III-10.3.2. Évaluation

A la réalisation de l’évaluation du dispositif devait précéder deux actions : celle de la réalisation d’un bilan qualitatif du dispositif en collaboration avec un acteur de la DRH considéré par les autres, et non par lui-même, comme « l’animateur » du dispositif115 ; et celle du recensement des outils disponibles dans l’organisation avec lesquels pouvait être mis en lien le dispositif. La construction du bilan a nécessité du temps. La personne avec qui nous collaborions ne souhaitait pas que ces propos soient mal interprétés. Alors que nous devions nous rencontrer une seule fois, nous avons été amenée à la rencontrer à deux reprises et à modifier par deux fois également notre compte-rendu. Suite à notre dernière modification, nous avons finalement demandé à ce qu’elle modifie directement les éléments qui la gênaient. Mais, elle l’a ensuite validé, considérant que finalement, il était fidèle. Le dispositif n’était un sujet ni banal ni désinvolte. Ce bilan indiquait, premièrement, les modifications qui avaient été apportées au dispositif et les différentes évolutions qu’il avait connues. Il précisait, deuxièmement, la qualité de son fonctionnement, aux niveaux de l’écoute et du traitement, les limites d’action, les difficultés des acteurs à coopérer et les points à travailler à l’avenir116.

Le recensement devait permettre de connecter le dispositif avec l’existant et les possibilités d’action. Il a permis de mettre en évidence que la collectivité avait à sa disposition des moyens divers pour intervenir sur ce type de problème. La mobilité restait néanmoins la réponse la plus fréquemment envisagée pour traiter. Ce temps de travail a également souligné la complexité liée au traitement de conflits relationnels. Elle pouvait résulter des ressources disponibles et de la difficulté de les mobiliser ; de la nature de la problématique conflictuelle qui demandait à la direction en question de se positionner et de décider ; de la difficulté propre de l’organisation de la DRH qui pouvait manquer de clarté, créer une confusion dans la définition des rôles de chacun et alimenter un problème de coordination ; et de la multiplicité des procédures, du manque de clarté de la demande de l’agent ainsi que de la difficulté pour lui de s’orienter vers les procédures appropriées. Nous avons ainsi listé les différentes ressources disponibles dans l’organisation pour intervenir sur les situations de violences internes, autres que le dispositif.

Cette réunion a permis de nous renseigner sur l’attitude de la DRH à l’égard du dispositif et, plus généralement, de la question relative au traitement des violences dans le collectif de travail. D’après les acteurs de la DRH, les situations qui demandaient un traitement dépassaient manifestement les ressources disponibles actuellement. Favoriser les recours internes pour prévenir les conflits et violences entre collègues nécessitait d’optimiser les ressources disponibles et leurs liens pour les mobiliser plus efficacement. Il était également indispensable de renforcer les liens de coopération entre la DRH et les directions des services sur cette question. Ces acteurs ont longuement insisté sur la confusion des rôles qui rendait le traitement délicat et ardu. L’urgence de la demande et l’exigence d’un retour rapide pouvaient alimenter une gestion précipitée du problème et une répartition impromptue des rôles de chacun. Cette exigence de réactivité avait conduit chaque professionnel « à faire un peu de tout » pour être mobilisable rapidement. Ce fonctionnement n’allait finalement pas dans le sens d’une répartition claire de ce que chacun devait faire et de la limite des missions. Les acteurs avaient ainsi convenu qu’il était nécessaire de réfléchir à un process qui favorise une plus forte cohérence dans cette gestion. D’autre part, la recherche de l’amélioration continue de la gestion des ressources humaines conduisait ce service à expérimenter constamment de nouvelles procédures sans pouvoir trouver une stabilité dans un cadre défini durablement. En tant qu’intervenante extérieure, nous reconnaissions qu’il n’a pas été aisé de mettre clairement en lien les différentes réponses dont disposait la collectivité, non pas au niveau des outils concrets qu’elle pouvait mobiliser mais bien au niveau des instances qu’elle réunissait autour de la gestion des violences internes. Trois instances travaillaient parallèlement sur ces problématiques, dont l’une était le dispositif. De plus, nous pensions que les outils recensés, qui pouvaient s’avérer pertinents pour traiter n’étaient en revanche pas utilisés. Néanmoins, on ne saisissait pas nettement à quelles conditions ils devaient être mobilisés et pour quel type de situations. Cette difficulté liée à la clarté et à la cohérence des diverses ressources était, d’autre part, renforcée par la confusion qui existait entre l’action qui pouvait être faite par l’une des instances et celle du second niveau du dispositif, le niveau de traitement, qui s’inscrivait dans une tout autre temporalité. Les questions étaient pour nous de saisir les liens entre toutes ces instances et ressources et de comprendre laquelle était au cœur de la prévention des violences internes. Ces ressources semblait fonctionner à la fois en parallèle et ensemble sans jamais se rencontrer. Les principaux liens qui les réunissaient apparaissaient être les acteurs qui les faisaient fonctionner plutôt que les règles qui les définissaient. L’intervention mettait ainsi en relief des dysfonctionnements plus larges mais qui impactaient le fonctionnement et la lisibilité du dispositif.

Ensuite, nous avons associé le groupe de travail à la réflexion sur la réalisation de l’évaluation. En effet, plusieurs questions devaient trouver des réponses, notamment sur la manière de contacter des agents « concernés ».

Notes
115.

Il était par ailleurs psychologue clinicien au sein du service de santé au travail rattaché à la DRH.

116.

Cf. les annexes relatives au terrain G : Les bilans d’activité du dispositif.