4.4. Une façon baroque de parler d’amour

4.4.1. Ah, fouilles ! Ah dromadées !

Dès La Lutte des morts, l’amour est présent : « Ah, fouilles ! Ah, dromadées ! » (p. 436) pourrait s’appliquer aux courbes de l’aimée et à l’exploration de son corps – mais le contexte d’apparition du terme (qui rime avec «  Ah, jardonnet du sadinet ») suggère que c’est peut-être plutôt son propre corps qu’il s’agit d’explorer : « Veux faire tout le tour seule d’anatomion. » ; de fait, Ruissette (possible féminin de Ruisseau) veut rester seule : « Veux plus qu’on m’embête […] » s’exclame-t-elle…

Dans « Dame de mes transports, je suis à la porte, ouvrez-moi l’écrin », (A.V., p. 134), la métaphore sexuelle sera encore plus évidente. Pour « Jean Daplomb, je veux former couple avec vous » (L.M., p. 456), l’expression annonce un peu « faire sexe » et/ou « faire sexualité », qui seront utilisées plus tard. De fait, la sexualité et le rapport homme/femme seront aussi abordés dans des pièces plus récentes, et notamment Le Jardin de reconnaissance avec des phrases où le désir s’exprime de façon étrange, charmante, polie mais néanmoins impérieuse comme « Je désirerais m’unir à vous par unions des trous en abouchant nos orifices. » (p. 17), « Voulez-vous me donner votre corps à mélanger au mien ? » (p. 18) ou le très technique « Une partie de mon corps s’écoulerait à l’intérieur du vôtre et, s’unifiant à lui, nous donnerions naissance à un enfant clinique et chimérique » (p. 18), explication très terre à terre dans laquelle le principe de l’amour se voit rapproché de celui des vases communicants. Enfin, conséquence logique de tout ces abouchements d’orifices : « Il est sorti par notre bouche d’amour un enfant orificiel du trou un » (J.R., p. 51).