II-5.2.3. Observer et analyser un processus d’intervention : la perspective diachronique

Nous nous intéressons au processus d’émergence du changement organisationnel et non aux antécédents ou conséquences des changements de formes organisationnelles (Van de Ven & Huber, 1995). Pour cela, nous proposons de décrire et d’analyser des processus d’intervention ayant pour finalité de faire émerger une décision de changement de l’organisation (ou d’éléments organisationnels, comme le dispositif). La description du processus d’intervention s’est faite à l’aide de la reconstitution de cas (story et narrative history). Celle-ci constitue l’élément central de cette méthode d’analyse des cas (Fraccaroli, 2002). Pour Van de Ven & Huber (Ibid.), la description du processus par la reconstitution consiste à « expliquer une séquence d’événements par les mécanismes générateurs sous-jacents ou par les lois qui sont à l’origine des événements et des circonstances ou contingences particulières qui existent au moment où ces mécanismes agissent » (p. VI). Fraccaroli (2002) définit ce processus comme « une progression ou une séquence d’événements ordonnés temporellement dans une entité organisationnelle donnée ». Le changement quant à lui, « est constitué par un événement organisationnel qui produit des différences s’exprimant dans la forme ou l’état d’une entité organisationnelle » (p. 141). Ainsi, le concept de séquence d’événements comme moyen permettant de rendre compte des processus de développement et de changement est central. Il place au premier plan le rôle du temps dans l’étude dynamique des organisations et la nécessité de recourir à une méthodologie longitudinale, « capable de saisir l’évolution des événements dans leur succession temporelle » (p. 142) et effectuée à l’aide d’études de cas.

Ainsi, si nous voulons rendre compte d’un processus en tant que phénomène progressif rythmé par des séquences d’événements, nous devons choisir les temps à observer qui témoignent de la manifestation de cette progression. Ces séquences ont porté sur les temps de travail, les temps de réunion et de présentation des éléments de l’intervention avec les acteurs de l’organisation. La grille d’analyse que nous présentons par la suite est une tentative de description de l’observation des séquences d’événements. Cette stratégie temporelle d’observation prend en compte que la signification de ces temps est organisée d’un point vue chronologique mais également d’un point de vue social et organisationnel. En effet, « les événements n’ont pas une signification « objective », invariable et détachée de leur contexte d’apparition » (Fraccaroli, 2002, p. 143). Ainsi, les événements observés, relatifs ici à des temps de collaboration et des éléments qu’elle permet de faire émerger, nécessitent d’être lus comme une partie du processus. Au-delà des événements, c’est la logique qui sous-tend la signification des événements qui importent le plus. Décrire un processus implique nécessairement un effort d’interprétation des logiques sous-jacentes. Ce sont ces significations qui donnent du lien aux événements qui structurent l’intervention comme un tout. Il s’agit alors de passer de « l’histoire d’un cas » à « l’étude d’un cas » (Ibid., p. 144). Ainsi, notre analyse s’est attachée à présenter les séquences d’événements dans leurs contextes d’apparition, chronologique, social et organisationnel et à tisser du lien entre ces différents événements successifs qui structurent le processus.