Une grande partie de la documentation disponible donne des informations sur les écoulements situés dans la ville et l’abbaye. Ils sont divers types. Les sources textuelles ou iconographiques les plus nombreuses intéressent les systèmes de biefs et de canaux dérivés de la Grosne et du Médasson. Ce sont les éléments les plus visibles des systèmes hydrauliques installés dans la ville. Apportant plus facilement des inconvénients aux riverains ou aux utilisateurs, ils sont par ailleurs les objets de conflits qui ont laissé des traces dans l’histoire. Leurs premiers rôles sont de fournir l’eau aux moulins et de permettre la meilleure gestion de l’eau qui traverse des lieux à forte densité d’habitation. Les systèmes d’assainissement sont à séparer de ce premier groupe d’écoulements. Les égouts rassemblent les conduites dont la charge est constituée des eaux souillées de diverses manières par l’homme et des eaux de drainage. Dans cet ensemble à fonction bien définie, il faut distinguer deux types de conduites. Le premier est composé pour ses émissaires principaux du système dérivé des rivières. On le trouve essentiellement dans la ville de Cluny. Ainsi, par exemple, le Médasson dont le nom est très évocateur recueille les eaux sales provenant des latrines installées sur son cours1209 et celles d’un réseau de dalots. Le second type est composé de réseaux autonomes qui vont généralement prélever l’eau nécessaire au transport de la charge en amont et se jeter dans le dispositif de canaux en aval. Ces dispositifs desservent uniquement l’abbaye. Le dernier groupe de conduites est associé aux diverses adductions d’eau. Pour le Moyen Âge et la période moderne, les seules adductions sont celles qui conduisent au monastère. Située devant l’église Notre-Dame, la première fontaine urbaine connue est antérieure à 1772.
Les réseaux situés dans l’abbaye apparaissent appartenir à des dispositifs qui ont induit, simultanément ou en différé, la construction des canaux placés dans la ville de Cluny. Dans ce domaine comme dans d’autres, l’abbaye précède la ville. À ce niveau de la réflexion, il faut déjà remarquer que l’ensemble des systèmes hydrauliques permettant le bon fonctionnement du monastère est strictement implanté dans les limites de l’aire de pureté définie par le cardinal Pierre d’Albano en 1080.
Nous allons essayer à partir de données qui apparaissent principalement d’époque moderne pour l’essentiel de définir comment les moines ont pu utiliser l'eau au Moyen Âge. Malheureusement, nous resterons plutôt démunis dans les tentatives d’appréhension des systèmes hydrauliques du monastère du Xe siècle. Pour cette période, les sources textuelles sont très laconiques. Par ailleurs, l’ensemble des opérations archéologiques réalisées à Cluny offre pour l’instant très peu de renseignements sur les premiers monastères. Nous pouvons plus nous porter sur les hypothèses de Kenneth John Conant qui avaient permis la mise en place d’un premier plan monastique. Elles sont actuellement remises en cause. Il est évident qu’une bonne connaissance du premier siècle monastique de Cluny passe par l’ouverture de fouilles à l’emplacement du dernier cloître qu’ait connu l’abbaye.
Nous avons vu que Benoît Dumolin fait un parallèle direct entre l’existence de nombreuses latrines au-dessus de l’affluent de Grosne et son appellation. Le terme Médasson est une adaptation policée du mot Merdasson que l’on trouve aussi dans les textes. À l’instar des affirmations du médecin clunysois du XVIIIe siècle, les plans-terriers signalent bien l’existence de latrines au-dessus du ruisseau.