1.3.1.2 Les actes symboliques

Dans la construction groupale de l’objet médiateur, il est nécessaire d’interroger la dimension relationnelle proprement dite.

En quoi et comment l’objet matériel condense-t-il les modalités singulières du rapport à l’objet pulsionnel ? Comment l’objet primaire se profile-t-il derrière l’objet médiateur ?

B. Chouvier (2007) nous dit :

‘« L’objet médiateur est objet de représentance de l’objet »20.’

La façon dont il est traité témoigne de l’état actuel des relations à l’intérieur du groupe comme nous le confirmera la mise à l’épreuve de cette hypothèse. Aussi importe-t-il au plus haut point de repérer et d’analyser la manière dont chacun des participants traite l’objet, quand le groupe n’est pas encore constitué comme tel. Par la suite, c’est le fonctionnement groupal lui-même qui va inférer directement la manière d’utiliser l’objet et de l’impliquer au sein des relations transférentielles.

Une place particulière doit être faite aux actes symboliques (Chouvier, 1997). Dans le travail groupal médiatisé, les processus psychiques de la symbolisation nécessitent d’être externalisés dans des actions repérables et interprétables comme telles. L’acte n’est pas ici synonyme de court-circuitage du penser, mais au contraire le passage obligé pour accéder au penser.

L’étayage sur le corps et la gestuelle permet de déployer d’abord spatialement ce qui va par la suite se temporaliser pour pouvoir être introjecté comme moment d’une processualisation.

B. Chouvier repère trois types d’acte symbolique qui sont à reconnaître en priorité : ceux qui concernent la substitution, ceux qui touchent la séparation et enfin ceux qui ont à voir avec la sublimation. Le travail psychique de métaphorisation repose sur la plasticité des représentations. Jouer sur le déplacement, remplacer une image par une autre renforce cette plasticité. Chacune de ces opérations de substitution est délimitée, répétée, voire ritualisée dans les différents moments de la séance, afin qu’elle puisse être introjectée comme acte du penser.

Notons bien qu’il ne s’agit nullement de rites stéréotypés, mais d’actions créatrices à valeur symbolisante. Ce type de ritualisation intégratrice est à même aussi bien de réfréner les élans maniaques que de stimuler une symbolisation arrêtée, car il mobilise d’abord tout le corps et développe une mimo-gestuelle adaptée, avant que l’action puisse être psychisée.

Dans le groupe, toutes les actions consistant à détacher, découper, déchirer, participent de la séparation. L’objet demande à être attaqué, dépecé, rompu, brisé, pour pouvoir être ensuite réparé et réunifié. La continuité du lien avec le thérapeute et avec le groupe ouvre la voie ici à la mise en place d’une relation d’objet stable qui n’est plus affectée par les absences réelles. La séparation, mise en sens dans les actes symboliques autour de l’objet médiateur et dans leur verbalisation, s’internalise, peu à peu, comme structurante.

Ces actes symboliques seront repérables au sein de notre dispositif et nous en proposerons une modélisation, en les répertoriant et les articulant aux processus psychiques dont ils témoignent (ils seront formalisés au sein de la grille de lecture présentée en quatrième partie).

Notes
20.

CHOUVIER B. (2007), Dynamique groupale de la médiation et objet uniclivé, in PRIVAT P., QUELIN-SOULIGOUX D., Quels groupes thérapeutiques ? Pour qui ? Erès, 208 p., p. 19-32.