I-1.2.1.2. Précarité et conséquences sur la santé

De nombreuses recherches ont mis en évidence de manière récurrente les liens qui s’établissent entre insertions sociales et problématiques de santé (Leclerc, Fassin, Grandjean, Kaminski & Lang, 2000 ; Wilkinson & Marmot, 2003). De même, les inégalités de santé et leurs déterminants sociaux et le repérage des processus de vulnérabilisation liés aux situations de précarité ont fait l’objet de diverses recherches (Appay, 1997 ; Fieulaine, 2006 ; Joubert, Chauvin, Facy & Ringa, 2001 ; Lebas & Chauvin, 1998 ; Paugam, 2000). D’autres études encore ont souligné les liens entre situations de précarité et mauvais état de santé (Joubert & al., 2001). Plus précisément, les maladies infectieuses, les pratiques à risque, telles que la consommation de substances pouvant provoquer une addiction, et les troubles psychologiques, comme l’anxiété et la dépression, sont plus fréquents. L’état de santé perçu est également davantage dégradé. Les recours aux soins, qu’ils soient préventifs ou curatifs, sont moins importants. On observe également une plus forte morbidité, diagnostiquée ou déclarée, chez les populations en situation de précarité (Joubert & al., 2001 ; LaRosa, 1998 ; Lebas & Chauvin, 1998).

Ces constats incitent à souligner deux phénomènes centraux dans l’étude des liens précarité-santé. Des relations systématiques s’établissent entre insertions sociales précaires et état de santé. Ces nouvelles formes de pauvreté mettent en jeu « des processus de détermination sociale de la santé » (Fieulaine, 2006, p. 94). Par ailleurs, l’état de santé de cette population particulière apparaît comme représentant une concentration de problèmes observés en population générale, et non pas comme présentant des caractéristiques spécifiques (LaRosa, 1998). Ces constats indiquent donc que cette détermination sociale doit s’analyser en rapport avec l’émergence et le maintien d’inégalités de santé (Fieulaine, Ibid.). Ces inégalités de santé agissent, enfin, comme des multiplicateurs de l’inégalité sociale, puisqu’à la fragilisation économique et sociale s’ajoute la fragilisation de la santé, qui agit comme révélateur des processus de précarisation. Ainsi, la précarité entraîne des conséquences pour la santé physique et psychologique des individus qui y font face (Fieulaine, & al., 2006). Les pratiques à risque pour la santé, les plus faibles comportements de prévention et de recours aux soins, les signes d’une santé physique dégradée et les multiples troubles psychologiques sont autant de réalités épidémiologiques qui révèlent les effets d’une catégorie de situations et donc la catégorie elle-même (Fieulaine, 2006).

Enfin, il est nécessaire de considérer la question du chômage dans la réflexion sur les processus de précarisation et leurs effets sur la santé. Lancry (2007)souligne que « parmi les changements les plus traumatisants affectant tous les domaines de vie, il faut citer celui consécutif à la perte d’emploi » (p. 298). Le chômage pose d’une autre manière cette question des effets de la précarité sur la santé.