1.1.1. Les finalités de l’enseignement-apprentissage de la lecture littéraire

Pourquoi enseigner la lecture-littéraire à l’école ? Pourquoi faire lire des romans, des poèmes, des contes et des légendes, des fables et des nouvelles, des essais ? Une des préoccupations des chercheurs est donc d’expliquer les finalités de la transposition des objets littéraires à l’école.

‘« Pour moi, l’école a un rôle social qu’elle doit jouer, et le français un rôle crucial, et comme discipline qui est au carrefour de toutes les autres, et comme voie majeure de la formation de l’homme et du citoyen » (Viala, 1999, p : 19).’

Aussi, « travailler sur le « discours d’adhésion », périphrase employée par l’auteur pour désigner le discours littéraire, c’est «créer une dialectique de l’adhésion et de l’esprit critique à l’égard des processus d’adhésion ». Si donc la lecture littéraire est liée à l’école et à des apprentissages scolaires, c’est parce que l’idée que défend Viala d’une école lieu de formation des hommes à la culture et aux valeurs humaines est largement partagée. En clair, la lecture littéraire, en tant que construction scolaire, doit aider l’école à bâtir un type d’homme, qui s’identifie à des valeurs morales et intellectuelles, individuelles et collectives.

‘« L’abord de la littérature, caractéristique du cursus secondaire en France, vise à mettre en place aussi bien des méthodes de lecture que des références culturelles (esthétiques et morales), à équiper les élèves atteignant la fin du second cycle non seulement de « savoir-faire » de lecteurs, mais aussi d’un « savoir être » de citoyen « honnête homme » (Fournier, et Veck,1997 : p.15).’

Cette perception repose sur le principe que la littérature aide l’école dans ses missions de construction d’une identité commune (Legros, 2000). Par ailleurs, derrière la formule « une dialectique de l’adhésion et de l’esprit critique à l’égard des processus d’adhésion », se dégage l’idée que l’enseignement du texte littéraire doit viser à développer l’esprit l’ouverture, la relativité et le sens critique. L’enseignement-apprentissage de la littérature doit aussi permettre de cultiver le goût de la découverte et par delà, amener à réfléchir sur soi, sur la marche du monde et sur le sens à la vie. Subséquemment, son exercice demande des compétences spécifiques dont les moindres sont la capacité de l’élève à inscrire et à réinscrire un texte dans son fonctionnement socioculturel, autrement dit, à identifier des régularités qu’il peut rattacher à des conventions définissant un genre littéraire et autorisant à interpréter les fonctionnements ou dysfonctionnements normatifs du texte dans un sens ou dans un autre. En plus, l’activité scolaire de lecture littéraire exigera de l’élève au moins la capacité à reconnaître et à décrire des formes textuelles (typologie), à reconnaître et à décrire des mécanismes de construction de la valeur littéraire (par exemple les composantes séquentielles d’un récit et leur configuration). Enfin, l’élève devra être en mesure d’interpréter et de produire du sens à partir de sa lecture du texte.

Ces exigences, mêmes minimales, posent la problématique du rapport à la langue. Là aussi, l’activité de lecture de textes littéraires est présentée comme un cadre propice à sa maîtrise (Reuter, 1992). A partir de ce moment, nous pouvons définir la lecture littéraire en contexte scolaire comme une situation d’interaction didactique médiatisée par un texte culturellement affecté d’un coefficient de littérarité, mobilisant des catégories de savoirs particuliers et impliquant un niveau élevé de compétence lecturale. Instrumentée en vue d’inférer des significations, de découvrir et de partager des valeurs, elle est finalisée par le développement d’un savoir, d’un savoir-faire et d’un savoir-être. Que des voix se soient élevées pour dénoncer « l’enrôlement » de la littérature (Laglande, 2001 ; Schneuwly, 2007), n’a rien changé à la situation. Peut-être observons-nous plus de technique, voire une plus grande technicité, mais les enjeux ont peu varié, car lorsqu’on fait lire à l’école, pour écrire, faire maîtriser la langue, on continue à postuler que le texte référent recèle des valeurs qui l’offrent comme modèle. Au regard des auteurs, des œuvres et des morceaux de textes étudiés dans des classes de français langue seconde à l’exemple du Sénégal, on pourrait penser, que ce soit dit ou pas, qu’on en ait plus ou moins conscience, ce postulat sous-tend les choix programmatiques et projets didactiques des enseignants