2.4.1. Constructions transitives : alternance ?

Le second élément que l’analyse préliminaire des données nous invite à prendre en compte est l’alternance souvent repérée comme caractéristique des usages transitifs de verbes à particule, et déjà citée en (158) ci-dessus : pour la grande majorité des cas recensés dans nos données, deux constructions sont possibles (quoique pas toujours équivalentes) :

(161) a- Out came the sun, and dried up all the rain.

b- The sun dried the rain up.

(162) a- Wanna pull up your pants?

- Here, mommy will help you pull those pants up.

Les constructions adjacentes illustrées en (a) ressemblent en apparence davantage aux constructions plus transparentes parfois appelées « verbes prépositionnels » (Quirk et al, 1985), qui combinent un verbe et un syntagme prépositionnel :

(163) Did you just climb up the slide?

Elles sont aussi plus proches du scénario transitif canonique qui pose l’ordre Agent-Verbe- Patient comme fondamental (Hopper & Thompson 1980), et imposeraient donc moins de contraintes de traitement que les constructions illustrées en (b). Ces dernières impliquent en effet que la particule postposée soit gardée en mémoire pendant le traitement de l’objet. Les constructions adjacentes, enfin, sont plus prototypiques en ceci que ce sont celles que citent les locuteurs à qui l’on demande de combiner des éléments pour former un verbe à particule (Dehé 1999, Peters 2001). Et pourtant, des études portant sur l’acquisition des verbes à particule ont montré unanimement que les premières constructions acquises par les enfants étaient celles où la particule est postposée, soit les constructions traditionnellement analysées comme non canoniques ou dérivées66 (Hyams et al. 1993, Broihier et al., 1994, Diessel & Tomasello, 2005 ; Gries, S., sous presse). La dérivation est valable pour les locuteurs L2, qui mettent effectivement plus de temps à acquérir les constructions b- (Hyams et al. 1992 ; Berman, 2008), mais pas pour l’acquisition d’une langue maternelle. Se pourrait-il alors que la complexité telle qu’elle est perçue par le linguiste, comme par le locuteur L2, ne soit qu’apparente ?

Pour expliquer cet apparent paradoxe, il faut peut-être d’abord tenir compte des contraintes qui s’exercent sur chaque type de construction et contribuent à la production d’effets de sens différents. Peut-être ne s’agit-il pas, ou pas toujours, d’une alternance.

Notes
66.

Ils diffèrent en ceci des apprenants L2 (Hyams et al. 1993)