Le présent travail ayant pour thème l’implantation de l’abbaye de Cluny et les techniques hydrauliques trouve son origine dans la reprise des fouilles archéologiques à Cluny à partir de 1988. Le réaménagement du circuit de visite de l’abbaye de Cluny et les besoins de développement de l’École Nationale des Arts et Métiers ont créé plusieurs occasions d’analyse du sol et des élévations permettant une nouvelle étude du site, près de 40 ans après la dernière intervention de l’archéologue américain John-Kenneth Conant. Les projets d’aménagements ont très nettement favorisé les zones de l’avant-nef et du croisillon sud du transept de la grande abbatiale1. Mais, le dynamisme de la construction dans la ville a permis de multiples possibilités, soit de fouilles, soit de surveillances archéologiques, sur différents secteurs de l’enceinte de l’abbaye, de la ville ancienne, voire en dehors de celle-ci, apportant un lot substantiel de données2. Dernièrement, les travaux menés par Christian Sapin et Anne Baud contribuent dans le cadre de l’archéologie programmée à pérenniser les moyens d’une nouvelle perception du site de Cluny3.
Les résultats des travaux n’ont pas encore été publiés sinon dans quelques articles et comptes rendus4 . Une thèse de troisième cycle soutenue par Anne Baud en 19965, objet d’une publication en 20036, fait une synthèse des données sur la construction de la Grande Église.
Depuis 19887, les interventions sur le sous-sol et sur les élévations des constructions monastiques apportent des données qui complètent les connaissances sur l’origine et le développement du monastère. Les possibilités d’effectuer des fouilles en extension marquent une autre manière de percevoir le sous-sol qui s’oppose à la vision partielle par puits de l’archéologue américain Kenneth-John Conant. Les fouilles archéologiques récentes ont pu par ailleurs être accompagnées d’analyses géomorphologiques. Sur les questions liées à l’implantation du monastère, cet apport permet de bien mettre en évidence les relations entre bâti et composantes naturelles du lieu.
Cluny s’est avéré un site difficile d’approche. Les évolutions parallèles du bâti abbatial et de la ville ont eu comme résultante de masquer, ou tout du moins de voiler, les différents sites qui se sont succédés depuis la fondation de Guillaume d’Aquitaine.
Le lieu acquiert des dimensions impressionnantes. L’enceinte de l’abbaye enserre 13 hectares et une bonne partie était construite. Le monastère de Cluny est devenu finalement bien grand dans la petite vallée qui a été choisie par Bernon, son premier abbé. Dans bien des endroits, et en particulier au niveau de l’abbatiale, l’ampleur des constructions se trouve à l’échelle des formations géologiques et géomorphologiques.
L’importance numérique de la communauté monastique a par ailleurs nécessité des aménagements souterrains tout aussi monumentaux que les élévations qu’il est encore possible d’observer ou d’imaginer. Les fondations de l’église abbatiale sont en proportion des élévations. Les systèmes hydrauliques s’établissent à partir des besoins d’un cloître qui a pu compter jusqu’à 300 moines de chœur, voire, selon certaines hypothèses, 400. Si la dimension des bâtiments est là pour attester de la dimension de la communauté monastique, quant est-il cependant des chiffres avancés par les historiens ? Dans la mesure où le nombre de moines avoisinait 300 comme semblent notamment le signaler les procès verbaux de visite de l’abbaye8, il apparaît que le grand monastère était un espace étroit où la concentration et la promiscuité des hommes de Dieu nécessitaient, pour chaque moment de la vie monastique et quotidienne, des constructions et divers dispositifs, entre autres hydrauliques, très performants.
Au-delà de l’enceinte monastique, la mise en place de l’immunité clunisienne favorise la fixation d’une population d’artisans qui participent à leur manière à l’extension du site, par le développement du bourg monastique. Avec ses paramètres, Cluny reste un monument exceptionnel qui a dû mettre au point les possibilités de son fonctionnement comme véritable cité monastique.
L’approche archéologique des conditions d’implantation monastique et de l’hydraulique de l’abbaye de Cluny, et plus généralement des monastères clunisiens, n’est pas aisée. Contrairement aux abbayes cisterciennes qui sont généralement restées dans un environnement rural, les monastères clunisiens ont composé leur histoire avec celle des bourgs qui se sont constitués ou réorganisés autour de leurs enceintes. Puissance temporelle et spirituelle dans les Xe et XIe siècles, Cluny a participé directement au phénomène de cristallisation de l’habitat. Nous aurons l’occasion de revenir sur le rôle de l’abbaye bourguignonne dans la mise en place de la ville de Cluny. Bien sûr, chaque lieu est un cas particulier. Le développement urbain a pu s’élaborer dans le cadre d’une interaction entre plusieurs pôles comme par exemple à Marcigny9 ou à Nogent-le-Rotrou10. Les choses semblent apparemment plus simples pour des exemples comme Cluny, la Charité-sur-Loire et Sauxillanges où le monastère apparaît comme le point d’attraction principal.
Depuis leur fondation, les sites clunisiens ont souvent considérablement évolué. Les analyses du site d’implantation et du bâti monastique sont rendues difficiles par des modifications souvent radicales de la topographie. Le brouillage des informations est attaché à plusieurs causes découlant essentiellement du processus d’urbanisation autour puis au détriment des monastères. Les gros couvents clunisiens ont été enveloppés par une gangue urbaine. En s’édifiant autour de l’enceinte monastique, le tissu urbain a progressivement dissimulé les composantes naturelles d’un relief qui est apparu, après l’aménagement des moines, bien adapté à l’expérience bénédictine. Parallèlement, les religieux ont une propension à aménager leur lieu de vie au fur et à mesure de l’évolution des besoins de leur communauté. Finalement, en s’appropriant des lieux désolés par la Révolution, en les détruisant et en les adaptant aux nécessités de la nouvelle société laïque, les hommes du XIXe siècle ont contribué à masquer la manière dont les bâtiments ont pu être implantés. Après avoir vécu autour et au service du monastère, les bourgades entrevoient naturellement les anciennes enceintes comme des lieux à coloniser. Ainsi, le cloître de Cluny devient après 1801 le centre urbain d’une ville en plein essor.
Un premier bilan des interventions sur Cluny permet de remarquer que les moines ont profondément modifié le lieu d’implantation. Les décaissements s’accompagnent de remblaiements qui progressivement vont transformer le paysage environnant le monastère. Ces modifications du relief qui précèdent généralement les chantiers de construction sont associées à des aménagements hydrauliques divers comme le drainage des terrains.
À partir des observations de terrain, deux questions semblent se poser dès le début de l’analyse :
Chez les bénédictins, il ne semble pas possible de dissocier les conditions d’implantation du monastère et l’hydraulique attachée à celui-ci. S’implanter sur une montagne ou dans un fond de vallée suppose des conditions de vie différentes et des moyens appropriés pour faire face aux difficultés de s’approvisionner en eau ou d'évacuer les déchets. Dans le premier cas, des dispositifs de type citerne récupérant des eaux de pluies peuvent être mis en place. Dans le second, il est possible par gravité de jouir des eaux de sources ou de rivière. Il faudrait remarquer que la littérature spécialisée sur le thème de l’hydraulique monastique ne met pas clairement en avant la relation étroite qui existe entre le site et l’utilisation de l’hydraulique.
Pourtant, le chapitre 66 de la règle de saint Benoît précise que, si possible, le monastère doit être construit de façon à ce que tout le nécessaire, à savoir l’eau, le moulin, le jardin, soit à l’intérieur de celui-ci et que s’y exercent les différents métiers…11 L’abbé du Mont Cassin préconise de construire un monastère de manière à ce que les moines n’aient pas le besoin de sortir, et par cette préoccupation, met en place un rapport très étroit entre monastère et lieu d’implantation, cela en fonction des besoins les plus immédiats de la communauté. Ainsi, pour ne prendre que cet exemple, il apparaît peu vraisemblable de trouver un moulin hydraulique sur une montagne, mais, en revanche, il est possible d’établir le monastère près d’un site à moulin.
Cluny s’inscrit-il directement dans une éventuelle tradition bénédictine respectant les conseils de la règle pour l’implantation du monastère ? Dans l’affirmative, il est possible de se demander dans quelle mesure les clunisiens assurent la transmission du savoir jusqu’à l’avènement d’autres communautés monastiques comme les cisterciens. La réponse à ces questions passe par la mise en évidence de cette tradition pendant le haut Moyen Âge. Par la suite, il faudra savoir si, dans le cadre de ses exigences de réforme, Cluny est resté dans le respect de cette coutume ou s’il a développé sa propre conception.
La chronologie de l’hydraulique monastique a été abordée dans une des synthèses du colloque tenu à Royaumont en 199212. À partir d’une analyse des communications successives, Paul Benoit situe bien l’état de la recherche et les nombreuses limites qui empêchent pour l’instant d’établir l’histoire de l’hydraulique monastique sur l’ensemble du Moyen Âge.
Les sujets sur le plein Moyen Âge et les cisterciens sont le plus souvent abordés. Le rédacteur donne des explications à cette omniprésence. L’implantation rurale des monastères cisterciens a permis la conservation des aménagements dans le paysage. À cette facilité d’observation des témoins des constructions s’ajoutent de riches fonds documentaires et archivistiques. Cependant, les études sur les autres ordres permettent d’envisager qu’à partir du XIIe siècle, l’ensemble du monde monastique connaissait les techniques hydrauliques.
Les travaux sur le haut Moyen Âge sont particulièrement peu représentés. La période est difficile d’accès. Les sources textuelles ne sont pas nombreuses. Les découvertes archéologiques sont ténues, et elles ne concernent pas nécessairement les thématiques orientées autour de l’hydraulique monastique. Certaines découvertes permettent toutefois d’envisager que les moines, entre les VIe et Xe siècles, n’étaient pas ignorants des techniques utilisant l’eau.
Les âges noirs de la connaissance sur l’hydraulique monastique se situent entre les Xe et XIIe siècles. L’absence de communications sur cette période est très révélatrice de l’embarras des historiens à caractériser une société très mal connue. Et justement, les Xe et XIe siècles correspondent à l’aube et au rayonnement de Cluny.
Les écarts importants dans les études ne permettent pas d’avoir une vision correcte de l’histoire des techniques hydrauliques monastiques pendant le Moyen Âge. Il paraît en particulier bien difficile de définir le rôle des éminents hydrauliciens que sont les cisterciens si nous n’avons pas une connaissance suffisante dans ce domaine pour les périodes antérieures au XIIe siècle. Les cisterciens apparaissent encore actuellement comme des novateurs en matière de techniques hydrauliques. Mais, dans les faits, ne s’intègrent-ils pas plus simplement dans un courant général initié antérieurement dans les milieux bénédictins et clunisiens ? La nouvelle communauté n’aurait alors qu’adapté des techniques à la nécessité de son propre idéal de vie monastique.
Pour l’histoire de la période située entre le Xe et le XIIe siècle, Cluny et sa région sont des lieux privilégiés. Les travaux d’historiens, comme ceux de Georges Duby13 ou de Didier Mehu14, en témoignent. L’abbaye a su conserver, souvent réadapter de nombreux documents pour les besoins de son apologétique ou de réalités plus pragmatiques. 6 000 chartes provenant de différents cartulaires sont parvenues jusqu’à nous. Plus de 3 500 intéressent les deux premiers siècles du monastère ou des maisons associées à l’Ecclesia Cluniacensis. À cette manne d’informations qui nous renseigne sur l’acquisition et les modifications du temporel de Cluny, il faut ajouter d’autres sources. Il s’agit en premier lieu des coutumiers écrits sous les abbatiats d’Odilon et d’Hugues Ier. Le plus célèbre a été publié par Dom C. Hallinger. Le Liber Tramitis aeui Odilonis possède en effet une description du monastère de Cluny qui a été maintes fois rapportée et interprétée. Rédigées dans les années 1080, les coutumes de Bernard et d’Ulrich sont aussi riches de renseignements sur la liturgie et sur le quotidien du cloître. D’autres documents peuvent aussi apporter des éléments dans la compréhension des deux premiers siècles de Cluny. Il s’agit en particulier des vies des abbés.
Il ne faut pas négliger l’importance des documents plus récents, écrits ou iconographiques, dans l’étude des conditions d’implantation et des systèmes hydrauliques. En évitant le travers d’un raisonnement par récurrence trop théorique, il est possible par une analyse correcte des sources modernes d’obtenir des renseignements sur le site initial et sur les développements de dispositifs que l’on cherchera pour diverses raisons à conserver malgré les multiples développements de l’architecture du couvent.
Par ailleurs, nous avons vu que l’archéologie a apporté, ces vingt dernières années, de nombreuses informations sur le site de l’abbaye. Les recherches sur le sous-sol ont permis de retrouver des structures appartenant à ces siècles obscurs. Par ailleurs, la nouvelle approche de la stratification rend possible une relecture des données retrouvées par John-Kenneth Conant entre 1929 et 1950.
Les difficultés à comprendre les réalités de la mise en place d’une communauté sont liées aussi au développement même des constructions monastiques. Au cours du temps, les monastères ont été sans cesse transformés. Dans cette étude sur la longue durée, il ne faut pas négliger des périodes où l’architecture semble en apparence figée. Les fouilles du passage Galilée et de la Cour de la Congrégation à Cluny ont bien révélé l’importance des travaux de reconstruction de la période moderne15. Historiquement, cet âge est un moment d’importantes réflexions et de changements de mentalités. L’évolution de l’hygiène et du rapport à l’eau peut être à l’origine de modifications dans les installations hydrauliques. Un des éléments les plus significatifs de ces changements est la disparition du lavabo des moines dans le courant du XVIIe siècle.
L’activité de construction a généré de nouvelles topométries du terrain issues d’importants remblaiements ou de décaissements. Le cas de Cluny est en cela exemplaire. Le site choisi par l’abbé Bernon est très différent du paysage profondément humanisé que nous connaissons actuellement. Au cours de l’histoire, les rivières ont été détournées de leurs cours naturels. Elles ont été domptées. Les eaux ont été conduites vers les roues des moulins. Les remblaiements et l’édification de digues de protection ont entraîné la colonisation des lits des rivières.
La connaissance du lieu d’implantation du monastère ne passe donc plus par une lecture directe du relief tel qu’il nous apparaît. Elle peut s’établir à partir d’une réinterprétation de la topographie permise avec les données issues des analyses archéologiques et géomorphologiques.
Il apparaît difficile d’isoler l’hydraulique du monastère de celle de la ville. Il faut rester conscient que ce sont avant tout les besoins des religieux qui modèlent les réseaux. André Guillerme signale bien que l’enjeu de la mise en place de systèmes hydrauliques demeure les commodités de l’abbaye ou du château16. Les activités artisanales s’y trouvent induites dans une phase ultérieure à l’implantation de la trame hydraulique des villes. Plus que tout autre grand pouvoir foncier, les évêques et les abbés semblent avoir procédé à l’aménagement des cours d’eau17. L’artisanat vient s’implanter par la suite sur le réseau des biefs. Progressivement avec aussi l’assèchement des marais, la ville médiévale, baignée par de nombreux canaux, prend l’aspect d’une « petite Venise »18. D’une certaine manière, un bourg comme Cluny s’est modelé autour d’un réseau important de canaux comme les villes analysées par André Guillerme.
Gilles Rollier, Rapport de synthèse des fouilles en sauvetage programmé effectuées sur le narthex et la cour intérieure de l’abbaye, Cluny, 1988-1990. Gilles Rollier, Abbaye de Cluny, Extension des ateliers de l’E.N.S.AM., D.F.S. de fouilles de sauvetage, 1996. Anne BAUD, Gilles Rollier, Rapport des fouilles sur le Passage Galilée et la Cour de la Congrégation, Abbaye de Cluny, S.R.A.Bourgogne, 1992. Anne Baud, Le transept sud de l’abbaye de Cluny, D.F.S. de sauvetage programmé, 1994. Gilles Rollier, Abbaye de Cluny, Extension des ateliers de l’Ecole Nationale des Arts et Métiers, D.F.S. de fouilles de sauvetage, S.R.A.Bourgogne, 1996. Gilles Rollier, Abbaye de Cluny, Lavabo, S.R.A.Bourgogne, 1997.
Nadine Roiné, Cluny, Site de l’ancienne abbaye, Galerie ouest des Ecuries Saint-Hugues, diagnostic archéologique, S.R.A.Bourgogne, 1992. Nadine Roiné, Sondages au cellier de l’abbaye, rue municipale, S.R.A.Bourgogne. Gilles Rollier, Cluny-Rue Bénétin, DFS de sauvetage urgent, S.R.A.Bourgogne, 1994. Gilles Rollier, Cluny-Rue des Ravattes, D.F.S de sauvetage urgent, S.R.A bourgogne, 1994. Gilles Rollier, Cluny-Rue Porte-de-Paris, D.F.S de sauvetage urgent, S.R.A bourgogne, 1994. Gilles Rollier, Eglise Saint-Mayeul, opération de sauvetage urgent, S.R.A. Bourgogne, 1998. Anne Baud, Eglise Saint-Mayeul, Rapports de fouilles programmées, S.R.A. Bourgogne, 1999 et 2000. Emmanuel Laborier, Rue Saint-Odile, Surveillance de travaux, S.R.A.Bourgogne, 2001.
Fouilles engagées depuis 2006 à l’est du cloître, dans une galerie appelée « galerie rouge » construite au XVIIIe siècle à l’emplacement des parties orientales de la deuxième église abbatiale et de la salle du chapitre.
Anne BAUD, Gilles ROLLIER, « Abbaye de Cluny: campagne archéologique 1991-1992 », Bulletin Monumental , Tome 151-II, 1993, p.453 à 467. Gilles ROLLIER, « Existe-il une hydraulique monastique à Cluny? », Actes du colloque: Monachisme et technologie dans la société médiévale du Xè au XIIIè siècle, Cluny, 1993, p.407-421. Voir aussi, le numéro 1 des Cahiers du Musée d’Art et d’Archéologie de Cluny sur un premier bilan des fouilles réalisées à Cluny entre 1988 et 1996, Cluny, juillet 1996. Gilles Rollier, « Aménagements hydrauliques : le cas de Cluny », L’innovation technique au Moyen Âge, Actes du IVe congrès international d’archéologie médiévale, coll. Archéologie Aujourd’hui, éd. Errance, 1998, p. 67-70.
Anne Baud, Le chantier de la troisième église abbatiale de Cluny, Université Louis Lumière-Lyon II, 1996.
Anne Baud, Cluny. Un grand chantier médiéval au cœur de l’Europe, éd. Picard, 2003.
Première intervention sur le remblai de destruction établi sur la nef centrale de l’avant-nef et sur l’escalier occidental.
D’après Guy de Valous 1935. En 1250, on compte 200 moines à Cluny, en 1319, 260 religieux. En 1322, ils sont 290.
Le bourg de Marcigny a pu se développer à partir d’au moins trois pôles. La Loire a vraisemblablement participé activement au développement de l’agglomération. Un pont permettant de la traverser semble attesté dès le IXe siècle. Il s’agirait d’un pont de bois qui aurait été installé sur l’ancien lit de la rivière au nord-ouest de la ville actuelle. Avant 1698 où elle changea brusquement de cours, la Loire coulait en effet très près de la bourgade. Le pont aurait été protégé par une place-forte. Marcigny était apparemment un port important. Au moment de la donation de 1054, la villa disposait de deux églises dédiées respectivement à saint Pierre et saint Nizier. Le château était placé à l’angle sud-est du bourg et au sud du prieuré (ROBILLARD 1984). Cependant, en prenant en compte l’organisation générale du lieu, il semble que la position du bourg dans des limites qu’il ne quittera pas avant la fin de la période moderne est directement liée à la présence du monastère et de l’église Saint-Nicolas.
Nogent-le-Rotrou pourrait conserver un des plus anciens donjons de pierre, construit par Geoffroi III de Rotrou entre 1005 et 1028. En 1028-1029, Geoffroy fonde le monastère bénédictin de Saint-Denis au confluent de l’Huisne avec le Berthe. Celui-ci est donné à l’abbé de Cluny en 1050. Nogent possèderait aussi une église ancienne sous la titulature de saint Hilaire.
…pour que les moines ne soient pas forcés de se répandre à l'extérieur, ce qui ne convient nullement à leur âme. « Monasterium autem, si possit fieri, ita debet constitui ut omnia necessaria, id est aqua, molendinum, hortum vel arte diversas intra monasterium exerceantur, ut non sit necessitas monachis vangandi foris, quia omnino non expedit animabus eorum » De hostiarii monasterii.
Paul Benoit, 1996, p. 475-485.
Georges Duby, 1971-1988.
Didier Mehu 2001.
Anne Baud 1996 et 2003.
André GUILLERME, Les temps de l’eau, la cité, l’eau et les techniques, Collection. Milieux, éd. Champs Vallon, 1990.
Idem p. 73.
Idem p. 84.