1.2.3. Tests neurophysiologiques :

1.2.3.1. Stimuli et système de stimulation:

Les deux signaux extrêmes des continuums de stimuli utilisés lors des tests de perception catégorielle ont été utilisés : le contraste  /ba/-/pa/, en diminuant toutefois la durée de la voyelle afin de ne pas avoir un temps de passation trop long.

Les syllabes /ba/ et /pa/ contiennent la même voyelle et ne diffèrent que par la durée de leur consonne respective (délais de voisement respectifs de -55ms et 10ms). Chaque stimulus dure 230ms, avec comme dans le continuum utilisé dans le test de perception catégorielle le début de la voyelle à 140ms. La fréquence fondamentale de /a/ est stationnaire autour de 200 Hz et ses quatre formants (F1 à F4) varient quant à eux autour de 750, 1660, 2800 et 4400 Hz.

Les homologues non langagiers correspondants ont été obtenus par extraction de l’enveloppe du /ba/ de Cazals (/ba/ de référence et /ba/ correspondant à la frontière perceptive du sujet), multipliée par la somme des cinq sinusoïdes, correspondant à F0 et aux différents formants de la voyelle /a/ de /ba/ et /pa/, chacune pondérée selon la hauteur du formant par rapport à F0, et modulées par l’enveloppe temporelle des syllabes, (traitement inspiré par les travaux de Serniclaes et al 2001)

soit selon des sinusoïdes pures :

signal=A1*sin(2*Πt/F1)+A2*sin(2Πt/F2)+A3*sin(2Πt/F3)

soit avec l’addition d’une modulation de faible amplitude :

signal(one period)=[A1*sin(2Πt/F1)+A2*sin(2Πt/F2)+A3*sin(2Πt/F3)] *e(-t/0.05)

Ainsi la fréquence de chaque sinusoïde correspond aux fréquences respectives de F0, F1, F2, F3 et F4 de la voyelle /a/. Le stimulus est ensuite filtré passe-bas à 500 Hz par un filtre à correction de phase de Butterworth d’ordre 4 (car ce filtre possède un gain plat dans la bande passante avec une pente d’ordre 4 pour couper le plus rapidement possible). Le filtrage passe bas a été choisi par rapport à la fréquence de coupure du PEASP qui dans notre équipe a précédemment été observée à 500Hz (Akhoun et al, 2008).

Les homologues obtenus ne ressemblent perceptivement pas à la syllabe de départ (cela étant du en grande partie à l’appauvrissement spectral au-delà de 500 Hz). Les stimuli naturels et leurs homologues sont représentés sous forme temporelle et spectrale (fig 15 et 16).

Figure 15: Représentation temporelle des stimuli langagiers et homologues (ou « analogues »).
Figure 15: Représentation temporelle des stimuli langagiers et homologues (ou « analogues »).

En partant de la partie supérieure de la figure, les deux premiers stimuli correspondent au /ba/ et à son analogue, de durées similaires (230ms). Les deux stimuli suivants correspondent au /pa/ qui n’est autre que le dernier stimulus du continuum utilisé lors du test de perception catégorielle. Ces stimuli sont tous tirés du continuum langagier et non langagier du test de perception catégorielle avec une durée raccourcie par rapport à ceux-ci, au niveau de la voyelle.

Figure 16 a,b,c,d: Représentation fréquentielle des stimuli langagiers et non langagiers.
Figure 16 a,b,c,d: Représentation fréquentielle des stimuli langagiers et non langagiers.

a : stimulus /ba/ ; b : « homologue » du /ba/ ; c : stimulus /pa/ ; d : « homologue » du /pa/. Les fréquences sont représentées en abscisse, tandis qu’en ordonnée est représentée l’amplitude des pics obtenue au moyen de la Transformée de Fourier rapide (ou « Fast Fourier Transform, FFT »)

Comme nous pouvons le voir sur la figure 15, dix millisecondes de prémoyennage précédaient le début du phonème /ba/ contre cent quarante millisecondes dans le cas du phonème /pa/, ceci nous permettant de quantifier le bruit ambiant sur les traces recueillies, lors de ces 10 ms. Les stimuli utilisés étaient présentés à l’aide du logiciel Audacity®, (logiciel de traitement des sons disponible gratuitement sur internet), pour jouer les sons stockés en format *.wav. Les sons étaient joués par blocs de 1200, à une cadence de 6,6 stimuli par seconde. La stimulation était binaurale à un niveau de 45 dB SL (dB Sensation Level, au-dessus du seuil du sujet), niveau sonore confortable, voire fort, mais non gênant. L’intensité sonore était ajustée par un audiomètre AC-40 (Interacoustics®), qui relie la carte-son Soundblaster Audigy® aux transducteurs acoustiques : des inserts-earphones (Biologic®). Les inserts sont équivalents au casque acoustique dans la qualité de transmission du son au sujet, mais permettent une diminution de l’artéfact électromagnétique par rapport au casque. Les inserts sont blindés par une cage de Faraday reliée à la masse électrique du dispositif expérimental afin d’éliminer le risque d’artéfact électromagnétique ; le son étant diffusé au bout d’une paire de tubes de caoutchouc. Le transfert de la stimulation acoustique dans les tubes d’air long de 30 cm induit 1ms de délai, qui est ensuite retranché dans les enregistrements.