[Annexes]

Entretien 1 Projet “ Guignol sur la route de la soie ”

Entretien L.U., le mardi 14 novembre 2006

Ecole primaire La S., D., classe de CM2.

Thème Patrimoine et création : “ Guignol sur la route de la soie ”

Virginie RUPPIN : 1a) Pour quelles raisons avez-vous choisi ce thème ?

L. U. : Alors le thème c’est la découverte du patrimoine Lyonnais, donc histoire de Lyon notamment celle des Canuts à travers principalement  la marionnette de Guignol. Et la raison… un attachement personnel et particulier à ce personnage de Guignol, qui je pense est quand même, c’est indispensable pour des enfants de cette région quand même de connaître cette marionnette là, et puis j’avais envie depuis très longtemps de monter un projet autour de la marionnette tout simplement avec des interventions artistiques autour de ce thème là, et puis ça me permet pédagogiquement énormément d’ouverture et de, différents projets sur la classe.

V.R. : 1b) Pourquoi plus un thème sur le patrimoine qu’un thème sur les arts visuels, l’architecture, la danse ou la musique ?

L.U. : Alors pour moi, donc comme je vous le disais Guignol c’est quand même aussi euh, c’est un Canut donc je trouve qu’au niveau de l’histoire de Lyon c’est quand même très important, j’ai… pourquoi… enfin bon ça va être forcément lié aussi à la musique parce qu’au théâtre de Guignol y’a de la musique, y’a des chansons, y’a aussi tout un travail qui va être lié avec la langue, il va y avoir beaucoup de chose autour du parlé lyonnais, du patois lyonnais. Voilà et puis bon, c’est vrai qu’après c’est peut-être aussi, enfin, c’est énorme quoi, donc il faut quand même cibler un petit peu les axes de travail, et puis surtout c’est une manière aussi pour moi de leur… qui connaissent un peu la région qui s’approprient l’histoire de Lyon pour pouvoir les présenter en fait autour d’un autre projet auquel l’école participe qui est un projet européen, donc c’est la deuxième année qu’on est sur ce projet qui s’appelle projet “ Coménius ” donc on est en échange avec cinq pays de l’union européenne et l’idée c’est partageons nos cultures, alors à la base c’était autour de la danse, maintenant on s’ouvre un peu à tout ce qui peut être, tout ce qui peut-être artistique quoi, c’est très varié et donc je me suis dit qu’à travers le spectacle de marionnettes on pouvait aussi présenter notre ville quoi.

V.R. : 2) Quels travaux pour les enfants sont-ils prévus, à l’heure actuelle, dans ce projet ?

L.U. : Là, concrètement on a rien commencé. Mais on va déjà, première étape ça va être la lecture d’un roman en classe qui s’appelle Claudine de Lyon, donc qui est l’histoire d’une jeune Canusse des pentes de la Croix-Rousse, donc qui vit, qui tisse, qui travaille dans les métiers à tisser avec son père, qui a une vie un peu rude, donc autour de tout ça. Donc ça leur présente aussi la ville de Lyon, les métiers à tisser, ce qu’était un Canut, donc avec beaucoup aussi de parlé Lyonnais, donc on va commencer à se constituer un petit listing de vocabulaire de patois Lyonnais. Deuxième étape ça va être probablement décembre je pense : assister à un spectacle, donc au théâtre de Guignol de Lyon à Saint Paul, donc au vrai théâtre de Guignol, donc spectacle qui est créé par une compagnie de théâtre, donc ce sont des spectacles qu’ils mettent en scène, pardon, des spectacles qu’ils produisent en mettant au centre de chaque histoire Guignol, en fait c’est la contrainte qu’ils ont par rapport à la ville, ce qui est logique. Donc Guignol est quand même au centre de chaque histoire, mais après l’histoire, c’est eux qui créent de toute pièce l’aventure de Guignol. Donc on va aller voir ce spectacle, sachant que cette compagnie nous autorisera après le spectacle, à passer derrière le castelet, donc ça va être intéressant pour les enfants de voir d’abord le spectacle d’une manière classique et puis après de pouvoir passer derrière dans les coulisses pour voir un petit peu comment ça se passe au niveau des manipulations, des décors, ils ont un immense mur de marionnettes qui est très sympa à voir. Enfin voilà, de voir un petit peu comment ils travaillent, comment travaille cette compagnie de théâtre, il y a un musicien qui est directement sur scène, qui écrit toutes les musiques, les chants, les chansons aussi ils écrivent les paroles etcetera. Donc ça ça sera la deuxième étape, puis la troisième étape, en parallèle, donc je pense, on va commencer en production d’écrit en classe, on va commencer à imaginer alors, d’abord, il va falloir qu’on commence aussi en histoire, à travailler sur l’histoire de Lyon, donc, notamment autour des histoires des Canuts, des pentes de la Croix-Rousse, des métiers à tisser, du travail de la soie, etcetera. Et ce que j’aimerai, c’est qu’on puisse aboutir autour de ces recherches historiques et puis de ces personnages de marionnettes créer leur propre histoire, avec leurs propres personnages, donc on essaye avec la classe d’imaginer un récit de toute pièce avec des personnages, donc on va travailler énormément sur le récit, qui est une compétence de toutes façons du cycle 3, donc comment on fabrique un récit, quel temps on utilise, comment on écrit un dialogue, comment etcetera. Donc ça c’est quand même un gros gros gros morceau qui va prendre je pense bien deux périodes quoi. Donc ça c’est vraiment l’intérêt pédagogique, et un petit peu plus tard, donc ce que je souhaiterai c’est travailler avec les intervenants de cette compagnie de théâtre, pour qu’ils viennent, qu’ils interviennent à l’école, qu’ils viennent passer quelques séances avec les élèves autour de la fabrication de marionnettes. Donc en fait l’idée, c’est qu’ils puissent fabriquer leur personnage, donc les personnages de leur histoire, les décors de leur histoire, qui, peut-être passent une séance ou deux sur la mise en voix de leur texte et faire un petit peu de manipulation avec eux. Voilà, en gros, c’est quand même assez important, puisque ça va couvrir pas mal de domaines, il va y avoir de la recherche sur internet, il va y avoir de la recherche documentaire sur l’histoire de Lyon etc. ça va être quand même important je pense.

V.R. : Il y a quelque chose de prévu en fin d’année ?

L.U. : En fin d’année, ou dès que ça sera prêt, il y aura un spectacle qui sera offert à leurs camarades de l’école, et puis probablement aux parents aussi. J’imagine qu’autour de ça, il y aura sûrement une exposition, des affiches qui auront faites sur l’histoire de Lyon, donc ça ça sera aussi dans l’idée de transmettre tout ça à nos collègues européens. Et puis, entre-temps aussi j’aimerai si c’est possible, de pouvoir les emmener au musée de la Soie, qu’ils se rendent compte un petit peu, qu’ils voient aussi tout ce qui était métier à tisser, les navettes, tout ça.

V.R. : Au niveau du castelet, ils vont le construire ?

L.U. : Alors j’en ai un petit peu parlé déjà avec les comédiens là. Alors soit on se lance vraiment dans une construction de castelet en carton, donc que j’essaye de récupérer au maximum des grandes planches de carton qu’on peut directement soit clouer ensemble pour faire un castelet, soit il y a la possibilité aussi de jouer sur des grandes tables, donc c’est un castelet mais où on voit le comédien derrière la marionnette, donc en mettant de grands draps noirs sur les tables et en animant les marionnettes. Donc je ne sais pas encore comment on va. Je ne sais pas, où alors simplement, alors c’est vrai que moi tout de suite je pensais : castelet, construction, les comédiens m’ont dit « mais tu sais c’est pas compliqué, on tend une grande ficelle dans une pièce, on met un drap noir, et puis ton castelet est fait quoi. Et c’est vrai que c’est des choses, eux, qui leur font tilt tout de suite, nous un peu moins, c’est pour ça que c’est intéressant de travailler avec eux, parce qu’ils ont l’habitude quoi. Donc voilà, ça reste aussi à définir aussi avec les élèves, leurs envies, ce que les comédiens de la compagnie en pensent, pour l’instant ça n’est pas arrêté.

V.R. : 3) Quelle place comptez-vous avoir dans ce projet ?

L.U. : Je dirai une place de médiateur, vraiment de créer du lien entre les élèves et puis ces comédiens, d’accompagnement aussi en fait, les orienter dans leurs recherches pour pas que ça parte dans tous les sens non plus. De cadre quoi tout simplement. Je ne veux pas faire à leur place, je ne veux pas non plus leur amener tout prêt, tout fait dans leur recherche. Moi je vais vraiment essayer de les orienter pour que les recherches soient les meilleures, mais c’est vrai que je n’ai pas envie de leur amener le travail tout fait. Moi ce qui m’intéresse aussi c’est la démarche de recherche, voilà. Une place complémentaire par rapport à l’équipe d’artistes de comédien, oui, je ne serai pas du tout en retrait à dire : « Vous prenez en charge mes élèves, je ne fais rien », pas du tout, je tiens absolument à m’investir et puis selon les questions budgétaires, je ne pourrai peut-être pas avoir énormément d’heures non plus d’intervention donc il faut absolument que j’y participe pour pouvoir donner une suite aux ateliers, éventuellement en prendre un en charge moi-même.

V.R. : 4a) Qu’attendez-vous de ce projet ? (attentes de l’enseignant)

L.U. : Il y a différents niveaux de mes attentes, il y a une attente je dirai plutôt personnelle, c’est que j’aimerai qu’on aboutisse vraiment à un truc grandiose où vraiment les enfants se sont fait plaisir, qu’ils aient créé de belles choses, ça c’est le côté un peu plus esthétique du projet, et puis le côté plaisir, j’aimerai vraiment que ça soit un projet où ils prennent plaisir, ensuite mes attentes en tant qu’enseignante et les attentes pédagogiques : c’est qu’ils aient quand même compris comment fonctionne un récit sous toutes ses coutures, que ce soit au niveau des substituts du nom, ou des temps qu’on utilise, des termes, de la chronologie d’un texte, ça c’est quand même pédagogiquement ce que j’attends de ce projet. Qu’ils soient aussi capable de mener des recherches à bien sur différents supports. Donc c’est vrai qu’on travaille pas mal avec internet aujourd’hui, on continuera quand même à travailler en bibliothèque, on ne va pas laisser tomber les livres. Donc ça ça serait plus mes attentes pédagogiques, et puis aussi dans la constitution d’une fiche d’exposé sur l’histoire de la ville etc.

Ce genre de projet, si on les met en place généralement c’est parce qu’on sait que c’est fédérateur dans une classe. Ils ont besoin de réaliser des choses ensemble alors c’est des enfants quand même qui se connaissent depuis très longtemps, parce qu’on est une petite école, donc ils ont très peu été séparés, dispatchés dans différentes classes, parce que généralement on a un CM1, un CM2. Du coup se sont des enfants qui, depuis la maternelle se connaissent quasiment. Donc il y a déjà quand même je dirai, il y a déjà un esprit classe qui existe. Ceci dit c’est toujours bon je pense de les faire travailler ensemble, de les faire créer des choses ensemble, enfin, ça permet de tolérer davantage celui qui a un peu plus de difficultés, ça permet de compter sur un qui est un peu meilleur pour que ça passe mieux, ça permet aussi selon les talents de chacun de dire bin j’ai plutôt envie de faire une marionnette, moi j’ai plutôt envie de faire du décors, moi j’ai plutôt envie de faire du texte. Donc je trouve que ça permet de répartir les tâches, peut-être équitablement et puis en fonction aussi de ses capacités, on est pas bon dans tous les domaines. Voilà, et puis créer une atmosphère euh… Bin je sais que ça va beaucoup les exciter, les exciter positivement c’est-à-dire de montrer après ce qu’ils ont été capable de faire, la rencontre avec de vrais comédiens aussi je sais que ça va être un moment important. J’ai pu faire dans d’autres projets, les années précédentes même si c’était en musique, ou dans d’autres domaines, des rencontres avec des musiciens professionnels par exemple, c’est des moments assez magiques avec les élèves parce qu’ils ont vraiment l’impression d’avoir des vrais gens en face d’eux, donc c’est assez génial. Voilà, et puis essayer de les mettre aussi à une place d’artiste à un moment quoi. En terme d’idées créatives et de réalisation, parce qu’il va falloir aussi qu’ils travaillent un peu leur voix, leur articulation, le jour où ils vont présenter leur spectacle, c’est important aussi de pouvoir dire. Et puis dans la créativité, puisqu’ils vont créer l’ensemble du projet de toutes pièces.

V.R. : 4b) Qu’attendez-vous de l’artiste, intervenant ?

L.U. : Bin déjà un accueil. C’est une compagnie de théâtre que je connais bien, donc un bon accueil dans leur castellet, que, j’en ai aucun doute mais que tout de suite ça donne envie aux enfants quoi, donc c’est vraiment ce que j’attends d’eux que immédiatement ils se disent : « ah bin c’est vraiment… ». Alors je sais qu’ils sont déjà motivés les élèves, parce que je leur en ai quand même parlé, simplement parlé, parce que pour l’instant je n’ai pas de support, et ils sont déjà très très motivés par ce projet. Alors au départ, je me disais : Oh là là le patrimoine lyonnais ça va les… enfin voilà, je m’étais dit je ne suis pas sûre que ça les intéresse bien et tout, et c’est que présenté sous cette forme là avec cette marionnette, et puis pareil, je me disais, ils sont en CM2, la marionnette, Guignol tout ça, ils ne vont pas trouver ça un peu « bébé ». Je ne savais pas trop comment ça allait être pris, et finalement ne serait-ce que d’en parler, je sens qu’il y a une bonne énergie qui se… ça les motive quoi. Et puis donc que les artistes sachent leur transmettre les choses. Alors je sais qu’ils ont l’habitude de travailler avec des classes donc je ne suis pas tellement inquiète, leur transmettre les choses simplement quoi.

V.R. : Lorsque vous parlez de transmission, c’est en termes d’idées ?

L.U. : Oui, oui, c’est-à-dire qu’ils essayent de se saisir de ce qu’ils ont pu comprendre, de comment on fabrique un spectacle de marionnettes de toutes pièces, c’est-à-dire de la conception du texte, en passant par la fabrication de la marionnette, puis sa manipulation, et puis son travail de voix etc. Donc vraiment toute la conception d’un spectacle de A jusqu’à Z quoi. Donc que les enfants essayent de s’approprier cette manière de travailler à leur échelle évidemment. Mais que la démarche soit la même en fait, et c’est vrai que j’en ai parlé avec la personne référente de la compagnie qui m’a dit que eux, ce qui les intéressaient c’était ça. En travaillant avec les classes, c’est que les élèves s’approprient la démarche de créativité du début à la fin, mais bien sûr avec les moyens d’enfants de 10 ans, mais vraiment on crée du texte, on crée des personnages, on crée des décors, on met en scène, c’est complexe, on leur amène pas quelque chose de tout fait quoi.

V.R. : 4c) Qu’attendez-vous des élèves ?

L.U. : Qu’ils soient sages et disciplinés. J’aimerai que tous y trouvent un moment où à un autre de quoi s’y investir quoi. Je sais qu’ils ne pourront pas tous accrocher à tout ce que l’on va faire, parce que c’est toujours difficile, mais qu’il y ait au moins un moment dans ce projet où chacun puisse y trouver, trouver chaussure à son pied j’ai envie de dire. Que chaque élève puisse en fonction de ses capacités et de ses moyens, de ses envies aussi pourquoi pas, mais puisse à un moment donner de lui-même pour la réalisation de ce projet je crois que ça sera déjà bien.

V.R. : 5) Que comptez-vous faire concrètement (en terme d’actions de l’enseignant) ?

L.U. : Pour la réalisation des marionnettes, du décors et du castellet, les enfants vont forcément être en groupe, parce que les artistes ne vont pas pouvoir travailler avec la classe complète. C’est vrai qu’il y aura des temps où j’aurai un petit groupe, une demi-classe, parce que c’est vrai que sur ce genre de projet, je ne vais pas travailler sur ce projet uniquement quand les artistes seront là. Il y aura tout des temps en classe aussi, donc peut-être en production d’écrit par exemple, quand ils vont commencer à élaborer le texte, peut-être que je demanderai l’intervention du répien de l’école qui est le maître supplémentaire, pour qu’il prenne juste une demie classe pour que je puisse moi passez vers chacun, voir un petit peu où ils en sont, enfin, je ne sais pas, là j’imagine, mais c’est vrai qu’on travaille pas mal comme ça aussi quoi. Pareil pour les recherches informatiques sur internet, ça va être sur des temps où la moitié de la classe, où un quart de la classe sera avec le répien en salle informatique pour faire des recherches, je vais tout rattacher en fait. Le projet est central, et je vais essayer de travailler le maximum de compétences générales autour de ce projet-là, par exemple autour du support B2i, on va profiter de cette occasion pour faire des recherches internet qu’il faut sur Lyon etc. et en même temps travailler les compétences du B2i.

Je pense qu’il y aura différents temps, si je me mets dans la perspective de la production du texte, j’imagine que peut-être ils travailleront par groupe, c’est-à-dire qu’entre eux déjà ils se mettront d’accord sur le début de l’histoire, on aura élaboré tous ensemble les personnages, la trame du texte, mais peut-être que je mettrai trois quatre enfants ensemble sur l’élaboration du début de l’histoire pour qu’ils se mettent d’accord entre eux. Peut-être qu’il y aura un autre groupe qui présentera le déroulement, enfin voilà qu’ils n’aient peut-être pas tout à écrire tous en même temps parce que cela n’a pas vraiment grand intérêt, donc j’aime bien les confronter aussi. Qu’ils se confrontent dans leurs écrits, et puis dans leurs pensées quoi. Après moi, je rebondis généralement sur ce qu’ils proposent. Je n’ai pas du tout d’idées préconçues sur ce qu’ils vont faire. J’attends de voir ce qui va sortir, sachant que la base, quand même, moi, ma seule exigence au niveau de l’écriture de ce texte, ça va être que ça se passe à Lyon et que ça raconte un peu l’histoire de Lyon, voilà, après, on verra comment les choses… Alors biensûr si ça sèche, si ça ne vient pas j’essayerai d’impulser des choses. Bien sincèrement, pour l’instant j’ai pas d’idée, je vais quand même attendre de voir ce qui ressort de… Mais c’est vrai qu’ils vont pouvoir s’inspirer et du roman qu’on a commencé à lire et du spectacle de Guignol qu’on va voir, moi j’ai aussi un dvd que j’avais acheté là-bas, donc on pourra à nouveau voir deux autres spectacles de Guignol en dvd, bon on va essayer de varier un petit peu les supports, et puis avec les recherches qu’ils vont faire autour de Lyon, de l’histoire de Lyon, peut-être que ça va raisonner qu’il va se passer des choses, je ne sais pas.

V.R. : 6) à la question suivante « Comment allez-vous vous y prendre ? » vous y avez répondu précédemment.

V.R. : 7) Quels effets comportementaux seraient en mesure d’être attendus ?

E.F. : C’est qu’ils arrivent à travailler ensemble, ça ça me semble l’objectif principal comportemental, c’est-à-dire qu’ils acceptent et les bétises de l’un, et les idées géniales de l’autre. J’aimerai qu’ils apprennent à débattre en fait, qu’ils s’écoutent, que finalement on peut peut-être trouver un compromis entre deux idées. Alors c’est vrai qu’à cet âge là, c’est vraiment très compliqué parce qu’ils sont encore très individuels, très individualistes, quand ils travaillent en groupe, dès fois ils me disent « Ah mais non, c’est pas moi, c’est l’autre qui l’a fait, moi c’est ça que j’ai écrit », « non, vous travaillez en groupe, c’est l’œuvre des deux, donc ça vraiment c’est quelque chose que j’attends vraiment de leur part. Sinon, qu’ils respectent le travail des comédiens, le matériel, enfin tout ce qui est de l’ordre des règles de vie en société très général quoi. Ça j’ai envie de dire qu’on les travaille tout le temps, ça n’est pas le fruit d’un projet de ce type là. Et l’écoute, ça c’est important. Quand on assiste à un spectacle d’art vivant comme ça, ce qui est indispensable c’est de savoir écouter et je pense que si ils apprennent à écouter, ils verront que c’est important quand on joue d’être écouté. Donc c’est vraiment passer des deux côtés : être spectateur et être aussi sur scène, mais ça dans notre école on travaille beaucoup depuis longtemps, donc je trouve quand même que nos élèves sont d’assez bon spectateurs, parce que souvent ils sont passés d’un côté et de l’autre et donc cette classe, l’année dernière, ils sont passés sur la scène du Toboggan pour chanter, dans un projet Mômes Ludies donc c’est vraiment des gamins qui sont initiés à être sur une scène, à avoir un vrai public… Et moi je trouve que ça a des effets, on en parle souvent au conseil des maîtres, ça a de vrais effets de travailler ça depuis petits avec eux, on arrive au CM2 avec des élèves qui ont vraiment de bonnes qualités de spectateur quoi. Donc ça, ça encourage encore.

V.R. : Quand vous parlez d’ « effets », pouvez-vous développer ?

L.U. : Moi je trouve qu’ils sont quand même, ne serai ce que par rapport à l’écoute globale, on va dire, il me semble quand même, ce sont des élèves qui savent faire la différence entre entendre et écouter. Naturellement ils savent faire la différence, en classe, ils sont capable de dire « je n’ai pas écouté, ou je n’ai pas entendu ». Ils font la nuance, ils essayent d’avoir au maximum une qualité de travail la plus silencieuse possible, parce qu’ils savent que cela peut être perturbant, donc ça c’est un peu les effets sur la classe. C’est pas magique non plus hein, parce que bon, ils ont dix ans, sur une classe ça va mais, voilà ça bouge aussi à cet âge là, ça discute, mais ceci dit, donc au niveau des effets de tous ce travail que l’on a depuis des années, moi je trouve qu’ils ont appris à écouter, ils ont appris à avoir un regard critique sur ce qu’ils voient et ça on insiste beaucoup là-dessus aussi, c’est-à-dire, c’est pas « j’aime ou j’aime pas point» ça ne suffit pas. Donc c’est j’aime pourquoi, j’aime pas pourquoi, ou alors, j’ai aimé ça ou je n’ai pas aimé ça mais on explique toujours en justifié quoi, et ça on le fait sans arrêt, sans arrêt, sans arrêt. Donc vraiment avoir un vrai œil critique sur les choses, que ce soit sur un livre, sur une affiche, sur un tableau, sur un spectacle, sur une musique, donc on a le droit de ne pas aimer mais on essaye d’expliquer pourquoi, ça aussi ça les aide de voir beaucoup de spectacles, d’assister à différentes représentations, de faire des projets communs, comme l’année dernière « Mômes Ludies », c’était avec plusieurs classes de différentes écoles, donc bin voilà, ils n’ont pas aimé tout ce que les autres ont fait, mais c’est normal, mais ils ont toujours été capable d’écouter déjà jusqu’au bout, c’est pas parce que ça n’était pas eux qui étaient sur scène qu’ils n’ont pas écouté leurs camarades et puis d’expliquer pourquoi ils n’ont pas trop aimé quoi. Ils savent justifier quoi.

V.R. : 8) Quels effets pédagogiques seraient en mesure d’être attendus ? (en terme d’apprentissage)

E.F. : Plus autour par exemple de savoir écrire un récit, savoir comment est fait un récit, comment on écrit un récit, comment on repère des personnages dans un texte, quel temps on utilise. Donc, beaucoup autour de la production d’écrit. Autour de la recherche documentaire historique, peut-être que l’on aura élaboré un questionnaire, peut-être à adresser à la compagnie de théâtre autour des différentes techniques de théâtre, donc élaborer un questionnaire ça fait aussi partie des compétences, peut-être qu’ils vont apprendre aussi à prendre des notes, si on va au musée de la soie, donc noter ce qui est important, essayer de faire le tri entre le détail et les lignes directrices d’un document, voilà, pédagogiquement… après bin, y’aurait tout ce qui relève de vraiment, de l’aspect artistique, mais je trouve que ce n’est pas essentiel pour moi quoi. Dire à savoir s’ils vont bien réussir à manipuler les matières qu’on va leur proposer, c’est vrai que c’est important, mais pour moi c’est pas franchement euh… moi je me dis : ils font ce qu’ils peuvent quoi ! Alors pour eux, ça va avoir une place hyper importante pour les enfants quoi. Le côté atelier de marionnettes, on fabrique des visages… Mais bon du coup ce que je vais attendre d’eux, par rapport à cet aspect là, c’est que leur personnage respecte le plus possible la description qu’ils en ont fait dans leur texte quoi, donc ils vont avoir des contraintes plastiques.

V.R. : Et au niveau musique ?

L.U. : Alors je ne sais pas trop comment on va faire autour de ça, pour l’instant, je ne sais pas si on va en mettre, je ne sais pas si on va… Alors c’est vrai que les « zonzons », la compagnie de théâtre

Dans tous leurs spectacles il y a de la musique, il y a des chansons, avec des textes en rapport avec l’histoire, je ne suis pas persuadée que l’on arrive à faire pareil nous, par contre ce qu’on va pouvoir peut-être imaginer un moment ou à un autre c’est de mettre le spectacle en musique. C’est-à-dire d’apporter, de choisir des musiques ensemble pour le début du spectacle, pour un moment où cela fera peur, peut-être que l’on va être amené à le mettre en musique, mais pour l’instant c’est point d’interrogation.

V.R. : 9) Quels sont les principes, d’après vous, que véhiculent ce projet ?

L.U. : Peut-être d’entraide, de collaboration, de tolérance aussi je pense, parce que il y a forcément des moments où l’on est confronté à un élève qui aura un peu des idées moins bonnes, où qui fera une marionnette un peu plus tordue que l’autre, enfin bon voilà, de respect aussi des adultes qui se déplacent pour eux, de respect du spectacle, enfin je verrai ça… c’est ce qui me vient là comme ça.

V.R. : 10) Quelles sont les valeurs, d’après vous, que véhiculent ce projet ?

L.U. : Qu’est-ce que j’ai dit en « principes » ?

V.R. : Entraide, collaboration, tolérance, respect.

L.U. : On est déjà un peu dans certaines valeurs, il me semble.

V.R. : Donc des valeurs civiques ?

L.U. : Oui, je verrai plutôt ça, et puis donner, enfin, je pense qu’il n’y aura pas de différences entre… enfin ils vont tous avoir leur part de travail, voilà, je pense que ça sera réparti de manière égale, éviter qu’il y ait de grosses différences dans ce projet, justement, c’est quand même un projet qui permet que chacun trouve ça place à un moment ou à un autre, pour éviter les clivages qui peuvent exister dans une classe, enfin classiquement autour des maths et du français quoi. Donc j’aimerai qu’on dépasse ça. C’est-à-dire que quand on va être en séquence de géométrie enfin je prends l’exemple parce que c’était le cas tout à l’heure, dans une classe on sait qu’il y a toujours les mêmes deux ou trois élèves qui vont être en échec par rapport à telle activité, et on sait que c’est tel et tel élèves vont réussir brillamment, voilà. Donc moi ce que j’aimerai avec ce genre de projet c’est sortir de ça. Qu’il n’y ait plus ces clivages là, que chacun ait sa place à un moment ou à un autre, son importance quoi. Et soit mis en valeur par rapport au groupe quoi.

V.R. : 11a) La constitution (formulation...) d’un dossier de demande de PAC nécessite t’elle la consultation des instructions officielles ?

L.U. : Oui moi je les ai regardées, j’ai été obligée quand même de me remettre… j’ai voulu en fait réutiliser un peu les termes, même si mes idées c’étaient les mêmes, mais je ne les formulaient pas à la manière de, voilà. Donc ça faudra pas le répéter : c’est vrai qu’on a une inspectrice un peu comme ça, qui est très à cheval sur les instructions officielles et tout donc je me suis dit que voilà, pour augmenter mes chances…, voilà.

V.R. : 11b) Est-ce que vous avez utilisé les instructions officielles pour donner un contenu pédagogique au dossier du projet ?

Donc oui.

Et comment vous êtes-vous emparé de ces I.O. ? (comment les avez-vous mobilisées ?)

L.U. : Alors bon, déjà à la base, j’avais déjà en tête les objectifs pédagogiques que je voulais suivre, alors formulés à ma manière, rédigés à ma sauce, mais je savais déjà dans quel domaine je voulais travailler et ce que je voulais atteindre comme objectif, donc ça déjà c’était clair, donc il a fallu que je reprenne mon petit livre, ma bible, et que je regarde au niveau des I.O. dans quel domaine c’était répertorié et sous quelle formule…

V.R. : 12) Quelle distance (écart) existe-il, selon vous, entre la trace écrite du dossier de validation et la mise en place concrète sur le terrain ?

L.U. : C’est quand même énorme, je trouve, parce que justement dans le dossier, alors à moins que je me trompe mais il me semble quand même que dans le, on est vraiment, quand on constitue un dossier comme ça, on est vraiment aux prémices de l’élaboration du projet quoi, donc on a des idées quand même assez floues de ce qu’on veut faire concrètement je parle toujours, moi c’est vrai que depuis que je sais que j’ai mis quelques sous pour ce projet, les choses, elles mûrissent, je vois quand même de plus en plus clairement là où je veux aller, quelles activités je veux mener etc. C’est vrai, quand on constitue le dossier bin faut bien être honnête, c’est un peu encore…, on a quelques idées et puis on ose pas, enfin moi c’est vrai que je n’ai pas trop osé dans ce dossier mettre des choses trop trop concrètes non plus, je ne voulais pas qu’on pense que c’est un projet où je ne voulais que les emmener au théâtre, que leur faire faire des marionnettes, je voulais que ça ait un aspect un peu plus pédagogique que ça ne soit pas vu comme un truc occupationnel quoi, parce que ça n’est pas de l’occupationnel que je fais avec mes élèves. Donc je ne sais pas ce dossier je trouve qu’il est un peu… je ne sais pas, soit il est trop tôt, soit… ça ma vraiment contrariée « Les indicateurs d’évaluation » parce que… alors c’est vrai ça a été : réussir à écrire un récit correctement pour pouvoir le mettre en scène mais c’est vrai que quand on est dans un projet comme ça, on ne pense pas forcément à se dire bon il va falloir à un moment ou à un autre évaluer, voilà, donc ça m’a un peu contrariée, mais je l’ai quand même fait. Je trouve que c’est tôt en fait, on est pas assez dedans pour pouvoir vraiment imaginer ce que l’on va en tirer. Et c’est le fait d’avoir eu l’enveloppe budgétaire que j’ai commencé à mûrir les choses, même si j’ai toujours eu parce que c’est un projet qui me tient à cœur depuis quelques années. Mais c’est vrai que temps qu’on ne sait pas si on va pouvoir mettre en place des choses ou pas, et bien que j’ai été déçue parce que je n’ai pas eu ce que je souhaitai comme financement donc je vais quand même être obligée de réduire certaines choses, donc c’est hyper frustrant quand même. C’est vrai que me lancer dans un projet comme ça, j’ai envie que ça soit énorme, et je sais que je vais être obligée de réduire les interventions, de réduire ci, de réduire là, de grapiller à droite à gauche pour pouvoir… C’est peut-être hors-sujet mais je trouve qu’on nous donne un peu de moyen, mais pas la totalité des moyens dont on aurait besoin pour vraiment faire un truc, un vrai projet, un vrai spectacle, avec vraiment tous les moyens. A la limite faudrait qu’on nous autorise à pas compter nos dépenses pour que ce soit… mais c’est quand même purement administratif pour moi.

V.R. : Donc l’entretien est fini. J’aurai juste à revenir sur la démarche adoptée dans ce projet, je vais tenter de reformuler vos propos.

Il y aura un regard de l’artiste avant que l’enfant aura finalisé sa production, donc l’enfant, si j’ai bien compris, va avoir une démarche d’imitation au départ, de la démarche de l’artiste, il va soumettre ses idées pour savoir si vraiment c’est réalisable ou pas.

L.U. : Oui c’est ça.

V.R. : Alors vous dans ce projet, vous acceptez toutes les idées des enfants, ce sera plutôt l’artiste qui verra concrètement si s’est faisable ou pas.

L.U. : Voilà, moi ce qui m’intéressera dans un premier temps c’est que ça soit écrit correctement, qu’ils aient respecté que leurs personnages soient toujours les mêmes tout au long de l’histoire, qu’il y ait une cohérence dans le texte. Moi je n’ai pas le regard artistique là-dessus quoi, eux ils vont plus facilement se rendre compte si ça sera réalisable ou pas, peut-être qu’ils vont dire « tel passage il vaudrait mieux l’enlever ça va être trop long » voilà.

(fin de l’entretien)