1.1.2. « Dis-moi qu’là-bas / y a qu’èqu’chose pour bibi »

→ Ho du caveau !

Chez Novarina, quant le viandat s’adresse au macabiat, voilà ce que cela donne : dans Je suis, on a le joyeux « Hello, du tombeau ! » et dans Le Drame de la vie (p. 115), ce sera par une comptine sur le thème du non-retour : « Hé-les-disparus ! Rien ne reviendra plus ! » – à la page 174, on leur parlera en « vieux dèf ». Dans Le Babil des classes dangereuses (cf. « Ho, du caveau !») on parodie sans doute "Ohé, du bateau !" en s’adressant à une improbable nef des morts qui est peut-être un immense cercueil ou le drakkar fait d’ongles des anciens Vikings – à la page 223, c’est comme un cri d’amour : « O onctuosités, ô somp-tu-osités des culs froids ».

Tout en étant drôlissime, telle demande pressante formulée dans L’Opérette imaginaire aura des accents presque métaphysiques : « Dis-moi qu’là-bas, y a qu’èqu’chose pour bibi ». Appliquée à la mort et adressée à un mort, elle serait fort comique : si l’on y réfléchit pataphysiquement, ce sont eux, en effet, qui sont les mieux placés pour pouvoir éventuellement répondre. Mais est-ce vraiment à un mort que l’on s’adresse ici ? Et là-bas, où est-ce ? Qui peut le dire ? Un mort ?

Si l’on considère le ton choisi pour s’adresser à eux, on peut estimer que, tout comme le supporter » des « êtres paludéens » (cf. « continuez donc de vivre »), Novarina tient aux morts une sorte de discours paradoxalement enjoué voire rassurant, motivant et encourageant (« Vous serez célébrés au moins en cestui livre/ce doit vous consoler du dégoût pharisien ») : comme Queneau, c’est un connaisseur qui sait apprécier les charmes divers de la mort voire (comme il est dit dans Sally plus intime) le « téton beau des tombeau ».

La joyeuse tournée est sans fin : « Avons d’autres tombes à tauper, devons trapper d’autres tombeaux, à la recherche d’hommes dedans » (B.C.D., p. 267); il y a du pain sur la planche pour ce gai fossoyeur. On s’intéresse aussi au cas de Lazare : « Puis je m’en fus, à la ronde, aller voir et questionner tous les ressuscités du monde et m’enquérir de ce qui est pas là. » (J.S., p. 57).