1. Rappels anatomiques et physiologiques des voies auditives

1.1 La transduction périphérique

Le signal sonore, va tout d’abord être amplifié (de 5 à 20 dB pour les fréquences de 1.5 à 7 kHz) et modulé par les variations de direction que lui imprime la morphologie du pavillon de l’oreille externe, avant d’être transmis à travers l’oreille moyenne (membrane tympanique et osselets) jusqu’à l’oreille interne. Le rôle de l’oreille moyenne est l’adaptation d’impédance mécanique entre l’oreille externe, située en milieu aérien et l’oreille interne, afin de transmettre avec un bon rendement l’énergie vibratoire de l’air aux liquides de l’oreille interne (Fig 1).

Au niveau de l’oreille interne (organe de Corti), le son va être converti, d’un stimulus vibratoire en une forme interprétable par le système nerveux, ce phénomène est appelé la « transduction périphérique du son ». L’organe de Corti (Fig 2) constitue la partie neurosensorielle de la cochlée, il repose sur la membrane basilaire et contient les cellules ciliées internes et externes. Les cellules ciliées externes, environ trois fois plus nombreuses que les cellules ciliées internes, sont impliquées dans un mécanisme d’amplification actif ayant pour fonction d’amplifier les vibrations détectées par les cellules ciliées internes. Les cellules ciliées internes, reliées principalement à des fibres nerveuses afférentes, ont pour rôle la transduction du signal vibratoire en un signal électrique, transmis aux relais et voies centrales. Les cellules ciliées internes constituent des récepteurs sensibles aux mouvements liquidiens de l’oreille interne qu’elles transmettent sous forme de décharges nerveuses aux neurones bipolaires dont les axones forment le nerf auditif.

Une propriété de base de l’organe de Corti est qu’il effectue une analyse en fréquence des stimulations sonores. En réponse à une fréquence donnée, les différentes portions de l’organe de Corti, le long de la cochlée, vibrent avec des amplitudes différentes. Les régions basales répondent aux fréquences élevées, tandis que les régions proches de l’apex répondent aux basses fréquences : on parle de l’organisation tonotopique de la cochlée.

De manière historique, Helmholtz en 1885, inspiré des travaux de Fourier, formule l’hypothèse selon laquelle le codage des sons suivrait une théorie dite de « la place ». Ainsi, lorsqu’un stimulus parvient à la cochlée, les parties de la membrane basilaire dont les fréquences correspondent aux composantes de ce stimulus vont commencer à vibrer et induire un message nerveux. Cependant, Bekesy, 1947 a démontré que cette partition n’existait pas et a proposé une évolution de la théorie de « la place » en théorie de « l’onde propagée ». La distance parcourue par l’onde propagée le long de la membrane basilaire dépendrait de la fréquence du son. En effet, la structure de la membrane basilaire se modifie le long de la partition cochléaire. Ainsi, les sons de haute fréquence entrainent un déplacement d’amplitude maximal à la partie basale de la membrane basilaire, en dépensant beaucoup d’énergie et l’onde ne se propage pas très loin. Pour ceux de basse fréquence, l’onde peut se déplacer de la base à l’apex de la membrane basilaire avant que toute l’énergie soit épuisée. Cette relation liant la fréquence du son et la localisation entre la base et l’apex du codage est nommée carte cochléaire fréquentielle par Liberman (1982). De par l’existence de ce gradient, la membrane basilaire et par extension la cochlée, sont dites organisées de manière tonotopique. Propriété essentielle du système auditif, l’organisation tonotopique se maintient à travers les différents noyaux relais jusqu’au cortex. Bekesy, en 1949 a également démontré que les cellules de la cochlée codent préférentiellement une certaine fréquence mais également les fréquences voisines de façon moins spécifique, selon une courbe d’accord. Ces courbes d’accord deviennent plus étroites lorsque la fréquence augmente. Cet « accord en fréquence » serait étroitement lié à l’organisation tonotopique de la cochlée et de toutes les voies auditives. Ce mécanisme de codage de la fréquence serait particulièrement exploité lorsque les sons présentés sont courts ou/et de haute fréquence.

Par contre, en présence de sons purs de fréquence relativement basse (<4 kHz), les neurones déchargent préférentiellement lors des pics de pression de l'onde excitatrice (selon le principe dit du « calage de phase ». L'existence d'une période réfractaire des neurones -durée d'une milliseconde environ succédant à une décharge et pendant laquelle toute décharge est impossible- rend la synchronisation incomplète mais on peut toutefois déduire la fréquence d'un son en observant la cadence de décharge des fibres. En effet, celles-ci déchargent à des instants qui correspondent tous à un nombre entier de période. Ce type de codage de la fréquence pourrait bien être dominant en présence de sons relativement longs et surtout à des fréquences inférieures à 4-5 kHz (Rose et al, 1968; Moore, 1973). Au-dessus de 5 kHz, les neurones ne parviennent plus à suivre la cadence du son excitateur.

Figure 1 : Schéma de l’appareil auditif périphérique humain
Figure 1 : Schéma de l’appareil auditif périphérique humain
Figure 2 : L’organe de Corti.
Figure 2 : L’organe de Corti.

Image créée par Stephan Blatrix, extraite de "promenade autour de la cochlée" par R. Pujol et coll., INSERM et Université Montpellier 1.