4.4.2. Buisson d’adjectifs et Faon de bichitude

Certains éloges et autres mots d’amour et paroles d’admiration souvent baroques et parfois surréalistes (O.R., p. 55) nous rappellerons certaine lettre de Sade à sa femme83 ce dernier la qualifiant tour à tour de « Charmante créature » de « Jouissance de Mahomet », de « Tourterelle chérie », de « Chatte céleste », de « Porc frais de mes pensées »84 (on verra que chez Novarina, désir et faim sont également associés), d’» Etoile de Vénus », d’» Ame de mon âme », de « Miroir de mes nerfs », d’» Aiguillon de mes nerfs », de « Dix-septième planète de l’espace », de « Quintessence de la virginité », de « Miracle de la nature », de « Colombe de Vénus », de « Rose échappée du sein des Grâces », de « Favorite de Minerve », d’» Ambroisie de l’Olympe », de « Charme de mes yeux » et de « Flambeau de ma vie »… Autant de compliments se retrouvant un peu chez Novarina lorsqu’il écrit (in O.R., p. 55) : « Réservoir de toutes les grâces, Restant du matin présent dans la nuit, Aube vespérale, Volubilis-de-la-saison des moiteurs au-passage-de-la-comète-nomade-traçant l’ombre béante au bout de l’abîme fulgurant du zigzag sur la voûte, Buisson d’adjectifs, Poésie post-prandiale, Mon silence enchevêtré, Murmure des comètes échevelées, Plénitude du vide devant le rien, Outre de toute les vertus, Fontaine de sa propre source, Soleil de la lune, Restant de la nuit bue le matin, Pâleur du feu ».

A la page 132 de L’Opérette imaginaire, les compliments sont encore plus nombreux : « Reine de toutes les femmes », « Bergère intra-muros », « Lumière in octavo », « Prolifération théurgique », « Visage de visages », « Sidération consistante », « Urgence première », « Monade canonique », « Sphère parthénopéenne », « Lenteur à toute allure », « Fulgurance tonique », « Clairon révolutionnaire », même si certains n’ont pas l’air si flatteurs que cela – que penser par exemple de « Poussière de bas en haut » ? Et que dire du « Vase de vertu » ? Serait-ce un pot de chambre ? Pour la « Vastitude autorégulée », on pourrait mal l’interpréter – idem pour « Clairon révolutionnaire » et « Avalanche plausible ». Quant au célèbre et langoureux « Ma biche !» (cf. Louis de Funès), il se métamorphose ici en « Faon de bichitude » (p. 132).

Notes
83.

Sade, « LettreXIX », Lettres, 10/18, 1970.

84.

Note de Sade : « C’est que j’aime beaucoup le cochon et que j’en mange fort peu ici ».