b) Proximité producteurs-distributeurs permettant une qualité supplémentaire et un service

Pour les exploitations du type « expédition et vente aux intermédiaires régionaux », la proximité entre les producteurs et les intermédiaires régionaux offre la possibilité aux premiers d’apporter à leurs clients une qualité supplémentaire couplée à un service. La qualification de l’offre est en effet importante pour avoir accès aux distributeurs locaux. Elle repose sur la fraîcheur, le goût (issu des choix variétaux et d’une récolte à maturité suivie d’une livraison rapide), puis la certification en bio. Le label AB ouvre des marchés nouveaux chez les détaillants locaux : la création d’un rayon de produits bio dans la gamme « Les Sens du Terroir » chez Gamm Vert en est un exemple. Parallèlement, cette qualification est mise en valeur par l’apport d’un service de la part du producteur envers le distributeur : livraisons régulières, conditionnements adaptés aux souhaits du client, réactivité du producteurs en cas de rupture de stock. Cela est rendu possible grâce à la proximité géographique et la relation directe entre le producteur et le distributeur. L’échelle du rayon de livraison de chaque exploitation est d’ailleurs liée aux temps de transports nécessaires. En général, la durée du transport doit permettre de livrer des fruits cueillis le matin même, la veille au plus tard, puis conditionnés dans la foulée.

En ce qui concerne la commercialisation sur les circuits d’expédition, les débouchés majoritaires sont les grossistes et les expéditeurs privés, offrant la flexibilité nécessaire au bon déroulement des stratégies des exploitations. L’adhésion à une organisation collective de vente exigeant un engagement d’apport, comme les coopératives et les OP conventionnées avec un expéditeur, n’est pas toujours facile à concilier avec les ventes sur d’autres débouchés. Certaines exploitations n’engagent leur apport que sur une seule espèce, d’autres sur une partie des volumes lorsque c’est possible. Néanmoins, certaines pratiques de vente en dehors de la coopérative sont illégales au regard de la règle d’apport total.

Par ailleurs, les ressources qualifiantes ne sont presque pas mobilisées dans cette stratégie, excepté les rares cas de référence explicite à la provenance. Dans un cas elle se médiatise par une marque commerciale, « terroir d’Isérine », dans un autre, la provenance « Ardèche » est mobilisée à l’oral par le producteur, au moment de la présentation de ses produits aux grossistes. Cet attribut donné aux fruits reste une donnée interne aux opérateurs d’aval de la filière, et n’est pas communiqué aux consommateurs. La plus-value qui peut en résulter reste essentiellement maîtrisée par l’intermédiaire (distributeur ou grossiste), même si elle est un peu répercutée au producteur lors de la négociation du prix.

La stratégie des exploitations du type 4 est principalement construite sur la valorisation de la proximité avec les opérateurs d’aval de la région, qui requièrent une qualité spécifique des produits et une offre de services dans l’approvisionnement. Elles mobilisent en outre l’organisation commerciale du bassin pour écouler facilement le reste des volumes. Ainsi, la proximité géographique entre les producteurs et les intermédiaires régionaux constitue une ressource organisationnelle dans le cas de l’élaboration d’une offre de qualité spécifiée aux besoins de l’opérateur couplée à un service d’approvisionnement flexible. L’enjeu pour le producteur est d’offrir un produit différent de ceux proposés par les grossistes ou les centrales d’achat, ainsi qu’une réactivité supérieure.

Le temps de travail commercial, de calibrage, de conditionnement et de livraison est souvent absorbé par le producteur lui-même, qui ne compte pas ses heures. La marge commerciale dégagée par la mise en marché d’un produit haut de gamme est alors récupérée par l’exploitation. Le bilan en termes de trésorerie est donc positif. Reste à évaluer la charge de travail supplémentaire. Globalement les producteurs rencontrés acceptent cette charge de travail parce qu’ils trouvent une réelle satisfaction, économique et personnelle, dans la valorisation de leurs produits, tendance que l’on retrouve dans les exploitations du type 5.