III-8.2.2. Apartés sur les échanges DRH-VTE

Des échanges informels entre VTE et la DRH rythmaient les temps de travail du groupe. Ces échanges portaient sur la précision des procédures relatives au dispositif, sur des conseils de VTE, à la demande de la DRH, sur d’autres chantiers de formation des managers et également sur l’analyse après-coup du déroulement des séances de travail. Nous nous arrêtons ici sur un des échanges informels particulièrement révélateurs de la relation qui s’établissait entre la DRH et l’intervenant tout au long du processus d’intervention et du fragile équilibre entre mandataire et expertise.

Suite à une séance de travail visant à affiner le dispositif, et suite à une évaluation faite par l’équipe de VTE de la démarche en cours, le directeur de VTE a souhaité prendre contact (par mail) avec le directeur des ressources humaines afin de formuler quelques remarques importantes avant l’organisation de la prochaine séance de travail. Sur un plan général, et au vu du diagnostic, nous pensions que le dispositif devait sans doute prendre en compte de manière plus claire au niveau 2 le besoin de confrontation et d’échange, même parfois vifs, sur les situations avec le management. Ensuite, sur le dispositif lui-même, nous souhaitions fortement réaffirmer qu’il ne lui semblait pas possible de construire sur la prévention et le traitement des souffrances au travail une démarche qui fonctionne avec un « mélange des genres » trop incompatible avec une analyse rigoureuse, « objective » et respectueuse des situations personnelles des agents. Très clairement, VTE ne pouvait imaginer sérieusement un traitement correct et professionnel des situations, qui respecte une déontologie d’intervention et qui mobilise tous les acteurs de manière indifférenciée. Un tel montage, non viable, conduirait très vite à des logiques d’évitement du dispositif et serait même sans doute perçu avec cynisme par certains agents.

VTE précisait que nous avions été quelque peu perplexes devant le changement d’ordre du jour lors de la dernière séance de travail qui ne nous avait pas véritablement permis d’accompagner le groupe dans une progression correcte à partir des situations69. Nous souhaitions rappeler que, pour nous, le niveau 2 devait être efficace et professionnel. L’un des syndicats, par la voix de son représentant, avait d’ailleurs compris ce point déterminant et en était d’accord. Nous faisions part de notre sentiment d’être, dans cette démarche, prêts d’une impasse. Nous précisions que l’équipe de VTE ne s’engageait donc pas en confiance tant il nous semblait que l’objectif, par lui-même déjà très difficile à atteindre, était « parasité » par d’autres enjeux. Ainsi, nous formulions, avec l’accord du DRH, que notre intention était de revenir clairement sur ce point en début de séance prochaine en refusant tout « affichage » incompatible avec un dispositif sûr, vers lequel les agents pourraient s’orienter en confiance. On note la prudence mise dans le courriel par VTE pour pointer quelques éléments essentiels : la présence des organisations syndicales ne devait pas être systématique et la nécessité de s’arrêter sur les craintes exprimées par les représentants syndicaux en assumant avec transparence ce débat. On parvient également à saisir de quelle manière la DRH s’est progressivement affirmée dans la démarche, jusqu’à souhaiter prendre la place de VTE dans l’animation et l’organisation des séances.

Après réception de cette demande, le directeur des ressources humaines nous répondait. Il prenait acte des remarques même s’il précisait qu’il n’avait pas forcément la même appréciation. Pour sa part, il trouvait le dispositif équilibré, notamment avec la constitution d’un groupe de préparation et de suivi composé uniquement de professionnels, et viable. Il disait entendre nos craintes et indiquait qu’il ne voyait pas d’inconvénient à ce que nous les exprimions lors de la prochaine séance, dans le cadre d’un devoir de conseil et d’alerte auprès du groupe de travail. Il précisait que l’administration donnerait également son point de vue en toute transparence. Et qu’après cela, il allait de soi que la collectivité prendrait ses responsabilités quant au dispositif final et en assumerait tant les réussites que les éventuels problèmes. Il indiquait enfin que, si toutefois nos craintes ou réserves allaient jusqu’à l’impossibilité déontologique de continuer à accompagner la collectivité, il faudrait dans ce cas rapidement se rencontrer pour en débattre, mais il espérait que cela ne serait pas le cas. D’ailleurs, VTE n’a pas souhaité cette rencontre mais a néanmoins tenu à clarifier ce point durant la séance suivante.

En attendant cette prochaine réunion, nous transmettions des éléments concernant la rédaction de la monture progressive du dispositif. Et d’autres échanges ont eu lieu entre VTE et les représentants de la DRH autour des éléments du diagnostic. Ces échanges ont permis progressivement de finaliser le diagnostic. La DRH souhaitait que le diagnostic précise davantage les résultats du questionnaire en tenant compte des catégories, du sexe et de l’ancienneté. L’exigence de la DRH, qui nous amenait très régulièrement à modifier notre diagnostic, a eu pour conséquence de retarder son envoi aux membres du CTP. Progressivement, les relations entre la DRH et VTE se tendaient. Le 21 juin, nous transmettions le diagnostic modifié à la demande de la DRH. Le 26 juin, le directeur général des services, après avoir pris connaissance du diagnostic, souhaitait que nous précisions encore les résultats concernant les corrélations avec la direction d’appartenance des agents. Cet élément ne figurant pas au départ dans les critères retenus, et pour des raisons déontologiques, nous ne souhaitions pas aller plus loin et stigmatiser certains services. Néanmoins, la DGS et la DRH souhaitaient que VTE donne plus d’éléments pour qu’elles puissent être en capacité de garantir au mieux une vigilance sur les directions en difficulté. Ces éléments n’allaient pas en revanche être discutés au sein du groupe de travail.

Parallèlement, à ces différentes actions, nous préparions les entretiens collectifs qui devaient marquer la fin du diagnostic. En lien explicite avec la question de la souffrance au travail, il s’agissait de mettre en débat les difficultés rencontrées par les encadrants au quotidien, afin de mieux comprendre ce qui se jouait dans la relation agent/encadrant. Cependant, malgré les efforts que nous avions investis lors de l’implantation de la démarche, en cherchant à impliquer l’encadrement, au total, seulement trois encadrants ont été présents lors des entretiens : deux pour le premier et un seul pour le second, alors que d’autres avaient répondu positivement mais ne s’étaient finalement pas déplacés.

Notes
69.

En effet, la DRH avait souhaité faire l’impasse sur la définition du périmètre d’intervention de la prévention des RPS.