IV-12.1.2. La pertinence du modèle d’intervention

La littérature sur l’intervention nous a donné de précieuses pistes pour élaborer notre modèle d’intervention. Par exemple, Brun & al. (2007) ont souligné les étapes « stratégiques et cruciales » favorables à l’intervention124 : la reconnaissance de l’existence de problématiques tout d’abord ; la préparation au changement ensuite ; l’identification des risques et des solutions ; l’analyse des risques et des solutions et l’identification de priorités et des ressources. Nous reconnaissons la pertinence de ces étapes, notamment la seconde qui vise dès le départ à préparer l’organisation au changement, bien que ces auteurs ne précisent pas comment ils y parviennent, et la dernière étape qui semble très largement sous-estimée dans les interventions. Cependant, nous concevons qu’il est trop simple de penser que la reconnaissance du problème est la première des étapes car dans la réalité qui a été la nôtre, c’était rarement le cas. Des enjeux entourent l’émergence d’une demande d’intervention et cette reconnaissance survient principalement au moment de la restitution des résultats de l’évaluation. D’ailleurs, les acteurs progressent différemment sur cette question de la reconnaissance des problématiques de souffrance au travail ou de stress. C’est une illusion que de penser que dès le début de l’intervention, l’organisation est déjà dans un processus de « désindividualisation » des difficultés vécues par les travailleurs. Nous ne pensons pas nécessaire que la reconnaissance d’une relation entre le travail et les conséquences sur l’individu et l’organisation soit un préalable à la mise en place d’interventions (Baril-Gingras & al., 2006). En revanche, elles doivent nécessairement favoriser son émergence car elle est une des conditions pour produire du changement, ce qui peut participer d’un exercice laborieux qui demande du temps et de la confrontation. Et en cela, nous pensons que la réussite des interventions est étroitement liée à cette reconnaissance (Ibid.). Par contre, le préalable est l’acceptation du questionnement de l’organisation à partir d’une définition partagée d’une intervention. Enfin, bien que le modèle de Brun & al. (2007) demeure pertinent, il est important de soulever que l’étape d’analyse et d’identification de priorités et de ressources ne prend pas en compte celle des limitations qui se posent à l’instauration d’actions de changement. Toutes les actions qui peuvent être considérées comme permettant un changement favorable pour la santé psychique au travail ne seront pas acceptées ni négociables avec la direction, qui en général, dira qu’elle ne souhaite pas revenir en arrière sur ces décisions concernant son organisation.

Notes
124.

Nous ne reprenons que les quatre premières étapes, du commencement de l’intervention jusqu’à l’identification de solutions.