II-5.2.2. L’observation de plusieurs terrains répartis dans le temps

Cette recherche s’est déroulée directement sur le terrain et s’est réalisée dans la durée, plus précisément sur une période de trois ans et demi. Au cours de notre recherche, nous étions également associée à une entreprise spécialisée sur l’intervention en matière de prévention des risques psychosociaux (RPS) au travail. Nous intervenions en tant que professionnelle dans le cadre d’interventions dans les organisations. Notre pratique nous a amenée à expérimenter différents processus d’intervention, de niveaux secondaire et primaire de la prévention. Dans le cadre de cette thèse, nous avons choisi de nous centrer uniquement sur les interventions de niveau primaire et celles qui portent sur l’élaboration et l’évaluation de dispositifs. L’étude de cas constitue notre démarche méthodologique et elle repose sur une approche diachronique. Notre analyse a porté sur l’étude de sept cas d’intervention.

Notre implication sur le terrain s’est faite très tôt, dès le commencement de notre thèse. La plupart du temps, les processus d’intervention se sont succédés, mais il arrivait que nous soyons amenée à intervenir dans deux, voire trois, organisations dans le même temps. Mais nous étions rarement concentrée sur un seul processus d’intervention. En effet, même si d’apparence ils peuvent se succéder, le début d’une intervention empiète généralement sur la précédente. La formalisation du cadre de l’intervention survient souvent alors que l’action est déjà avancée.

Cette partie, relative à notre démarche méthodologique, décrit les différentes interventions que nous avons effectuées dans un ordre chronologique. En revanche, dans l’analyse des cas d’intervention, nous regrouperons ces interventions selon leur orientation, centrée sur l’élaboration et l’accompagnement d’un dispositif, centrée sur la réalisation de diagnostic et la structuration de plan d’action, ou encore centrée sur l’évaluation de dispositif. L’ordre chronologique ne sera pas respecté. Toutefois, nous préserverons cet ordre à l’intérieur de la présentation des processus d’intervention afin de mettre en relief les effets de variations.

Le premier terrain d’intervention est une collectivité territoriale au sein de laquelle nous avons accompagné les acteurs dans l’élaboration, l’accompagnement et le suivi d’un dispositif. Cette intervention s’est étendue sur une période significative : de janvier 2006 à décembre 2007. La densité de ce processus d’intervention nous amènera à faire des choix quant à la description que nous en ferons. L’étude de ce cas d’intervention permet d’aborder comment un processus d’intervention peut évoluer dans un contexte organisationnel à grande échelle et les enjeux qui se posent dans l’intervention. Le second terrain est une Caisse d’Allocations Familiales. Bien qu’il ne s’agisse pas véritablement d’un processus d’intervention, dans la mesure où aucune convention n’a été formalisée entre cette structure et VTE, elle permet de mettre en relief un processus lié à la définition d’une intervention. L’intervention devait porter sur l’évaluation d’un dispositif. La direction n’étant pas prête pour initier une telle démarche, elle a abandonné l’idée, après avoir réfléchi et sollicité divers acteurs durant cinq mois. Cette tentative d’intervention peut éclairer sur les éléments qui font obstacle à l’engagement de l’organisation dans la mise en place d’une intervention. Le troisième terrain que nous avons investigué est un service issu de la collectivité territoriale. Alors que nous intervenions pour mettre en place le dispositif, un service connaissant une difficulté a conduit les acteurs à solliciter une intervention spécifique de VTE. Celle-ci, qui par ailleurs a duré quatre mois, a porté sur la réalisation d’un diagnostic et sur la réflexion autour des pistes d’amélioration en lien avec la direction du service. L’intérêt de cette intervention est de mettre en relief un processus axé sur un service spécifique appartenant à une organisation plus large. Cette double orientation, celle de l’organisation qui observe le processus d’intervention, et celle d’un collectif de travail en attente d’être entendu et de trouver une solution, implique de faire le lien entre l’organisation et le service pour conduire le processus. Nous sommes ensuite intervenue au sein d’une collectivité locale durant sept mois. Ce quatrième terrain nous a permis d’analyser un processus d’intervention centrée sur l’évaluation d’un dispositif. La collaboration qui existait entre cette organisation et VTE était déjà ancienne au moment de l’intervention. Elle a sans doute joué un rôle dans son processus de mise en œuvre. Le cinquième terrain est un établissement culturel semi-public. L’intervention qui a été instaurée dans cette organisation a porté sur la réalisation d’un diagnostic et d’un plan d’action. Notre intervention a duré 10 mois. Notre sixième terrain est celui d’une Mairie au sein de laquelle nous avons évalué un dispositif. L’évaluation s’est étendue sur période de six mois. VTE avait déjà accompagné cette organisation dans l’élaboration et l’accompagnement de ce dispositif. Enfin, notre septième terrain est un journal. Nous devions accompagner les acteurs dans la réalisation d’un diagnostic et d’un plan d’action. L’intervention a duré cinq mois.

Nous reprenons, sous la forme d’un tableau récapitulatif, l’ensemble des interventions que nous avons menées, en précisant pour chacune les objectifs de l’intervention, ceux de notre recherche ainsi que la durée de l’intervention42.

Tableau 2 : Tableau récapitulatif des interventions
Objectifs de l’intervention Objectifs de la recherche Durée de l’intervention

Une collectivité territoriale
(Terrain A)
Elaborer et accompagner la mise en place d’un dispositif de prévention et de traitement des situations de souffrance au travail Analyser un processus d’intervention centré sur l’élaboration, l’accompagnement et le suivi d’un dispositif
De janvier 2006 à décembre 2007
Une Caisse d’Allocations Familiales
(Terrain E)
Evaluer un dispositif de prévention et de traitement des violences internes Analyser un processus d’intervention centré sur l’évaluation de dispositifs organisationnels
De janvier à mai 2007
Un service issu d’une collectivité territoriale
(Terrain B)
Réaliser un diagnostic des situations vécues par les agents et envisager des pistes pour résoudre le problème Analyser un processus d’intervention centré sur la réalisation d’un diagnostic et l’accompagnement à la construction de pistes d’action
De mars à juin 2007

Une collectivité locale (Terrain F)
Evaluer la démarche « santé au travail » composée de trois dispositifs de prévention de l’alcool et des violences au travail Analyser un processus d’intervention centré sur l’évaluation de dispositifs organisationnels
De septembre 2007 à mars 2008

Un établissement culturel semi-public (Terrain C)

Réaliser un diagnostic et constituer un plan d’action
Analyser un processus d’intervention centré sur la réalisation d’un diagnostic et la structuration d’un plan d’action
De janvier à octobre 2008

Une Mairie
(Terrain G)
Evaluer un dispositif de prévention et de traitement des violences internes et structurer un plan d’action Analyser un processus d’intervention centré sur l’évaluation de dispositifs organisationnels
D’octobre 2008 à juin 2009

Un journal
(Terrain D)

Réaliser un diagnostic et constituer un plan d’action
Analyser un processus d’intervention centré sur la réalisation d’un diagnostic et la structuration d’un plan d’action
De mars à juillet 2009

Au-delà des aspects pratiques liés à l’observation de terrains et de l’approche progressive sur laquelle s’est fondée notre démarche recherche, la perspective diachronique est étroitement liée à l’étude du processus d’intervention et à l’émergence du changement.

Notes
42.

Un calendrier récapitulatif des interventions figure également en annexe.