1.3.1. Un nouveau type de critique forte des médias de masse

Clairement antimilitariste, mais sans le côté toujours un peu attendu, systématique des chansons d’un Brassens (voire des dessins d’un Cabu, des textes pamphlétaires d’un Cavanna ou, en généralisant, d’un article mordant et vachard de Charlie-Hebdo ou du Canard enchaîné), Novarina nous invite à une réflexion véritable. Il semblerait même que nous soyons devant un nouveau type – efficace en ce que tout à fait désarmant (par le grotesque mais aussi par la lucidité, l’objectivité profonde) – d’antimilitarisme et de critique forte des médias de masse.

Le cocasse est de repenser aux machines quand on se retrouve devant la vraie messe du vingt-heures : la différence est-elle si grande ? La question se pose, et c’est bien le problème ; « Je préfère son monde vraiment faux à notre monde faussement vrai » déclarera sur France-Culture un de ses admirateurs… Ce média-là, la radio, Novarina semble le priser davantage et l’utilise volontiers ; c’est un espace de liberté et une sorte de théâtre des paroles où, grâce à des passeurs de talent comme Lucien Attoun, la censure est moindre et l’esprit plus vif – et surtout plus présent. On fit même un canular à l’auteur, invité dans « Tout arrive », en arrêtant l’émission pour dire ses nouvelles dans le cadre d’un flash-spécial : l’effet fut plutôt raté mais l’auditeur resté à l’écoute aura pu être frappé par la troublante similitude (phrasé, détails, horreurs) entre le flash en question et le journal habituel présenté juste après.

Il y a là un grand paradoxe : c’est l’excès qui permet à l’auteur d’être objectif. Cet excès concerne la bêtise, l’absurdité, la violence et le voyeurisme. Quant à l’idée (évoquée dans la partie « Alerte dans les zones de Broca ») de dévoration cannibale, on la retrouve, elle, dans L’Opérette imaginaire (p. 165) : « Le peuple demande sa joie populaire – des idoles à mordre, à adorer et à rompre », ce qui pourrait s’appliquer parfaitement à l’actuelle télé-réalité.