a) Stratégies fondées sur la combinaison de plusieurs débouchés

La distinction entre les voies de commercialisation dépend de plusieurs critères : les espèces, les variétés, les qualités des produits. Selon les exploitations, on observe plusieurs degrés d’investissement dans la stratégie de livraison aux détaillants régionaux.

i. Les exploitations dont la vente sur les circuits d’expédition est dominante

Un premier groupe rassemble des exploitations dont la vente sur les circuits d’expédition est dominante. Cela concerne trois exploitations qui n’ont, à priori, aucune ressemblance structurelle entre elles : situées dans trois sous espaces différents, deux sont spécialisées en arboriculture, avec respectivement 35 ha de pêchers, abricotiers et kiwis, et 8 ha d’abricotiers et cerisiers, alors que la troisième cumule 26 ha de vergers (abricots, cerises, poires) et 11 ha de vignes. La première vend 95% de ses volumes à un grossiste situé à Valence, dont les débouchés sont essentiellement les GMS et l’export. Les 5% restant sont livrés aux détaillants locaux, des épiceries. Depuis longtemps, l’exploitation s’est positionnée sur une production de qualité dans l’objectif de se faciliter l’accès aux marchés. Elle produit des kiwis AB et des pêches et abricots certifiés Eurepgap, signes bien reconnus par les circuits d’expédition. En revanche, seul le label AB est valorisant pour les détaillants locaux. Il n’y a pas de différenciation de qualité entre les fruits vendus au grossiste et ceux livrés aux épiceries. En outre, devant la difficulté à valoriser la qualité des pêches dans les circuits GMS et export, ce producteur aimerait développer la vente directe aux consommateurs. Il porte un projet de création d’un magasin collectif de producteurs pour la vallée de l’Eyrieux.

La deuxième exploitation est adhérente à une coopérative pour les cerises et les abricots. Elle en apporte environ deux tiers des volumes à la coopérative, et vend le tiers restant à des petits grossistes drômois, des détaillants et un industriel local, ce qui représente une quinzaine d’interlocuteurs au total. Il n’y a pas de distinction de qualité entre les fruits apportés à la coopérative et ceux vendus directement, mais l’ensemble de la production vise une qualité commerciale haut de gamme (fruits gros, colorés), et est récoltée à maturité. Le tri s’opère par l’organisation inhérente aux temps de transport pour assurer les livraisons : la récolte de la première partie de la journée est apportée à la coopérative (environ 1h de trajet aller) tandis que la récolte de la fin de journée est stockée pour être calibrée et conditionnée le lendemain sur l’exploitation, essentiellement par des aides familiaux. Seule exception, l’industrie locale, de fabrication de sorbets, exige des fruits d’excellente qualité et mûrs, ce qui nécessite un « affinage » spécifique des abricots, et elle achète également des pêches de vigne. Les aléas climatiques peuvent faire évoluer la proportion de fruits vendus hors de la coopérative, comme en 2007 où un printemps pluvieux a rendu la conservation des cerises très difficile. Les marchés de la coopérative refusant ce type de produit, la majorité des cerises a été vendue aux grossistes et détaillants locaux277, trop contents de pouvoir se fournir en un produit rendu rare sur les marchés d’expédition classiques.

Enfin, la dernière exploitation vend la quasi-totalité de ses volumes à deux expéditeurs locaux, avec lesquels elle travaille depuis de nombreuses années278. Depuis peu, elle fait également fabriquer du jus à façon par un industriel de Savoie, qui est vendu par bouche à oreille aux particuliers. Les associés cherchent en outre à développer de nouvelles formes de commercialisation pour mieux valoriser leurs fruits. Le projet envisagé en 2006 visait la vente de fruits par un système de « dépôt-relais » chez des producteurs partenaires dans les régions françaises non productrices de fruits.

Notes
277.

Dans ces circuits, où les délais de mise à l’étalage sont extrêmement courts comparés à ceux de la grande distribution et de l’export, le problème d’éclatement des cerises, pourvu qu’elles soient bien triées, n’est guerre limitant, surtout en période de manque d’approvisionnement comme cela a été le cas en 2007.

278.

Ils étaient conventionnés dans une même OP fédérative qui a été dissolue en 2004.