6.3. Discussion

Une étude précédente a montré une influence du niveau sonore sur les latences des composants du PEASP. Conformément aux résultats bien connus sur les clics-ABR, ces latences de l’OR et de la RSF diminuent lorsque le niveau sonore augmente. Parallèlement, la forme des PEASP varie très peu pour les intensités variant entre 10 et 50 dB SL, avec une forme assez peu définie alors que le PEASP est quasi-plat au niveau du seuil auditif, et il était très bien défini à 60 dB-SL, avec une OR bien marquée et une RSF très accentuée. De même, la fréquence de coupure du PEASP semble fixe aux alentours de 300 Hz. Cette précédente étude met en évidence une décroissance plus rapide de la latence de la RSF par rapport à celle de l’OR, avec -0.6 ms pour 10 dB supplémentaires, pour l’OR, contre -1.4 pour la RSF. Ces premiers résultats ont amené à supposer l’existence de deux générateurs cellulaires distincts dans le tronc cérébral pour l’OR et pour la RSF (Akhoun et al, 2008).

Dans cet article, la fréquence de coupure était de 500Hz, ce qui diffère des données obtenues par l’équipe de Kraus et al, dans lesquelles la fréquence de coupure des PEASP apparait avoisiner les 1000Hz. Une des explications avancées est la non utilisation d’inserts, ceci induisant une possible contamination par l’artéfact électromagnétique.

L’onset response est bien sensible à l’intensité de stimulation, (Junius & Dau, 2005 ; Akhoun et coll., 2008), les latences de l’onset response sont bien en accord avec un générateur au niveau du colliculus inférieur (Picton et al 1974, Wible et al 2004). Les latences de l’onset observées ainsi que celles de la RSF sont supérieures aux latences habituellement retrouvées dans la littérature (Russo et al 2004, Johnson et al 2005), expliqué en partie pas les stimuli différents (langue anglaise versus langue française) et des populations test différentes (adulte versus enfants). Toutefois la maturation du tronc cérébral est achevée dès l’âge de 3 ans avec toutefois des modifications concernant les PEASP tout au long de l’enfance. Des études animales retrouvent des variations dans les durées de la RSF entre différents stimuli synthétiques /ada/ varient entre 5 et 9 millisecondes (Cunningham et al 2002).

L’évolution non linéaire de la décroissance des latences de l’onset et de la RSF sous entend des générateurs distincts, toutefois, la RSF ne peut provenir d’une origine corticale étant donné la fréquence de coupure corticale qui avoisine les 80Hz (Eggermont, 2001). L’onset response serait le résultat direct de la réponse des cellules du colliculus inférieur en analogie avec les PEAP (Picton et al 1974). : supportant l’idée d’un traitement de la RSF dans le même noyau du tronc cérébral que l’onset, mais selon des patterns différents (Wible et al 2004, Purcell et al 2004, Smith et al 1975).

D’après Kraus et al 2005, la source (le what ou l’identité du locuteur) et le filtre (le where) seraient encodés dans le PEASP de manière distincte. La source, liée aux paramètres temporels, à la hauteur tonale, à l’identification du locuteur sont encodés dans la RSF. Le filtre, convoie les patterns spectraux du message, l’information formantique est encodé dans l’onset et l’offset, alors que la RSF et l’onset n’ont pas la même robustesse dans le bruit (Kraus & Nicol 2005 ; Johnson et al 2005). Supposant des mécanismes différents entre l’onset et la RSF.

Les études portant sur des stimuli français retrouvent une fréquence de coupure de la RSF inférieure à 500Hz.

Les neurones du colliculus inférieur collectent des axones provenant de différentes sources au niveau du tronc cérébral, incluant le noyau cochléaire, et le complexe olivaire supérieur, de même que les axones descendants du cortex et du thalamus (Oliver et Huerta 1992). Bien que les propriétés fonctionnelles de ses neurones aient été étudiées de manière extensive (Irvine 1992, Ehret 1997) la connaissance des mécanismes de traitement des stimuli complexes au niveau des colliculi reste encore incomplète. D’après Delgutte et al 1998, le système auditif serait composé d’un filtre passe bande suivi d’un modèle de compression afin d’extraire l’enveloppe de la réponse, suivi d’un second filtre modélisant la modulation de sensibilité des neurones. Ce modèle fait intervenir la fonction de modulation de transfert MTF, résultat de l’étude du gain sur la modulation fréquentielle, le gain étant défini comme la sensibilité des neurones à toute modulation. Cette MTF apparaît être similaire en différents points du système auditif, excepté au niveau du colliculus inférieur, qui apparaît être moins sensible aux hautes fréquences de modulation (au dessus de 100Hz, Joris et al 2004).