Introduction

Ces dernières années ont vu la résurgence des études sur la relation entre les pratiques professionnelles du maître, et les performances des élèves (Bru et al, 2004, Sensevy, et al, 2007, Garcia-Debanc et Dufays, 2008). Ce retour, qui se fait sous les hospices de la pragmatique des interactions en classe et de l’analyse de l’action conjointe, s’accompagne du renouvellement de la problématique de l’efficacité de l’action didactique marqué par un profond changement dans la perspective et dans les méthodes. Certes, le sujet n’a jamais cessé d’être l’objet de toutes les attentions et depuis deux décennies déjà, Doyle (1986) témoignait de son importance dans « l’éventail des recherches en matière d’éducation » que l’on pouvait mesurer à l’abondance de la littérature qui lui était consacrée. Cependant, si l’intérêt est scientifiquement reconnu, la fiabilité des résultats a souvent fait l’objet de remise en question, les recherches étant critiquées sur la validité et la pertinence de leurs démarches. Longtemps, le scepticisme quant à la productivité du champ de recherche sur les connexions entre les processus d’enseignement et les processus d’apprentissage s’est nourri de la conviction qu’il est quasiment impossible d’établir de façon scientifique, « des relations stables entre des variables de processus et les critères d’efficacité » (Doyle p : 436). Mais si on interrogeait les fondements conceptuels des travaux qui ont été menés jusqu’à une époque récente, peut-être se rendrait-on compte de la difficulté des premières approches à convaincre.

La théorie fondée sur le paradigme « processus-produit », plus connu sous l’appellation d’effet-maître, pose la problématique de l’efficacité de l’action didactique sur les apprentissages exclusivement du point de vue de l’agir enseignant. En partant du principe qu’il y a de bons et de mauvais enseignants, on fait l’hypothèse que les différences de performance des élèves d’une classe à une autre s’expliquent par les qualités différentes de leur professeur. Cette thèse, qui fait très peu cas des autres paramètres de la relation didactique aboutit à une démarche consistant, pour le chercheur, à définir des critères à partir d’observations de pratiques mais aussi de son jugement personnel, à les modéliser en comportements d’enseignement et à chercher à établir des corrélations avec les comportements d’apprentissage qu’ils produisent sur les élèves. En ne prenant pas suffisamment compte ni de l’agir complémentaire de l’apprenant, ni de la spécificité des savoirs en jeu et de son effet sur le processus d’enseignement-apprentissage, cette approche se retrouve assez vite dans l’impasse. Elle est alors relayée par le paradigme « cognitiviste » (Tochon, 1993). Celui-ci postule la cognition comme un outil de contrôle et donc comme un indicateur de la qualité des enseignements. Ses méthodes se fondent sur la recherche d’une causalité directe entre les acquisitions des élèves et les stimuli pédagogiques spécialement conçus pour cet effet. Ces recherches, qui inspireront plus tard les enseignements spécialisés, étudient la relation enseignement-apprentissage du point de vue du traitement de l’information par l’élève (Bressoux et al, 1999). Les effets des pratiques enseignantes ne sont pas évacués, bien au contraire. Seulement, l’agir du maître n’est plus considéré comme le facteur direct des apprentissages mais comme un instrument qui les médiatise. Vue sous cet angle, l’efficacité de l’enseignant se mesurera à sa capacité à imaginer et à mettre en application des méthodes, des démarches, des situations, des outils, susceptibles de stimuler et de faciliter le traitement de l’information. L’intégration des systèmes enseignant-instruments-élèves représente certainement une avancée significative. Toutefois, elle reste à systématiser. En plus, la question du statut des savoirs n’est pas réellement posée et les outils didactiques qui, suivant les activités ne peuvent être de même nature, ni de même statut et encore moins de même fonction, ne sont pas clairement définis. Enfin, ce paradigme s’est heurté au problème de la multiplicité des facteurs concourant à l’acquisition dont un grand nombre se situe en dehors de la relation didactique. Ce constat pourrait être à l’origine de l’avènement du paradigme « écologique » qui attire l’attention sur l’importance de la situation de classe et de ses tensions sur les pratiques de l’enseignant (Bronfenbrenner, 1986 ; Doyle, 1986). En référence aux théories de l’activité et de l’action, ce paradigme décrit la situation de classe comme un espace de transaction entre un enseignant et des élèves autour d’un ensemble structuré de tâches à accomplir. Ce qui fait que pour comprendre les rapports entres les processus d’enseignement et les processus d’apprentissage, il y aurait lieu d’interroger les comportements des co-acteurs par rapport au but poursuivi et aux opérations mobilisées pour sa réalisation. Le fait notable, c’est que ce jeu s’inscrit dans un environnement dont les spécificités (effectif de la classe, niveau des élèves, situations sociales et culture éducative, culture professionnelle de l’enseignant et style pédagogique, cadre physique, équipement disponible etc.) influencent durablement le cours. En mettant l’accent sur les paramètres environnementaux de l’action didactique, le paradigme écologique essaie de palier les manques observés dans les approches précédentes en évitant le piège d’une lecture corrélative, voire implicative où les performances des élèves seraient directement imputables aux enseignements du maître. Selon cette démarche, l’agir professionnel est traité comme une variable dont l’effet ne peut s’expliquer qu’en association avec les autres variables intervenant dans les interactions en classe. Et c’est là où se situe la difficulté car, eu égard à la richesse et à la complexité des contextes, il faut faire face à la définition de ces variables, peut-être à des choix, et certainement à leur hiérarchisation selon leur force explicative. Mais au moins un principe s’est imposé qui conduit à l’avènement du paradigme interactionniste. Celui-ci se singularise par son approche intégratrice articulant les variables enseignant, élèves, savoir, situations (Vinatier et Altet, 2008) et posant en creux le rôle des processus médiatifs. Il est admis en effet que même si son impact sur les apprentissages reste encore mal défini, voire relativement faible (Altet, 1993, 1997) l’effet-classe, qui repose sur le principe d’une triangulation des interactions entre un ou des apprenants, un enseignant et un objet de savoir, reste l’entrée la plus convaincante pour analyser les conditions de développement des compétences chez les élèves. Nous nous inscrivons dans ce dernier paradigme tout en retenant certains aspects du second.

On découvre que notre projet est de nous intéresser à l’efficacité de l’action didactique dans ses rapports avec les performances de ses bénéficiaires. Il s’agit bien entendu de l’action commune qui engage les trois pôles de la relation didactique. Notre objectif est d’identifier, même si c’est de manière partielle, ce qui dans le fonctionnement respectif des ces pôles, explique les modifications des compétences des apprenants, au sens de savoirs et de pratiques, avant et après ladite action.

‘« Ainsi redéfinie, la notion d’efficacité revêt une connotation pédagogique plus étendue que la dimension économique. En effet, même s’il n’a pas de prix, l’enseignement doit faire des résultats » (Sall, H.N., 1996, p : 94)’

Notons au passage que cette question de l’efficacité, couplée à la qualité qui est présentée comme « l’atteinte par tous les élèves des normes de performance les plus élevées », constitue l’un des principes directeurs du Programme de Développement de l’Education et de la Formation (PDEF) initié au Sénégal depuis 2003. Sans être nécessairement dictée par des contingences politico-sociales, ni chercher à apporter des réponses qui ne peuvent être que très localisées et très circonstanciées à un problème très général, notre recherche semble donc faire écho à un projet national d’amélioration de la qualité des enseignements-apprentissages. Peut-être faut-il dire qu’à l’échelle de la classe, cette amélioration, qui suppose une intervention sur le fonctionnement du système didactique, passe par la compréhension de la manière dont se construit et se conduit l’action didactique. Ce qui se trouve être l’enjeu de notre recherche.

Nous envisageons donc de partir de l’analyse des interactions en classe pour chercher à comprendre et à expliquer les effets mutuels de chacune des composantes de la relation sur les deux autres, mais aussi l’effet du contexte sur les conditions de réalisation des actions. La réflexion pouvant et devant même être engagée à partir de l’un des pôles (savoir, élèves, enseignant), nous avons choisi d’observer les processus d’enseignement-apprentissage sous l’angle des pratiques professionnelles de l’enseignant. Pour cela, nous partons du principe de l’insécabilité des pôles de la relation didactique et nous postulons que le développement des compétences lecturales et rédactionnelles de récits de fiction est lié à la co-action dans la classe telle qu’elle est renseignée par la nature des objets d’enseignement et les outils qui les médiatisent ; les rapports des élèves à ses objets, aux activités de lecture-écriture et à la langue ; les modalités didactiques de mise en contact. Il faut savoir que si nous pointons l’agir professoral, c’est en raison de sa fonction essentielle d’initiation et de maintien de l’interaction, de mise en scène des savoirs et d’organisation des espaces communs de partage des significations (Sène, Mb., 2006, 2007).

‘« La question est de savoir si on peut, et si oui comment, mettre en relation les données issues d’observations fines des pratiques enseignantes et des données relatives à l’efficacité de l’enseignement-apprentissage. Autrement dit, comment une didactique descriptive, centrée sur les pratiques pourrait-elle déboucher sur des orientations didactiques fondées ? Cette question rejoint finalement l’interrogation fondamentale de la didactique : pourquoi et comment les élèves apprennent-ils ? Dans quelle mesure l’expertise professionnelle de l’enseignant contribue-t-elle à cette construction pour tous les élèves ? » (Garcia-Debanc, C., 2008, p : 3)’

Des voies sont tracées en didactique du français pour répondre à cette interrogation fondatrice. L’une d’elles propose de passer par l’étude des processus de transformation des objets enseignés (Canelas-Trevisi et al. 1999 ; Dolz et al, 2001 ; Schneuwly et al., 2005). Une autre préconise de focaliser les logiques enseignantes et les gestes professionnels qui leur sont associés (Goigoux, 2002, Garcia-Debanc, 2008). Notre objectif semble nous rapprocher de cette deuxième voie. Il s’agit d’étudier, en référence à la dimension générique et aux composantes spécifiques des gestes professionnels (Sensevy, 2002, 2005 ; Schubauer-Léoni, Leutenegger, (2003), Schubauer-Léoni, et al. 2007 ; Nonnon, et Goigoux 2007-2008), la manière dont les pratiques enseignantes, articulées à des savoirs particuliers et aux outils didactiques qui les médiatisent, dynamisent le travail des élèves et rendent possibles leurs apprentissages. Pour ce faire, nous prenons comme prétexte la description des modalités de conduite d’activités scolaires de lecture littéraire et de production écrite de récits de fiction. Ce cadre restreint est marqué par des situations pédagogiques particulières (la lecture et l’écriture, activités individuelles et privées par définition, pratiquées comme des activités collectives et institutionnelles) et par l’introduction d’outils spécifiques (des morceaux de textes littéraires investis des savoirs à enseigner et à apprendre). Il nous permet de postuler qu’il y a deux formes de médiations étroitement interdépendantes : celle du professeur et celle des savoirs narratifs. Sachant que nous soutenons l’idée que l’efficacité de l’action didactique dépend des outils qui la sémiotisent et des gestes d’apprentissage des élèves, alors nous pouvons présenter notre projet comme l’analyse des mécanismes qui, à travers des interactions didactiques alimentées par différentes activités autour de morceaux de textes littéraire et de textes procéduraux, permettent la co-construction de savoirs narratifs et leur appropriation par les élèves. Une autre façon de décliner notre objectif serait de dire que nous voulons étudier la manière dont les médiations enseignantes et textuelles viennent se joindre à la volonté des élèves, la motiver et l’entretenir, et en activant leurs connaissances préalables, les mettre effectivement en situation de produire avec plus ou moins d’autonomie, les opérations exigées pour développer des compétences lecturales et rédactionnelles de récits de fiction.

Pourquoi le récit de fiction ? En réponse à cette question, nous pourrions nous contenter de cette remarque de S. Plane

‘« le récit est un objet très complexe, étudié tout au long de la scolarité, depuis les histoires écoutées en maternelle jusqu’aux analyses littéraires au lycée, mais dont l’intérêt n’est jamais épuisé et dont l’apprentissage occupe une place de choix au collège » (1994, p : 121)’

En réalité, si nous revenons sur l’analyse de l’enseignement-apprentissage de la lecture-écriture du récit de fiction au collège, ce n’est pas uniquement par l’intérêt que représente une pratique culturelle, littéraire et scolaire bien ancrée dans les traditions de la didactique du français. C’est parce que l’étude du récit occupe une place prépondérante dans les programmes d’enseignement du français au Sénégal, dans les interventions didactiques extérieures à la classe proposant des méthodes et techniques pour améliorer les compétences lecturales et rédactionnelles des élèves, enfin dans les activités scolaires programmées par les enseignants. A cet égard, nous pensons que les conduites d’activités scolaires ouvertement orientées vers la maîtrise de savoirs narratifs offrent d’excellents espaces d’observation des interactions en classe de français au Sénégal et de caractérisation des variables qui contribuent à favoriser les processus d’enseignement-apprentissage. Ceci, parce que le récit, qui repose sur une organisation à la fois conventionnelle et récurrente, et dont le traitement est facilité par la disponibilité chez les élèves de connaissances préalables, illustre parfaitement les thèses développées par rapport à l’effet des médiations textuelles sur le développement de compétences lecturales et rédactionnelles. De fait, les travaux issus de la psychologie cognitive (Fayol, 1994 ; Fayol, M. et Gaona’ch, D., 2003), de la sociolinguistique (Adam, J.M, 2005), de la sociologie (Lahire, B. 1993), de la didactique du français (Canvat,1999 ; Reuter, Y., 1994, 2000 ; Barré-de-Miniac et al., 2004) expliquent la manière dont s’opère le développement parallèle des compétences de lecture et d’écriture par l’exposition continue du jeune lecteur-scripteur à des textes et genres discursifs normés. Suivant cette hypothèse, on peut penser que la mise en contact des apprenants avec des extraits de récits littéraires présentés et / ou perçus comme des modèles d’écriture et dont la connaissance des mécanismes conventionnels constitue l’objet de l’action didactique, génère le développement de compétences narratives.

Parlant du rapport des élèves à l’outil qu’est le récit, il serait intéressant de savoir d’où vient ce déjà là qui s’impose aux médiations enseignantes et textuelles en tant qu’une des conditions de possibilité de l’apprentissage. Cette question conduit naturellement à chercher à mieux situer les connaissances narratives extrascolaires, même si on doit prendre en compte la manière dont elles s’agrègent aux connaissances scolaires. Nous ne nous étendrons pas outre mesure sur cette problématique spécifique, pour autant, nous ne saurions occulter le fait que les élèves dont nous analysons les performances, suite à un enseignement-apprentissage systématique des savoirs narratifs, abordent le récit en ayant déjà acquis une compétence en la matière. C’est celle héritée de leur culture éducative, de la tradition où l’univers de l’enfant reste encore marqué par cette littérature orale faite de contes, de légendes, de mythes, de récits en tout genre. La question sur l’origine du déjà là cognitif et procédural (connaissances déclaratives sur les savoirs narratifs et procédurales sur la construction du récit en général, du récit de fiction scolaire en particulier) nous amène ensuite à faire attention à l’histoire didactique des élèves, autrement dit, à leur culture éducative scolaire (Bouchard, 2005) en matière de lecture littéraire et de production écrite de textes fictionnels. Deux années avant leur admission en 6ème, les jeunes élèves sénégalais sont soumis à l’enseignement-apprentissage de la lecture littéraire et de la production écrite où les activités sont presque totalement centrées sur les récits de fiction. Ce programme est maintenu et renforcé durant les trois premières années de collège. Notre choix d’observer des processus de développement de compétences narratives auprès d’élèves de 6ème et de 4ème nous met face à un public-cible plus ou moins habitués à la lecture de récits littéraires aux conventions génériques et compositionnelles bien établies, et à la rédaction de textes narratifs, plus ou moins fictionnels, régulés par des conventions scolaires. Si donc nous évoquons les connaissances préalables, c’est pour montrer que modéliser l’action conjointe dans la classe et définir les paramètres de son efficacité, c’est examiner la manière dont l’enseignant organise la rencontre des élèves avec les outils textuels qu’il introduit dans l’interaction, les amène à intégrer leurs savoirs anciens aux savoirs nouveaux, à les façonner et à les structurer pour les transformer finalement en savoirs d’action pour lire et pour écrire. On peut remarquer que nous étudions les compétences narratives comme une somme de manifestations cognitives résultant de la mise en œuvre de stratégies et de procédures pouvant être acquises en dehors de l’école, mais dont la structuration et le développement sont facilitées par une ingénierie didactique (Brousseau, 1998), et plus largement, par un dispositif pédagogique (Montadon, 2002) faisant effectivement fonctionner le couple enseignement / apprentissage.

Dès lors, il devient clair que nous traitons des conditions de développement de compétences lecturales et rédactionnelles des élèves appliquées aux récits de fiction dans le contexte d’un enseignement-apprentissage institutionnalisé. Cette restriction est d’autant plus justifiée que notre recherche concerne des élèves sénégalais dont la formation aux compétences de lecture et d’écriture s’effectue principalement dans et par l’école, en et par le français ; langue officielle, langue d’enseignement au demeurant, mais aussi et surtout, langue seconde du point de vue de sa pratique. L’intérêt de cette précision est à lire dans l’impact que peut avoir l’environnement sociolinguistique et pédagogique sur le fonctionnement du jeu didactique. Le profil social des élèves ne les dispose pas tous à cette épaisseur de littéracie, pourtant essentielle dans un contexte de français langue seconde et langue d’enseignement, pour faciliter leur contact avec les objets de savoir. Par ailleurs, les conditions pédagogiques que nous résumons par des classes pléthoriques (entre 50 et 70 élèves), une absence quasi chronique de matériels didactiques, la non disponibilité des outils textuels en quantité suffisante, des enseignants peu formés, sont des dimensions considérables. De ce point de vue, il n’est pas injuste de penser que les élèves évoluant dans un contexte social et pédagogique plus favorable offrent des chances de performance plus élevées.

Ainsi, les trois parties qui composent ce travail sont construites en fonction du schéma que nous venons de décrire. Dans les deux chapitres de la première partie, nous présentons le contexte, c'est-à-dire les conditions sociolinguistiques et pédagogiques et la problématique de l’enseignement-apprentissage de la lecture littéraire, de la production écrite et de la lecture-écriture du récit de fiction. La deuxième partie est consacrée au cadre théorique (chapitre 1) et méthodologique (chapitre 2). La nouveauté de notre approche est dans la mise en lien deux types d’analyse régulièrement convoqués dans l’étude des rapports entre les processus d’enseignement et les processus d’apprentissage, mais presque jamais conduits en même temps. Il s’agit de la modélisation de l’action conjointe du professeur et des élèves autour du texte que nous associons à l’évaluation des compétences narratives des élèves telles qu’elles se manifestent dans leurs productions écrites. L’imbrication de variables à la fois internes et externes à la relation didactique justifie que nous ayons recours à une analyse plurielle (Sensevy, 2001, Mercier, 2002, Canelas-Trévisi, et al 1999) et multifocale (Schneuwly et al. 2006) déclinant trois dimensions. Celle de la pragmatique des interactions en classe qui se donne comme objet la caractérisation des formes de la co-action et l’interprétation des effets des pôles de la relation sur le système didactique (Sensevy et al 2000, 2007 ; Schneuwly, 2000 ; Bouchard, 2004 ; Saada-Robert et Baslev, 2004). En considérant que la description de ce qui se passe dans les interactions apprenants-textes-enseignant peut aider à comprendre les performances des élèves dans leurs productions écrites, nous convoquons la place et le rôle de la médiation sociale dans le processus d’acquisition des ces compétences. La question serait en effet intéressante de savoir dans quelle mesure l’agir professoral concourt à la création de conditions d’apprentissage. Or, nous postulons parallèlement que les textes, en tant que supports et objets du contrat didactique, influencent la co-action entre les pôles enseignant et apprenant du fait que les activités scolaires alimentant les situations de classe sont centrées sur l’enseignement-apprentissage de leur nature, leurs caractéristiques, leur organisation thématique et modale, avec en arrière plan, le développement de compétences lecturales et rédactionnelles spécifiques. Cette hypothèse introduit la place et la fonction de l’objet enseigné dans l’action conjointe. Par ailleurs, dans une approche où les compétences s’actualisent à l’intérieur d’une situation finalisée par un contrat didactique, le choix de se focaliser sur les médiations enseignante et textuelle ne peut se comprendre que dans sa mise en rapport avec la posture de l’élève qui a la responsabilité de son apprentissage. C’est à ce propos que nous avons recours aux productions écrites des élèves en les faisant fonctionner cependant plus comme des indicateurs que comme des éléments de preuve de l’efficacité de l’agir professoral. La troisième partie, correspondant à l’analyse empirique des données, est composée elle aussi de deux chapitres dans lesquels nous procédons au rapprochement de ces éléments.