II-5.2. Un travail diachronique

Rendre compte de la variation d’un processus relatif à l’intervention a nécessité de recourir à une approche diachronique du phénomène en question. « Le fait d’insérer les situations et les phénomènes que l’on cherche à comprendre dans la dimension temporelle peut notablement enrichir la connaissance que nous en avons. Cette tendance à dépasser les aspects présents, le hic et nunc, et à s’interroger sur l’évolution passée et future des choses constitue ce qu’on appelle en sciences la perspective diachronique » (Montangero & Pons, 1995, p. 622). L’objectif de notre étude étant de rendre compte de l’évolution d’un processus fondé sur la réalité des situations organisationnelles, notre approche a également reposé sur le principe d’inférence descriptive et a supposé pour cela une relation interactive entre la description et l’analyse. Entre la description des phénomènes et l’analyse s’est intercalé l’effort d’interprétation permettant une meilleure compréhension du phénomène étudié. Nous avons donc développé une position d’observateur privilégié sur l’ensemble des processus étudiés.

Ainsi, nous considérons qu’un processus ne peut émerger que dans des espaces appropriés et dans des temps spécifiques. Et il est nécessaire de les investir pour les observer. Clot (1999a) écrit que : « le temps lui-même devient instrument d'enquête » (p. 136). La perspective diachronique a permis de faire progresser l’ensemble de la recherche, en dehors de la succession logique qui fonde traditionnellement les démarches de recherche. Notre cadre théorique, nos hypothèses ainsi que notre méthode de recherche se sont construits progressivement à partir d’allers et retours. Construire une recherche demande de faire des choix qui amènent toujours à des hésitations et des reformulations. Juan (1995) insiste sur l’idée que « si toute recherche vise à construire un objet, une problématique, des hypothèses et un protocole technique d’accès au terrain […] l’objet réel n’émerge qu’à l’issue d’un long processus » (p. 80). Cet objet se stabilise tardivement et s’accompagne du caractère « interminable et inépuisable de la logique de recherche » (Ibid.). L’approche diachronique consiste à privilégier « le voyage dans le temps » du regard sur l’objet et de « travailler transversalement avec des variables rétrospectives ou longitudinalement avec des dimensions d’accompagnement du phénomène étudié » (p. 86). Cette approche est donc particulièrement adaptée à l’étude des évolutions que nous voulons analyser.