Tout ce délire autour d’un mot – n’oublions pas les variations sur « vocabulaire » (« vocalubre, vocabulisme, vocabulabulaire » in C.H.), « oreille » (« orille, voreilles, oureille, orillère » in L.M.) et « orifice » (cf. « orificiers, orificiel, oriface, orifond, [s’] aimer d’orifice, commettre l’orifice, crime de l’orifice » voire orifils, mot suggéré) – peut aussi concerner des sons comme dans « Bouillon, Broutille, Bouzille et Bouzillon » dans L’Origine rouge (p. 21) et même un nom propre, certes assez inattendu mais qui montre que, contrairement à certaines apparences très trompeuses, Novarina (qui évoquera également Lecanuet dans L’Atelier volant, Giscard d’Estaing dans La Lutte des morts ou Brice Lalonde, de Villiers et Chevènement dans La Scène), ne se désintéresse pas de la chose politique : il s’agit, nous semble-t-il, du président Pompidou, dont le nom, déjà assez cocasse en lui-même, sera décliné de quatre manières différentes dans Le Drame de la vie : « Pompidoblard » (p. 97), « l’homme de Pomplide » (p. 103), « pompignolat » (p.116) et « pompignolé » (p. 116).
A la page 74 de L’Opérette imaginaire, on trouvera des noms inédits formés, semble-t-il, à partir de poussière et de syllabes assez courantes dans certains pays de l’est : « Poussiéronovna » et « Dopopoussiérev » ; on le voit, il semble qu’il y ait décidément du potache chez Valère Novarina (et pourtant cette poussière contenue dans un nom propre annonce peut-être aussi avec humour noir le devenir poussière des deux personnages). Dans la revue Java Eugène Nicole nous fera part de ses remarques concernant les transformations d’Adramélech :
‘Si d’aventure s’allonge le récit d’un personnage, plus il parle, plus son nom est l’objet de dérision. Le montrent ces quelque quinze pages du « monologue d’Adramalech » (Babil ; p. 239-254) où, significativement, la déformation du nom éponyme (Adraméon, Ablamélion, Ablamélech, Albert Billoux, Adramélusse, etc.) s’accompagne volontiers de reproches visant cette parole intempestive : « Ablidalech, ton babillage m’empêche de te compter les pas ! (Babil ; p. 240) ; « Funèbre, il rajouta : « Cause, cause, Adramélon ! » (p. 251) ; monologue enfin dont L’Enfant Excellent dira qu’il fut « Tout le murmure d’Aglabadon (p. 262). 16 ’Plus rabelaisiennement, Marion Chénetier, dans « Petit débat avec La Lutte des morts»17, fera cette observation :
‘Le trou […] donne lieu à la déclinaison comique de l’expression trou-du-cul, sous des formes enjouées : Durèque - Troudaque -Trouduque - Trouduquets -Trouducul - Peaus-ducs, et mène le cortège des vulves, fentes, failles, col, rond, con : ainsi circule tout au long la Romantique-chanson-du-con-de-Bérie.’Eugène Nicole, « Les rôles du nom dans le théâtre de V.N. », Java, n°8, Saint-Estève, été 1992, p. 31.
Marion Chénetier, « Petit débat avec La Lutte des morts », Europe, op. cit., p. 138.