c. Les Quatre-Moulins

Les Quatre-Moulins sont l’appellation de la plus importante installation hydraulique connue sur Cluny. Le moulin était situé au pied de la digue du Grand-Étang près du flanc occidental de la vallée de la Grosne. Le bâtiment qui persiste encore pour la base de son élévation a été profondément modifié avec la mise en place d’une papeterie au XIXe siècle. Actuellement, il accueille avec les constructions du XIXe siècle un dépôt-vente de meubles.

À partir des informations données par la gravure de Louis Prévost, il apparaît que les moulins étaient mis en place dans une importante tour munie de trois, voire quatre niveaux. Le dernier étage dispose de merlons. Sur la gravure, l’ensemble constitué de la tour, de la digue massive du Grand-Étang et d’une porte située sur la chaussée permettant le contrôle de la route de Mâcon donne l’image d’une véritable fortification barrant la vallée de la Grosne (fig. 120). Cette fortification est placée à proximité, et directement à la vue de la limite méridionale du territoire du ban sacré de Cluny. Des documents plus anciens confirment en effet que le moulin état placé dans une tour. Deux visites de l’abbaye réalisées le 3 mai et le 4 avril 1320 signale la tour et la chaussée du Grand-Étang qui demande réparation pour cause de ruine. En 1319, il est mentionné la tour du moulin et la chaussée du grand étang1454. En 1320, le document portant l’engagement des réparations concerne la tour et la chaussée du Grand-Etang1455.

La vue de Cluny de la fin du XVIIe siècle laisse entrevoir une partie du dispositif hydraulique. On remarque en effet une roue hydraulique qui est placée le long du flanc ouest du bâtiment. Le bief qui mène l’eau dans la ville jusqu’aux roues du moulin abbatial prend son origine à partir de la roue. Les plans terriers permettent d’avoir une vision précise du secteur du moulin et de la digue au XVIIIe siècle. La situation apparaît différente de ce qui peut être distingué sur la gravure de Louis Prévost. Les deux représentations indiquent nettement que le bief ne longe pas le mur ouest du moulin mais il sort de celui-ci en ayant eu un parcours interne à la construction1456. Il apparaît plus précisément que le cours du canal se situait à l’ouest de l’emprise de l’installation hydraulique. En revanche, des documents et des plans tardifs présentent une situation du bief proche de celle qui est indiquée dans la gravure de la fin du XVIIe siècle. Le plan du cours de la Grosne daté de postérieurement à 1840 place de nouveau le bief coulant à l’ouest et à l’extérieur du bâtiment1457.

La dimension de la construction laisserait supposer qu’il existe plusieurs machines hydrauliques. L’appellation de Quatre-Moulins sous-entend a priori qu’il existe au moins quatre roues. Malheureusement les textes ne donnent que peu d’informations sur le type de dispositif. Un bail à ferme signé le 20 mars 1785 signale cependant qu’il y a quatre meules ce qui pourrait correspondre à deux tournants donc à deux roues hydrauliques1458. L’affectation du moulin semble aussi avoir été réservée à la farine1459.

L’eau arrivait au moulin au travers de la digue du Grand-Étang. Le canal d’amenée est représenté sur un plan des prairies qui est une copie de la Révolution d’un document plus ancien, daté de 15811460. Le canal est une dérivation de la rivière qui prend l’eau à l’ouest de la vallée juste avant que la Grosne ne contourne la digue pour aller se jeter à l’est dans le grand canal de dérivation. Malheureusement, sur le document, le bâtiment des Quatre-Moulins semble avoir été mal placé car le bief ne vient pas le rejoindre. Les baux à ferme des prairies situées au sud de la digue signalent des servitudes permettant aux personnes habilitées de venir en toute quiétude régler la vanne du bief et assurer d’éventuelles réparations1461. Il est relativement remarquable de constater que le moulin qui disposait vraisemblablement de plusieurs roues n’a pas besoin de la retenue d’eau de la digue pour fonctionner. Pourtant, il semble y avoir une relation étroite entre la digue et le moulin. En effet, si son rôle de protection contre les eaux est indéniable, il apparaîtrait logique que la chaussée ait permis de créer un bassin d’alimentation pour le moulin et, surtout, de relever le niveau de l’eau pour permettre une chute suffisante pour le fonctionnement les roues. Dans l’absolu, la suppression du Grand-Étang, qui nous l’avons vu a vraisemblablement été mis en eau, aurait rendu difficile les possibilités hydromécaniques du bief d’amenée. Mais, il n’en est rien. Le moulin a profité d’une chute d’eau suffisante pour tourner. En prenant la pente moyenne du lit du cours d’eau au droit de Cluny1462, la hauteur d’eau au niveau du moulin avoisinerait un mètre. Cela peut suffire pour un moulin à farine. En revanche, avec la mise en place de l’étang, la hauteur d’eau pouvait être très largement supérieure donnant des capacités très importantes au moulin. Est-il possible, à partir de là, d’envisager que le moulin ait produit autre chose que de la mouture au moment où le Grand-Étang était en eau ?

Notes
1454.

G.Charvin, T. II, p. 456. « et in turre molendinorum ac calceya magni stagni… »

1455.

G.Charvin, T. II, p. 461. « idem dominus Abbas in turre et calceia magni stagni, que periculosam minantur ruinam, promisit celerius quam poterit apponere remedium opportunum »

1456.

Les plans géométraux de la ville de Cluny et des environs avec les cartes de la rente noble dudit lieu et Le plan-terrier postérieur à 1768.

1457.

Cours de la Grosne. ACC C133 n° 3 (1)

1458.

AMC N1 n° 110

1459.

Admodiation des quatre Moulins, du moulin de Rochefort et du Grand Étang.en 1475 Benet-Bazin. Bail à ferme des quatre moulins de Rochefort passé au nom de l’abbé de Cluny au nommé Chastellain et … pour le terme de six ans commençant à la saint jean 1550 moyennant 460 panneaux de froment par an.1550 ADSL Cote H 23- 307

Bail à ferme des quatre moulins de Rochefort passé au nom de l’abbé de Cluny au nommé Chastellain et … pour le terme de six ans commençant à la saint jean 1550 moyennant 460 panneaux de froment par an.1550 ADSL Cote H 23- 307

Ferme des Quatre Moulins, du moulin de Rochefort et des prés des Isles et de la serve , six ans à la St-Jean 1568 460 panneaux de froment. idem en 1580 et 1585 (sept ans). En 1568, 1586,1592,1604,1610. ADSL Cote H 23- 311-312-313, 314, 315,316, 317. Requête de Claude Finaud à cause des Quatre Moulins à Rochefort pour avoir des meules 29.07.1550. ADSL Cote H 23- 308. L’appellation de meunier est précisée dans une requête pour une modération de ferme demandée suite à la maladie contagieuse de 1570. ADSL Cote H 23- 309

1460.

Plan géométrique de la portion de pré appartenant aux habitans de Cluny. Au dos : Section trois numéro quatre de l’inventaire de 1790. Plans des prairies échangées avec les batiments de l’abbaye. Datation du document 1790. AMC C132

1461.

Bail à ferme de 9 ans par l’abbé de Cluny a Claude Jaquet marchand demeurant au pont de l’Etang. Le 1er avril 1785. AMC DD5.6 : « 1° de supporter en cette année seulement la voiture et l’entrepôt de materiaux necessaires à la confection d’une vanne dans le glacis attenant aux deux parcelles de pré qui font l’objet du present bail et de souffrir pendant le courant du dit bail le passage a pied de celui ou de ceux qui seront tenus de lever et besser la vanne lorsque le cas le requerera à la charge que le passage aura lieu que sur la partie appellée la queue du granplans ».

1462.

5,33 mm par m