Séance 8 : Le « thérapeute-truelle » : de la castration réelle à la castration symboligène. Les prémices du risque de la séparation

Elsa débute la séance en tapant la terre sur la planchette...

Un peu fatiguée de ce qui se répète (certes c’est un des éléments notoires, mais je sais que si je n’interviens pas, Elsa peut transformer le dispositif en gelant tous les affects et nous enfermer dans la chronicité et le déficit), je lui suggère : « Et si on essayait de faire autre chose que de la taper, cette terre ? »

Elle dit : « Quoi ? Une boule ? C’est très compliqué, mais je vais le faire pour toi. » Du bout des doigts et avec un minuscule morceau de terre, elle fait quelque chose qui ressemble à une miette.

Puis, renonçant à la boule, elle me demande comment faire pour couper le moreau de terre en deux.

Séduite par cette demande nouvelle qui non seulement nous extirpe de ce qui est figé mais aussi résonne comme un début de séparation faisant bien suite à la séance précédente, dans un mouvement beaucoup trop pédagogique, je lui désigne la truelle et lui fait une démonstration.

Elle essaie à son tour, effleure tout d’abord et égratigne le morceau avec les angles de la truelle, puis tranche. Elle pose la truelle, me regarde un peu sidérée, et me demande alors : « Tu veux que je me coupe les doigts ? Parce que ça peut faire très mal ! »

Moi : « Séparer, ça fait mal ? »

Elsa : « Ben ouais, si tu fais pas attention... Ma mère, mon père et mon frère se coupent avec un couteau. »

Elle brandit alors la truelle et vocifère : « Et ça, c’est interdit! »

Observant la truelle dans sa main, elle me demande : « Ca sert à quoi d’abord ? Mes parents vont râler s’ils savent que j’utilise ça ! Chez moi, je coupe pas, je demande à mes parents. »

Je lui réponds que : « Les parents ne savent pas toujours ce que font leurs enfants en leur absence... »

Elsa sépare alors laborieusement et en plusieurs fois le morceau de terre, en poussant des cris d’excitation.