La direction en question avait connu, à partir de l’année 2005, une importante réorganisation conduisant peu à peu à un réel malaise vécu par de nombreux agents que comptait cette direction. Cette situation de crise, qui évoluait depuis février 2006, avait conduit, dans un premier temps, la collectivité territoriale à faire appel à VTE dans l’objectif de réaliser un diagnostic de la situation dans la direction en question et de l’aider à construire éventuellement des pistes pour la résolution du problème. Nous avons alors transmis une première proposition d’intervention. Concernant cette première demande d’intervention, nous avons d’abord retenu comme objectif de réaliser un diagnostic en donnant des éléments de compréhension quant aux difficultés que vivaient les agents de cette direction. Nous envisagions de définir ce diagnostic en réunissant le collectif de travail, dont l’encadrement, afin de refléter le quotidien des situations de travail. Nous proposions d’associer à ce temps collectif d’autres entretiens semi-directifs afin d’approfondir les conséquences de ces difficultés au niveau individuel. Enfin, nous prévoyions de réunir à nouveau le collectif lors d’un entretien dans le but de leur restituer les éléments de la synthèse et d’en discuter éventuellement avec les agents. Toutefois, la collectivité n’a pas souhaité suivre cette proposition. L’attente que nous avions quant à la capacité de réunir le collectif autour de ce qui faisait problème semblait démesurée. Nous avons donc dû redéfinir la demande. Pour cela, nous devions rencontrer les acteurs en charge de cette direction.
Cette rencontre, organisée en décembre 2006, a réuni les encadrants et la directrice du service, afin d’analyser de manière plus approfondie la demande et construire une nouvelle intervention. L’intérêt était, d’une part, de recueillir leur point de vue sur les difficultés vécues dans le service, de comprendre les conséquences de ces difficultés sur le fonctionnement qu’ils devaient garantir et le rôle qu’ils pouvaient jouer dans la phase de résolution du problème. D’autre part, ce premier temps devait permettre d’adapter l’intervention à l’évolution de la situation puisque des procédures de traitement avaient déjà été engagées. L’autre intérêt de cette première rencontre, était d’appuyer ce groupe dans la construction d’un historique partagé de la situation du service. Le partage du sens, par la reformulation des événements qui ont traversés le service ainsi que des conséquences sur le collectif, a permis aux personnes d’exprimer des attentes communes et d’entrevoir ensemble des pistes pour l’intervention à venir82.
Ainsi, nous avons pu comprendre que différents événements avaient participé à produire des difficultés dans le service : le poste de la directrice, avant sa venue début 2006, n’avait pas été occupé pendant six mois. L’absence de directeur avait entraîné de nombreux dysfonctionnements portant sur la répartition du travail. Les principaux effets vécus par les agents avaient été la surcharge de travail et le sentiment de travailler dans un flou organisationnel. Avant cela, une réorganisation avait été menée en 2005 et une scission avait été faite entre les deux directions, scission qui avait eu pour conséquence de nombreux départs d’agents. Peu d’agents possédant une expérience du travail étaient restés, principalement des gestionnaires. Des recrutements externes et internes s’étaient avérés nécessaires. Ces nouvelles venues avaient été vécues de manière plutôt positive, comme un soulagement par rapport à la surcharge de travail qui pesait auparavant sur les agents du service. Bien que réellement attendues, ces nouvelles venues et nouvelles compétences n’avaient pas suffi pas à combler les exigences du travail et les retards accumulés. Un sentiment d’anxiété avait gagné les agents, désireux de faire un travail de qualité et considérant avoir les compétences pour l’accomplir, souffraient de ne pas parvenir à faire face. Un vécu de stress s’était exprimé peu à peu. De plus, les nouveaux arrivants, par manque d’expérience, de connaissance de la culture organisationnelle, de cadrage dans les décisions avaient cristallisé un certain nombre de reproches. Devant les retards accumulés, l’impossibilité d’anticiper la charge de travail, les agents ressentaient alors le besoin d’organiser les urgences conjointement avec la directrice. Un temps avait donc été proposé par la directrice pour imaginer, avec l’ensemble des agents de la direction, une nouvelle organisation du travail. Mais les décisions tardant toujours à arriver, notamment de la part du Vice-président (VP), avaient renforcé l’incapacité du collectif à anticiper le travail et la situation était devenue bloquée. C’est ainsi qu’en septembre 2006, le besoin d’ « avoir du concret », indispensable pour définir les missions de chacun et répartir le travail au mieux pour prévenir les urgences, le malaise s’était exprimé collectivement. Les agents avaient demandé à être aidés et à engager des actions visant à alléger leur charge de travail et à définir les missions. Les agents s’étaient réunis pour réaliser un document ensemble, réunion qui n’avait pas impliqué les encadrants. L’information avait été transmise aux organisations syndicales par un groupe d’agents. Suite à cela, le directeur général des services était intervenu au sein de la direction, accompagné du VP et de la direction générale. Un plan d’action avait été défini. Notre proposition d’intervention, reposant sur un diagnostic, parvenue le lendemain, n’avait pu convenir aux attentes des acteurs concernés, et n’avait pu être adaptée à ce nouveau contexte orienté vers les solutions et non plus vers un diagnostic de la situation. Les responsables souhaitaient au plus vite lancer le plan d’action, en introduisant ensuite une étape d’évaluation des moyens mis en œuvre. Enfin, concernant l’ambiance au travail, les responsables notaient « un léger mieux ». Les effets défavorables de cette nouvelle organisation sur l’activité des agents, le rapport au travail et le bien-être, ne semblaient pas avoir eu d’impact sur l’implication des agents qui gardaient espoir et la volonté de faire évoluer la situation. D’où le besoin exprimé par les encadrants de proposer une intervention adaptée à l’évolution de leur projet d’action et non vers la description des processus à l’œuvre dans ce malaise, ce qui n’était pas forcément du goût des agents. D’autre part, lors de cette première rencontre, les encadrants ont fait part des différentes actions en cours d’élaboration visant à traiter les problèmes. En effet, les agents de la direction avaient établi une liste considérable prenant en compte à la fois leurs difficultés et les moyens proposés pour les résoudre au mieux83. Le plan d’action final était projeté, dans sa mise en œuvre effective, pour mars 2007. A ce jour, les responsables disaient vouloir avancer.
Suite à cette réunion qui visait à construire un historique que pourrait partager l’ensemble des acteurs, nous avons rencontré la DRH qui a estimé que l’historique que nous avions dressé semblait retranscrire fidèlement la complexité de la situation dans laquelle évoluait depuis tant de mois le service. Nous lui avons ensuite suggéré différentes modalités d’intervention dont la réalisation d’un diagnostic afin d’entendre ce qu’avaient à dire les agents. Nous avons donc réalisé une nouvelle proposition d’intervention. Nous transmettions cette proposition au mois de février 2006. En mars, la direction du service nous indiquait que la proposition lui convenait ; la DRH nous donnait son accord ; et VTE transmettait une proposition tarifaire qui intégrait les différentes phases de l’évaluation. Nous pouvions alors commencer à construire l’intervention et à réunir les conditions de son implantation.
Nous avions élaboré une liste de questions à poser pour compléter notre compréhension du contexte, mais la réunion devait surtout favoriser l’expression des acteurs.
Cf. les annexes relatives au terrain B : Les actions en cours d’élaboration dans le service.