4.5 La grille de repérage des actes symboliques à travers le modelage

4.5.1 Introduction à la grille

Afin d’introduire notre outil de repérage, il est nécessaire de garder à l’esprit que la clinique nous a bien démontré que le sujet agit en fonction du milieu dans lequel il se trouve et non pas uniquement d’un processus interne qui serait « fixé » (méfions-nous de ne pas « cataloguer » les patients).

Il n’existe pas d’actes symboliques ni de formes sensorielles qui soient structurels et inéluctables.

L’utilisation de chaque mode est primordiale mais non exclusive.

C’est le média qui favorise la réémergence d’un mode de communication très archaïque avec l’environnement, la matière agissant elle-même comme un attracteur psychique permettant que quelque chose se réactualise à travers elle.

Sur le plan diachronique, il se réactualise quelque chose qui s’est passé à une époque de narcissisme primaire et qui représente un entrelacement entre psychisme et matière, entre objectivité et objectalité.

L’enchaînement des formes sensorielles au sein du dispositif permet un travail de constitution des contenants psychiques, autrement dit une mise en place progressive des qualités plastiques de l’enveloppe psychique. Il représente aussi le déroulement des chaînes associatives groupales.

La succession temporelle des différentes positions décrites n’empêche pas la superposition possible de deux positions ou les allers et retours d’une position à l’autre, selon les moments de l’évolution du sujet dans l’utilisation qu’il fait de la matière.

Dans un vécu sensoriel unidimensionnel, l’attention du sujet se polarise vers des objets perçus comme attirants ou repoussants, selon une caractéristique sensorielle attractive ou non. Au niveau bidimensionnel, les facultés de perception et d’appréciation des qualités de surface des objets se développent de manière importante. L’assimilation de la tridimensionnalité se repère dans l'utilisation des objets. Ils ne sont plus uniquement source de stimuli sensoriels, ils ont aussi une fonction utilitaire avec des caractéristiques internes propres. La compréhension de la finitude des choses et des êtres semble être le témoin de la quadridimensionnalité.

Les caractéristiques sensorielles de la matière terre permettent sans doute de témoigner des différentes étapes de l’organisation spatiale et temporelle (dimensionnalité) et de les mettre en travail : la notion d’espace grâce à son aspect en trois dimensions, et la notion de temps grâce à son indestructibilité. La matière terre est ainsi le témoin de l’organisation spatiale et temporelle du côté du sujet.

La grille présente : les actes symboliques (nous en avons répertorié vingt), croisés avec les étapes évolutives de l’autisme infantile décrites par G. Haag, la structure de l’enveloppe psychique, les formes sensorielles qui y sont associées, et enfin les cas traités dans cette étude qui s’y rattachent.

Nous devons beaucoup dans l’élaboration de cette grille de repérage aux travaux de G. Haag, d’A. Brun et de S. Krauss.

Nous leur avons en effet emprunté certaines des conceptions et avancées théoriques, nous en inspirant, les croisant, et en y apportant des modifications, adaptant ces pré-requis à notre population ainsi qu’aux spécificités de notre médiateur d’une part, mais aussi du cadre-dispositif.

Haag parle d’évolution de l’autisme infantile traité, évolution dont elle décrit les étapes dans une perspective dynamique et évolutive. Elle détermine quatre grandes étapes dans le développement de la personne autiste qu’elle précise comme n’étant pas linéaires. Il y a souvent, au contraire, un double aspect du développement avec d’une part, la reprise du développement normal, et d’autre part le maintien ou le développement d’aspects proprement pathologiques. Les problématiques antérieures font retour dans un travail de réintégration/réélaboration, tandis que de nouvelles capacités émergent mais à chaque phase existe une étape prévalente d’organisation à l’œuvre.

La grille de repérage clinique des étapes évolutives de l’autisme infantile traité qu’elle propose s’ordonne autour des grandes étapes de la formation du Moi corporel que les enfants autistes nous ont aidé à mieux repérer. G. Haag découpe le développement des enfants autistes traités en quatre étapes principales qui sont : un état autistique réussi, une étape de récupération de la première peau, une phase de symbiose installée avec clivage vertical et horizontal de l’image du corps, et enfin une étape de séparation/individuation.

A chaque étape, les différents comportements et capacités sont mis en rapport, liés, et trouvent une unité dans la théorie psychanalytique de l’autisme, surtout en ce qui concerne les vécus corporels et l’avancée de la différenciation Soi/non-Soi.

En appui sur cette grille de repérage, nous établirons des correspondances avec l’utilisation qui est faite de la matière, et donc comment les formes sensorielles peuvent nous renseigner sur l’évolution des sujets et les phases sur lesquelles ils achoppent.