2.1.4 Les performances des élèves en 4L par rapport aux opérations de constructions et d’insertion de séquences descriptives

Comparée à la classe précédente, nous constatons, à travers la figure 29, une sensible équivalence des taux de représentation de séquences descriptives annotées. La différence vient de ce que les mentions portées par une phrase complète sont plus nombreuses, qui plus est, le récit est parcouru dans toute sa longueur par des multiples détails descriptifs. Quant aux séquences plus moins expansées, elles connaissent une variation plus élevée de la première à la seconde composition. Ici on rencontre au moins une insertion semi-développée ou développée dans un peu de plus la moitié des textes de la seconde production.

Figure 22 : Représentation des indices de présence des trois formes de séquences descriptives dans les productions des élèves en 4L aux compositions des semestres 1 et 2 (32 copies X 2)
Figure 22 : Représentation des indices de présence des trois formes de séquences descriptives dans les productions des élèves en 4L aux compositions des semestres 1 et 2 (32 copies X 2)

Le tableau de distribution des contenus et orientations de ces séquences donne des résultats très intéressants.

Tableau 22 : Analyse de la distribution des contenus et orientations des séquences descriptives dans les productions des élèves en 4L aux semestres 1 et 2
Nbre de Textes

Orientations
1ère Production 2ème Production
Nbre de Textes % Nbre de textes %
Portraits 07 25, 92 12 44, 44
Descriptions d’espaces 05 18, 51 12 44, 44
Descriptions d’actions 04 14, 81 06 22, 22

Si les séquences descriptives semi-développées à développées se comptent dans 27 récits, 14 textes en accueillent plus de deux à la fois. Dans l’exemple suivant, par delà les multiples insertions portant sur le décors et ses changements, nous comptons trois séquences descriptives plus ou moins développées.

La séquence est mise à profit pour présenter la chambre, l’univers restreint qui servira de cadre à l’évènement central et pour insister sur le détail insolite : une statue en robe de mariée par quoi passe le fantastique. La seconde insertion est une description d’actions qui situe l’action au cœur des manifestions de ce fantastique. Elle est étroitement liée à la troisième séquence dans laquelle est décrit le personnage (un fantôme) à l’origine des phénomènes extraordinaires.

Malgré sur la surreprésentation des portraits et des descriptions de lieux, les textes sont peu nombreux (5) où figure à la fois deux paragraphes descriptifs présentant le cadre et un des personnages.

C’est dire que les descriptions sont généralement focalisées sur une catégorie d’objet et à ce jeu, les meilleures occurrences concernent les portraits (personnage principal ou secondaire). Ce sont là des composantes « naturelles » imposées a priori soit par le texte incitatif, soit par le genre littéraire référé. Nous avons montré que la structure compositionnelle du récit pouvait être inscrite a priori dans le contrat de production. Nous venons de découvrir qu’elle pourrait aussi être programmée par le type de texte mis en projet et en rapport avec les caractéristiques du genre auquel il réfère. Cette perspective pose la problématique des connaissances typologiques et génériques des élèves. Cette donnée semble intégrée par ceux de la 4C. Certes, la question pose aussi le problème de la médiation enseignante et de l’apprentissage de chaque élève. On observe que la description a fait l’objet d’un traitement systématique dans les interactions de classes et même, elle a été retenue comme un des critères d’identification du récit fantastique. La question est de savoir si le travail a permis une acquisition de la compétence et son transfert. Là est l’explication des progrès réalisés par les élèves dans leurs secondes productions, mais aussi la non prise de risque, dans des conditions d’évaluation, devant un exercice somme toute difficile et non obligatoire.

Cette conclusion nous parait tout aussi valable pour les insertions dialogales (figure 30) dont le plus grand nombre est constitué de séquences annotées, c’est dire composée d’une à trois répliques au plus.

Figure 23 : Représentation des indices de présence des trois formes de séquences descriptives dans les productions des élèves en 4L aux compositions des semestres 1 et 2 (32 copies X 2)
Figure 23 : Représentation des indices de présence des trois formes de séquences descriptives dans les productions des élèves en 4L aux compositions des semestres 1 et 2 (32 copies X 2)

Les progressions constatées dans les résultats de la dernière production, d’environ 12 points pour les séquences moyennes et 15 points pour les insertions longues, ne doivent pas nous faire perdre de vue le plus important : ces séquences concernent moins de la moitié des textes. C’est dire que comme en 4C, les élèves en 4 L ont moins bien travaillé cette sous-dimension du récit malgré l’injonction du texte procédural. La mise en texte des séquences dialogales rendues au style direct n’est pas sans poser des problèmes aux élèves. D’abord du point de vue de l’usage des instruments de signalisation qui reste maladroite dans les premiers récits. Ils se sont certes largement rattrapés dans la production suivante, ce qui signifie une meilleure maîtrise après traitement dans les interactions didactiques. Enfin, il n’est pas rare que la construction et l’insertion de séquences dialogales se fassent au détriment des séquences descriptives. Dans l’exemple qui suit, on décompte 1 unité annotée (la réplique des deux fantômes, et 3 échanges de plusieurs tours de paroles. Les situations, les moments et les finalités en sont très variées. Retenons tout simplement que ces séquences sont avantageusement utilisées pour remplir les mêmes fonctions informatives, narratives et dramatiques qu’auraient pu tenir d’autres séquences. On ne peut toutefois parler d’une économie narrative, l’élève n’ayant sûrement pas conscience de ces enjeux rhétoriques. Il serait plus juste de considérer l’exemple comme un modèle de la stratégie de saturation fréquente quand l’élève maîtrise un procédé et qu’il a le sentiment que son usage serait positivement apprécié.

Les résultats de la classe par rapport aux compétences de construction et d’insertion de séquences encadrées conduisent à s’interroger sur les effets des exigences génériques et discursives dans la stratégie narrative des élèves. Par ailleurs, leurs performances, supérieures à celles des classes de 4ème et 6ème C (établissement différent), mais inférieures à celles des élèves en 6ème L (même établissement), mettent sur orbite les modes de mise en contact avec les objets de savoir, et donc les pratiques d’enseignement-apprentissage.

Les modélisations des compétences que nous regroupons sous l’appellation générique de structuration externe du récit ont mis en lumière des instruments d’organisation de surface du genre narratif institutionnalisé en milieu scolaire. Cependant, cet aspect de la dimension configurationnelle du texte doit être complété par la prise en compte des outils internes de réseaunance intra et interséquentielle et de mise en cohérence du discours. Il faut convenir que le texte, quoi que produit dans des conditions pédagogiques et communicationnelles particulières, est destiné malgré tout à être lu avant d’être évalué. Ce qui fait qu’il vise naturellement à persuader et à plaire. Il importe donc de considérer, dans l’analyse de la compétence de mise en cohérence, la capacité de l’élève à prendre en charger son lecteur, à justifier la logique de sa démarche. L’analyse vise à rendre compte de la manière dont sont gérés les mécanismes structurants du récit à partir d’une étude des variables constitutives du mode narratif (Genette, 1983). Celles-ci peuvent être réunies sous l’appellation de sous-compétence de mise en cohérence du récit et de prise en charge du lecteur.