3.2.1. Le codage

Nous avons codé chaque occurrence sur la base d’une analyse des traits lexicaux (sémantisme spatial) et / ou fonctionnels (assignation d’un cas, appartenance à la structure argumentale du verbe) activés. Le recours à une telle distinction, certes simplificatrice, est destiné à faciliter le repérage d’usages spatiaux, et la stabilité des décisions prises d’un chercheur à l’autre (« inter coder reliability » que nous n’avons pas quantifiée, étant donné que la moitié du codage a été réalisée par un chercheur et vérifiée par l’autre, et inversement) montre qu’elle est opératoire.

Il n’existe actuellement pas de programme permettant de faire prendre à un ordinateur des décisions aussi complexes, parce qu’elles résultent non seulement du bon usage d’une catégorisation donnée, mais aussi et surtout d’analyses en contexte. Il faut donc classer chaque occurrence dans un tableau et procéder à un comptage manuel.

Les résultats montrent qu’il existe de grandes différences entre les usages recensés chez les enfants français et américains :

Figure 15 : Usages spatiaux (gris foncé) et fonctionnels (gris clair) des prépositions chez deux anglophones et trois francophones, jusqu’à trois ans.
Figure 15 : Usages spatiaux (gris foncé) et fonctionnels (gris clair) des prépositions chez deux anglophones et trois francophones, jusqu’à trois ans.

La vérification de l’hypothèse localiste chez des enfants anglophones (qui semble confirmée ici, chez William et Peter) est contredite par les résultats obtenus pour les enfants francophones : elle reflèterait donc une différence de structuration des langues, et non une primauté du spatial dans l’ontogenèse. Si les différences structurelles peuvent être repérées assez aisément, c’est cette dernière conclusion sur la primauté du spatial que l’on n’aurait pu atteindre à partir d’une catégorisation des types de préposition (spatiale ou non). En effet il est toujours possible que l’enfant utilise une préposition comme « à », généralement analysée comme « incolore » ou fonctionnelle dans un énoncé référant à une localisation spatiale du type : « il rentre à la maison ». On voit bien ici l’importance d’une analyse en contexte, où les ambiguïtés éventuelles peuvent aussi être levées grâce à la vidéo.