IV Les entreprises du groupe G4 (artisans transporteurs et la société SONITRAV)

En général, ce sont des entreprises artisanales créées avant la libéralisation du secteur. Au début, l’activité est plus rentable comme le souligne Mr Abdou Mayaki né en 1957 dans la région de Dosso : « J’étais enseignant dans une école primaire à Tessa, un village de Dosso. J’avais tout laissé en 1981 pour venir dans la capitale Niamey et je m’étais reconverti en transporteur. A l’époque, le transport était plus rentable que l’enseignement. Je commençais par le transport urbain. En 1993, je m’étais orienté dans l’interurbain, j’avais 5 bus. J’avais autofinancé mon premier bus et au fur et à mesure de la rentabilité de l’activité, j’avais pu acquérir les quatre autres. Je desservais plusieurs lignes en fonction des périodes et du flux des voyageurs. Aujourd’hui je n’ai plus que deux bus qui desservent les lignes Niamey-Tillabéry et Niamey Dosso. Je travaille avec un apprenti et pour l’autre véhicule, j’ai recruté un conducteur et un autre apprenti. Ce sont tous des parents ».

Beaucoup d’entre eux par contre, sont sans aucun niveau d’étude et ont débuté comme apprenti chauffeur. C’est le cas de Boubacar Alfari âgé de 38 ans et né à Ouallam dans la région de Tillabéry. Auparavant agriculteur, il venait à Niamey pendant la saison sèche et travaillait comme apprenti dans les gares publiques. Grâce au circuit familial, il a pu acheter un bus avec lequel dessert actuellement la ligne Niamey-Maradi.

Certains, comme Abdoulaye Tahirou Diallo, étaient mécaniciens au départ. Ce dernier né à Niamey en 1964 exploite aujourd’hui 3 bus. Il n’a pas de ligne prédéfinie, tout dépend du niveau de tour de rôle : « On arrive et on s’inscrit là où il y a moins de bus en attente de leur tour ».

D’autres plus jeunes étaient des commerçants comme Abdou Himadou né en 1981. Ce dernier a pu bénéficier de l’aide d’un parent pour avoir son bus. Il fait la liaison Niamey-Dosso-Gaya. Pour lui, cette activité est une obligation  : « Ce n’est pas une passion pour moi, c’est juste pour éviter le chômage. Je n’ai pas d’autres alternatives ».

Enfin on trouve des transporteurs nigériens revenus d’un pays de la sous-région. Ainsi Noma Siddo, 48 ans, a quitté la Côte d’Ivoire où il a tout perdu à cause de la guerre. Depuis 2004, il assure les liaisons Niamey-Dosso-Doutchi et Niamey-Dosso-Gaya.

Tous ces artisans transporteurs conduisent eux-mêmes leurs bus et travaillent généralement avec un apprenti. Chez les transporteurs disposant de 2 à 3 autobus, il n’existe pas, semble-t-il, de rapport hiérarchique avec les autres conducteurs employés. Ces derniers sont dans la majorité des cas des parents (surtout des frères), auxquels il est demandé seulement un pourcentage des recettes. Le véhicule est en quelque sorte mis en location à un proche de la famille mais là aussi, tout dépend de la marge réalisée. Comme ils ont tendance à le dire : « le véhicule est trop vieux pour être revendu mais pas assez pour être mis en rébus alors autant le confier à un proche dans l’espoir qu’il le dépanne ».

Ces entreprises artisanales exercent leurs activités à partir des lignes organisées par le syndicat qui nomme les chefs de lignes, eux même transporteurs. Pour ces entreprises, le tour de rôle apparait comme « une bouée de sauvetage » et comme le déclare Boubacar Alfari : « Sans le tour de rôle, ce serait une anarchie, ceux qui ont des bus neufs seront plus convoités » .

Dans le même sens, Ali Oumarou, né en 1942 à Kabé (région de Dosso) estime que : « sans le tour de rôle, les vieux véhicules n’auront pas de clients et ça va créer plus de désordre car personne n’aimerait être au chômage. Avec le tour de rôle, chaque transporteur arrivera (le temps qu’il faudra) à prendre des passagers et sans la moindre concurrence».

Si pour eux le tour de rôle présente des avantages, il comporte aussi des contraintes qu’il impose aux transporteurs, lesquels mentionnent en particulier une très longue attente dans la gare publique et aussi la prolifération des transporteurs clandestins.

Désarmés face à cette situation, ils attendent beaucoup de l’Etat, le seul acteur en mesure d’améliorer leur situation.

La société SONITRAV appartient au groupe G4 mais elle échappe à ce tour de rôle parce qu’elle a sa propre gare routière. Avec ses 4 bus de 70 places elle dessert 4 lignes : Niamey-Dosso, Niamey-Maradi, Niamey-Tahoua et Niamey Zinder. Elle emploie 20 personnes.

SONITRAV est une société Anonyme de 10 millions de F CFA pour 3 actionnaires. C’est une très jeune entreprise créée seulement en Juin 2007 grâce à une institution de crédit. Les commerçants constituent l’essentiel de sa clientèle avec laquelle elle négocie de fois le tarif. L’entreprise ne tient pas de comptabilité mais estime sa recette journalière à plus d’un million de F FCA.

SONITRAV n’a pas de service marketing encore moins de politique marketing clairement définie. Elle emploie cependant 20 personnes et son organigramme se résume comme suit :

Organigramme de SONITRAV

SONITRAV reste par ailleurs optimiste quant à l’avenir de son activité. Sa perspective est l’ouverture vers l’international mais les responsables redoutent les difficultés inhérentes. Le DG de la société nous a déclaré : « Pour le moment à notre niveau, nous espérons l’acceptation de la demande par les Etats étrangers et aussi la place pour l’implantation. De part nos premières tractations, sous sommes conscients que c’est un vrai parcours des combattants ». Il a une vue optimiste sur l’évolution de la profession dans son ensemble, et il avance : « Parce qu’au fur et à mesure que la population augmente, la demande augmente aussi. Par ailleurs, les clients qui prenaient les vieux bus sont de plus en plus sensibilisés et veulent le confort et le luxe ».