mais ces surfaces sont en diminution du fait de la sharka et des prix bas.

260.

En comparaison, la moyenne de l’échantillon est de 10,5 UTA par exploitation, sachant que les exploitations venant juste après ces deux cas ne comptent que 21,5 et 20 UTA.

261.

La pêche a été complètement arrêtée il y a 4 ans, essentiellement pour des raisons de mauvaise rentabilité économique.