4. Conclusion

Au terme de ce parcours, nous avons semble-t-il observé plus de similitudes entre les locuteurs du français et de l’anglais que de différences véritablement marquées. Nous espérons cependant avoir fait ressortir certains traits saillants, qui montrent une prise en compte progressive des contraintes propres à la langue. Ainsi par exemple dans l’expression de la manière de mouvement, où l’on observe à la fois des similitudes répondant à des contraintes générales (recours au symbolisme sonore qui permet une économie de moyens) et des différences confirmant l’impact précoce de la saillance de la manière en anglais. De même, si les premiers satellites regroupent dans les deux langues des marqueurs bien repérés par les enfants pour l’expression de la localisation, statique ou dynamique, la spécificité des premiers satellites de la langue anglaise leur permet d’emblée d’exprimer différents types d’événements et explique qu’ils soient en proportion globalement supérieure chez les enfants anglophones.

Dans notre recherche des différences que pourraient induire des langues typologiquement différentes, et des correspondances ou divergences entre les premières productions de l’enfant et le discours qui lui est adressé, nous avons dû laisser de côté certaines tendances générales, au premier rang desquelles se trouve probablement la distinction entre référents animés et inanimés. Nous avons par exemple vu au chapitre I qu’il existait des différences dans la compréhension précoce du déplacement volontaire et du déplacement causé : le mouvement spontané, celui des êtres animés, serait compris comme orienté vers un but (Gelman 2002 : 80 ; voir aussi Woodward, 1998 ; Lakusta, 2005), alors que celui des inanimés serait nécessairement envisagé comme mouvement causé (Mandler 1992 : 278). Notre codage ne permet pas de prendre en compte ces différences, qui auraient certainement apporté un éclairage intéressant sur la conceptualisation de ces deux types d’événements.