1.2. Messages d’outre-tombe et « mystère du ci-gît »

1.2.1. Joie dans les fins !

Tout d’abord, on assiste, en direct-live, à la mort comique de bien des personnages : il y a de violentes mangeries et de simples sorties dans la coulisse mais aussi des agonies paradoxalement racontées sur un mode hilarant.

Au moment d’entrer dans la mort, le moribond aura en effet la parole (l’auteur semblant lui tendre un micro) ; il aura des visions hallucinées et ses dernières paroles seront à consigner. Dans L’Atelier volant par exemple (p. 102), les derniers mots de « Louis » sont « Attention v’là l’pointu, , v’là l’pointu », être (?) aussi énigmatique que le « Grand Velu » entrevu par Michaux (cf. « ils font face au Grand Velu »). Quant aux dits de Jean Léon Blanc au moment fatidique, ce seront « La viande est en face » et « La viande est un fait » (D.V., p. 119), comme s’il sortait d’une viande pour entrer dans une autre.

Dans La Lutte des morts, on aura une véritable scène de comédie : « Donne-moi un baise, Gypsy, c’est le dernier et pour toujours. Tu sentiras plus mes moustaches. » (p. 510). Dans Le Drame de la vie, certains semblent prendre la chose du bon côté : « Tous tendent les oreilles vers le mort qu’ils entendent rire » (p. 290). Dans Le Babil des classes dangereuses, les derniers mots de Laban expriment une sorte de soulagement et, dans Le Discours aux animaux, c’est même à pieds joints que l’on s’élancera dans la mort : « Sautons en tombe en hurlant de joie ! » (p. 185). Dans Le Drame de la vie (p. 267), on aura une autre réaction inattendue : « L’homme à qui l’on troue le front dit : nous vivons une époque formidable », après quoi le mot « front » sera remplacé par le mot « fond » (sans doute celui du trou qu’on creuse pour le mort) dans « Et ils trouèrent son fond ».

Bref, Le mot d’ordre est un peu « dansons pour nous taire » voire « Cap à Glas », « Cap au bois » ou « Y a d’la joie à mourir ! » Ici, la mort est une fête, un feu d’artifice : ce qui sonne, ce n’est pas forcement « le glas pour Un qui a quitté ce mond » (comme dans La Lutte des morts, à la page 461) mais plutôt un joyeux « branle-bas de cloche » (pour citer Dubuffet).