1.1.3. Les Prospérités du Vide

→ « U vide, O dure, Ihôm » 

Au fond, notre interrogation est ici de nous demander en quoi consistent vraiment, rhétoriquement parlant, les prospérités du vide en ce qui concerne cette littérature si étrange. En outre, si le vide est le sujet de méditation par excellence des taoïstes et des bouddhistes, c’est peut-être aussi un peu le cas chez le « docteur de vacuité » (in J.S.) qu’est Valère Novarina.

Dans « Rue U : pluie et repluie sur nos têtes de U » (V.Q., p. 52) par exemple, le double u majuscule semble fonctionner comme un récipient pataphysique qui se fait fort de retenir, de contenir l’eau de pluie (et de repluie) ; cela concerne une rue toute entière et des têtes d’(h)umains. Si chez Rimbaud (cf. Sonnet des voyelles) le U est vert, le voici vide chez l’Homme de Valère. Ce U n’est pas un verre car ce serait un u. Or, nous sommes plutôt en présence d’un vase – voire d’une bassine, d’un tonneau ou d’un bidon. C’est la majuscule qui change tout en ce qu’elle permet, de fait, une plus grande contenance, ce type d’objet (verre, vase, etc.) étant en lui même un véritable sujet de méditation, en suggérant l’idée d’un vide à remplir voire d’une page blanche à noircir-nager.

On sait par ailleurs (l’auteur y revient souvent) que le V de VIDE correspond au U de DIEU lorsque le mot est écrit en chiffres romains, DIEV, le mot étant aussi une anagramme de DIVE (dans « Dive Bouteille »). Entre le U et le V : familiarité donc, connivence voire (le V évoquant plutôt la forme d’un Verre de Champagne) ; encore un hasard que d’aucuns pourront trouver troublant – mais c’est peut-être qu’il est objectif, pour utiliser un adjectif cher aux surréalistes. Quant à O (oxymoriquement associé à « dure ») et à I (associé à homme dans « Ihôm, le mot rappelant aussi le braiment d’un "Ihâne"), ce sont les autres lettres écrites en majuscules à partir desquelles sont proposés des jeux : les associer s’imposait – d’où notre sous-titre (la couleur « ijaune » rappelant encore plus le Sonnet des Voyelles).