1.1.1 Les performances des élèves en 6C par rapport à l’opération de contextualisation de l’histoire

Au regard de la figure 14, les résultats de la classe rapportés à un échantillon de 40 élèves restent constants de la première à la seconde production et on peut en déduire que la culture de construction du début du récit, selon le genre scolaire, est bien établie. Toutefois on note le décrochage au niveau de la détermination spatio-temporelle dans les premières productions même si les élèves se sont largement rattrapés par la suite. Mais les singularités de cette classe se situent ailleurs.

Figure 15 : Représentation des indices de présence des catégories de contextualisation du récit dans les productions des élèves en 6C aux semestres 1 et 2 (40 copies X 2)
Figure 15 : Représentation des indices de présence des catégories de contextualisation du récit dans les productions des élèves en 6C aux semestres 1 et 2 (40 copies X 2)

C’est d’abord dans la relation entre l’ouverture de l’histoire et l’introduction du récit. Les élèves restent assujettis à un mode de construction de leur début d’histoire qui relève de la tradition scolaire et auquel ils se conforment quel que soit le sujet. En effet, autant celui de la seconde production est des plus classiques dans sa formulation :

‘Tout est calme dans votre quartier. Soudain, de grands cris se font entendre. Que se passe-t-il ? Racontez.  ’

et donc dans ses attendus, autant celui de la première composition semble quelque peu sortir des chantiers battus.

‘Imagine une petite histoire d’animaux dans laquelle tu fais parler les personnages. ’

On pouvait s’attendre à une forme d’affranchissement à la coutume qui se traduirait par un mode d’organisation et même de configuration paratextuelle différente. Mais à l’arrivée, les récits sont globalement subdivisés en trois parties correspondant à la tripartition (Introduction-Développement-Conclusion) de la rédaction traditionnelle. Seul 8 exemples sur les 40 copies analysées dérogent à la règle dans la première production, le cas unique recensé dans les copies de la deuxième production relevant d’une erreur.

Le second point de singularisation du travail de contextualisation chez les élèves de 6C se situe dans leur rapport aux consignes. Celle de la deuxième composition offre un cadrage suffisamment explicite pour servir de préambule, ce qui peut justifier que plus de la moitié des élèves (22/40) se soient contentés de reproduire le texte procédural sous forme de simple reprise ou de reformulation plus ou moins élaborée comme l’illustrent ces deux exemples

En revanche, la formulation de la consigne de production à la première composition met les élèves dans une situation de construction autonome du préambule. Pour autant, nous retrouvons la même proportion d’élèves qui se sont servis du texte procédural en guise d’introduction, même si dans certaines copies, se remarquent des reformulations avec l’insertion de précisions spatio-temporelles, actancielles et / ou situationnelles. On peut penser qu’à défaut d’un enseignement systématique de la lecture et de la prise en charge de la consigne et en raison de leur expérience didactique, encore insuffisante, de la complexité du contrat de production, notamment dans sa dimension implicite, les élèves ont une lecture au premier degré de la situation. Cette inexpérience se manifeste encore plus par l’applicationnisme pointilleux quant aux règles organisant le genre scolaire. Cette lecture est validée non seulement par le nombre relativement faible de copies où les élèves cherchent à se soustraire aux normes scolaires de construction et de présentation paratextuelle, mais surtout par les évaluations qualitatives de l’enseignante qui sanctionnent ces démarches comme des écarts.

L’effet induit de la relation à la consigne, ce qui représente le troisième élément de spécification des productions des élèves en 6C, est lié à l’emplacement de la contextualisation. Nous constations que dans les copies de la seconde production, le préambule du récit est systématiquement fondu dans l’introduction du devoir, ce qui est facilité par le texte procédural. Cette construction donne aux productions l’allure d’un texte de type scolaire configuré en texte « littéraire ». Dans les secondes productions, la formulation de la consigne et la nécessité ressentie par les élèves de se soumettre à un protocole formaliste les a conduits à séparer les deux phases du récit. L’introduction est dès lors constituée de la reprise de la consigne qui, dans certains cas, apparaît sous la forme d’un projet narratif. En même temps, la contextualisation est décalée au début du développement. Le résultat donne un enchâssement textuel, une construction en abyme où le texte de type scolaire accueille et encadre un texte de type littéraire.