II-6.1.2.1. La réalisation de l’évaluation

La proposition réalisée par l’intervenant puis la convention déterminent la démarche méthodologique qui permettra de réaliser l’évaluation. Il peut s’agir d’un diagnostic ou de l’évaluation d’un dispositif. Le choix des instruments utilisés se fait à partir des objectifs de l’évaluation44 et du contexte organisationnel45. Ce choix est particulièrement négocié avant la signature de la convention car certains instruments comportent des « coûts » importants pour la direction. Le choix de réaliser des entretiens auprès de salariés, par le temps de travail qu’il induit, est plus coûteux. Néanmoins, la préférence de VTE et celle des directions est de privilégier les entretiens. Les deux structures se mettent d’accord sur un nombre d’heures permettant de recueillir et d’analyser des discours sur la souffrance au travail sans pour autant trop alourdir la facture. VTE privilégie les entretiens semi-directifs. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir recours à des techniques d’enquêtes par questionnaire mais ces occasions sont rares. Pour VTE, l’entretien permet une proximité avec le travailleur et offre un cadre pour s’exprimer avec plus de sincérité et d’écoute sur les situations de travail. L’entretien, en tant qu’échange, permet parfois de questionner d’autres dimensions qui ne sont pas préalablement définies dans un guide d’entretien ou dans un questionnaire. L’entretien ouvre des portes jusqu’ici invisibles. De plus, VTE a la particularité, contrairement peut-être à d’autres structures, d’intervenir en situation de crise dans l’organisation. Elle choisit, pour être au plus près des salariés et des vécus, l’entretien de recherche.

De plus, nous pensons que l’état de crise met les acteurs dans une difficulté, voire une incapacité à poser les problèmes avec des mots, mais les place plutôt dans une disposition à les agir. En quelque sorte, l’appel à un intervenant correspond à cette attitude de l’agir, en réaction à une autre manifestation ou acte. L’entretien impose un cadre pour que les « choses » soient dites. L’entretien va demander au sujet de mettre en lien sa situation professionnelle et sa santé psychique, par exemple. Il va pouvoir dire ce qui va et ce qui ne va pas dans le cadre de son travail en essayant de trouver des explications, et parfois des solutions. Une fois que des « choses » sont parlées, l’intervenant va pouvoir les reformuler, renvoyer au sujet le sens de son discours et le valider avec lui. Ensuite, il prendra le temps d’y réfléchir et de l’analyser. Ainsi, l’entretien impose une posture, non passive, mais active dans le fait de penser les problèmes.

Le choix de réaliser des entretiens va nous permettre de construire un guide d’entretien correspondant aux objectifs du diagnostic. Ces objectifs sont, en général, d’identifier les facteurs de souffrance au travail, de définir les situations de travail qui produisent de la souffrance et de déterminer également les facteurs de satisfaction afin de saisir l’ensemble des dynamiques qui traversent l’organisation. De plus, le choix de réaliser des entretiens implique nécessairement, excepté lorsque l’effectif est très réduit, de construire un échantillon représentatif du personnel. Cet échantillon, que seule VTE élabore, est construit à partir d’un ou de deux critères qu’il s’est avéré pertinent, dès les premiers échanges, d’interroger. Ces critères peuvent être l’âge, le sexe, l’ancienneté, le métier des salariés, etc. Les acteurs organisationnels, bien que l’on soit sur des entretiens, avec un petit échantillon par conséquent pour s’adapter au budget, ont souvent tendance à vouloir multiplier le nombre de critères. Ces acteurs, impliqués souvent fortement dans la démarche, ont cette volonté et l’espoir de comprendre, grâce à l’intervention, toutes les causes des souffrances et des maux qui se répandent dans l’organisation. L’intervenant doit donc être attentif à cette question. A défaut, il se verra reprocher le manque de représentativité des résultats de son diagnostic.

Ainsi, seul l’intervenant invite les personnes à participer aux entretiens. Pour les inviter, nous demandons au préalable à la direction des ressources humaines de l’organisation qu’elle nous transmette la liste complète du personnel. Puis, à partir des critères retenus, nous élaborons l’échantillon. Le choix des sujets est ensuite aléatoire. Et nous leur transmettons individuellement un courriel précisant l’objectif du diagnostic, les raisons de cette invitation et d’autres renseignements concernant la passation des entretiens. Les entretiens se réalisent au sein de l’organisation, dans des bureaux appropriés. Leur durée varie généralement d’une heure à une heure trente et sont de préférence enregistrés, avec l’accord des personnes. Après avoir mené les entretiens, ou diffusé les questionnaires, nous procédons à l’interprétation des résultats. Pour les entretiens, nous avons construit progressivement une grille d’analyse. Pour les questionnaires, l’interprétation s’est réalisée à l’aide du logiciel SPHINX. Après un temps d’analyse et de réflexion collective autour des résultats, nous travaillons sur un support de présentation des résultats en vue de les restituer aux acteurs, tout d’abord au groupe de travail, puis au comité de pilotage.

Notes
44.

Par exemple, que veut-on diagnostiquer ?

45.

Pour déterminer la taille de l’effectif notamment.