5.2. La forme-sens de la crise

Sur la complexité de son traitement littéraire, notamment esthétique, Thomas Mann soutient que « la maladie est une forme vide, tout simplement, ce qui importe, c'est ce à quoi elle s'unit, ce qui la remplit » 774. Si on considère que « la postmodernité reflue (…) vers une surface de pure immanence dans la dissémination indéfinie du sens » 775, le choix des pratiques formelles à l'œuvre valide la conception selon laquelle la formalisation de l'écriture de la maladie va au-delà « d'un second souffle [qui] exigerait de dépasser les formes convenues du roman/témoignage réaliste » 776. Ainsi cette formalisation est-elle inscrite au cœur de la « tension narrative ». Laquelle est affectée par ce qu'Edmond Cros appelle l' « idéosème » ou, dans sa forme élargie, « microsémiotique intratextuellle », définis comme « des interrelations qui confèrent (…) une signification sémantique au matériau du texte » 777. Ce procès, en ce qu'il incarne un passage, du fait qu'en son creuset interagissent thèmes et schèmes, accueille un lieu habité par l'angoisse et le doute. En fait, le même espace dont Bruno Blanckeman nous dit qu'il est « surexposé, porté à des points extrêmes de vulnérabilité » 778. Bref, autant de caractéristiques fondamentales de l'imaginaire de la maladie qui trouvent une résonance particulièrement féconde dans Le principe d'incertitude que Marc Gontard reprend à son compte dans sa tentative de déterminer une poétique postmoderne et que Raphaël Boroni totalise ainsi : 

‘L'incertitude anticipatrice (…) durant l'expérience esthétique, dans ce suspense ou cette curiosité qui font la force des intrigues fictionnelles [est de même nature que] l'incertitude du futur tissé de projet, d'espoirs ou de craintes (…), l'aspect sous-déterminé de notre rapport au monde.779

Aussi ces modèles narratifs incertains révèlent-ils « cette frange d'incertitude, qui est commune à tous les malades du monde »780.

Dans l’espace maghrébin, Rachid Boudjedra fait figure d’avant-garde postmoderne lorsqu’il substitue, quand il ne les associe pas, l’écriture de la maladie mentale à celle de la maladie physique. Par conséquent, il fait acter, dans la fiction romanesque, la théorie du Scandale du corps parlant 781. Il la dissèque et la déplie, respectivement, en scandale du corps souffrant à travers le goitre de la mère, en scandale du corps dégénérant avec la maladie cardiaque ou cancéreuse de l'oncle Hocine et en scandale du corps délirant par l'intermédiaire de la schizophrénie du personnage principal, Médhi. Ainsi le romancier algérien écrit-il :

‘(...); tandis que Selma, ma mère, griffée dans cette belle chaleur gélatineuse qui rendait les vibrations de l'air plus stridentes, s'étiolait, perdait ses forces et sa mémoire. Parfois, j'arrivais chez elle et demeurais de longs moments à son chevet, (...). Et ma mère passait son temps à regarder le ciel, (...) sous la constante dévoration du soleil (...) dans la lumière qui inondait le visage exsangue de la malade (...).782
Il était là (…) à cause peut-être de cette maladie du cœur dont on le disait atteint (…) Ce n’était plus un homme, un être humain, mais un tas de nerfs, de membres, d’organes et d’éléments, tout mous, tout fanés, tous fissurés, tout fendillés, tout flasques, tout flapis, tout froissés, tout floches, tout dépareillés, ect.783
Puis resurgi tout à coup de l'immuable songe, je déferlais dans le sommeil durant lequel je rêvais que je dépeçais tous les chats et toutes les chattes du quartier parce que je les soupçonnais d'être en chaleur et que je sortais les corps des tortues de leurs carapaces et les donnais à manger à un vautour (...).
Ce fut mon dernier séjour dans la maison maternelle avant l'insolation qui me brouilla mon esprit à tel point qu'on m'enferma dans un hôpital (...).784

Le basculement vers la représentation de la schizophrénie offre l'occasion aux romanciers africains, dont Rachid Boudjedra, d'investir une forme d'écriture de la maladie croisée avec l'esthétique postmoderne. Carmen Husti Laboye souscrit à cet avis quand elle dit et fait dire :

‘La schizophrénie est devenue dans le texte (…) un modèle formel de l'écriture. Elle a cessé d'être strictement une maladie mentale pour devenir un modèle généralement valable pour le contexte culturel postmoderne, comme le souligne Frederic Jameson :
« Lorsque la disjonction schizophrénique devient généralement valable pour tout un style culturel, elle perd son contenu morbide et remplace les affects d'anxiété et d'aliénation. »785
Le choix de ce modèle formel (…) témoigne d'un changement, non seulement des thèmes littéraires littéraires (…), mais surtout de la rencontre (…)avec les idées du postmodernisme.786

Sans doute, dans le paysage littéraire occidental, la question de la perte du sens explique l’option postmoderne de l'écriture de la maladie qui, par ailleurs, relève des Fictions singulières. La même approche postmoderne, dans les œuvres littéraires africaines, sans nier la ruine progressive du sens, s'affirme avec davantage de nuance et de retenue. Aussi ces dernières tiennent-elles compte, d'une part, du fait que « l’écrivain ne peut s’abstraire de la vie sociale. C’est radicalement impossible (…)» 787. Cependant que, d'autre part, elles s'évertuent à traduire la douloureuse expérience de la pathologie en ce que Jean François Lyotard nomme « l’hypobiographie : (…) en somme une biographie hypothétique » 788. Autrement dit, bien qu'elles expriment une « pure et simple fantasmagorie », elles n'échappent pas au regard d’approbation/désapprobation du référent tribal789. Par conséquent, ce qui fait postmoderne, dans l'écriture de la maladie, dans la littérature africaine francophone, c'est moins la portion « faible » de sa dimension « ontologique » 790 que sa stratégie narrative. La seconde, par ses formes imprécises et incertaines, se posent en hiatus et ruinent de l'intérieur la première. En effet, les occurrences et les trajectoires formelles préfigurent le manque, l'incomplétude et la marginalité auxquels confine la maladie. Celle-ci, dans un contexte maghrébin où le rapport au corps, qui plus est au corps malade, s'inscrit sinon dans une logique de rejet du moins dans un espace de rétention, recourt à la technique littéraire de la greffe. Arnaud Genon791 la considère en tant qu'une pratique esthétique postmoderne de l'écriture de la maladie. La Greffe 792 désigne, chez Rachid Boudjedra, aussi bien un recueil poétique qu'une poétique romanesque qu'il convoque en permanence dans L'insolation, si l'on en croit Marc Boutet de Monvel793. Tout se passe comme si, du fait de sa structure atypique qui fonctionne en tant qu'une anacoluthe rompant subitement la construction de la narration tant au niveau sémantique, syntaxique que topographique, la technique littéraire de la greffe, telle « une excroissance » 794 surgie ex nihilo, entrait en collision avec le corps de la narration. Pour cause, les instances narratives correspondantes sont soupçonnées de collusion avec le discours convenu et politiquement correct du corps social. Aussi « greffés » les uns aux autres, les fragments de l'écriture de la maladie déjouent-ils la tentation de la digression ou de l'anachronisme, en ce qu'ils revêtent une cohérence de « texte tissé » 795. A posteriori et une fois toutes les pièces du puzzle retrouvées, transparait une chronique. S'avançant masquée, elle diffuse sa « métastase » 796« métastabilité» 797 et sa subordination narratives dans l'hydre fécond de ce que Jacques Derrida appelle le « surjet » 798. Dès lors, ce dernier s'illustre en tant que matrice énonciative dont la plasticité agit en perméabilité et, surtout, en possibilités discursives démultipliées. Plasticité qui, par ailleurs, défait la glose ex cathedra maintenant le dire surla maladie, essentiellement, à travers le poncif de La malédiction 799 (male dictus, mal dit), c'est-à-dire une défaillance, au préalable, énonciative :

‘Le grand-père cherchait par ses palabres à rompre l'étau de la malédiction (…). Le temps figé et la chambre de la malade et l'agonie du coq : tout exprimait cette stagnation et cette stupeur frappant les personnes d'un sceau maléfique. Malika s'enchevêtrait dans ses mots et finissait par bégayer (...) face à la fixité des choses (...). 800

La problématique est tout autre s’agissant du sida. En effet, ce dernier, en même temps qu’il pose une équation (on se rappelle du célèbre slogan d’Act-Up : « Silence = mort ») encore irrésolue à la collectivité, impose un pilori au discours littéraire. Une phrase : « Nous étions sidérés. » 801 brève, minimaliste et détachée du reste du texte romanesque, sert de conclusion. En même temps qu’elle entend, par une sommation phonologique et un détournement étymologique (« sidérés » semble renvoyer à sida), acter la « réelle présence » de l'affection. Aussi Sony Labou Tansi convoque-t-il une poétique de l’écriture du sida dont le caractère postmoderne se lit en tant qu’elle s’éloigne des principes narratifs de focalisation. Est déconstruite, par conséquent, la « focalisation zéro », c’est-à-dire la posture narrative où l’auteur Sony Labou Tansi, du haut de sa position omnisciente, fait et défait la fiction. Si la fiction sidéenne en Occident, est prise en charge de manière univoque, en tout cas au début de l’apparition de la maladie dans les années 80, par la population affectée (la plupart issue de la communauté homosexuelle), il en est autrement dans l’espace africain. La complexité et la perplexité du discours littéraire du sida y s’expliquent par le fait qu’à la voix narrative atone de la figure sidéenne, s’ajoutent des voix concurrentielles. Du coup, elles brouillent, un peu plus, ce qui constitue déjà un « récit indécidable » 802. L’usage, dans Le commencement des douleurs,des phrases allusives, des vérités générales et autres proverbes, dans un espace ubuesque de palabres solennels et interminables, où le chant résonne et l’alcool fait déraisonner, représente autant de voix narratives discordantes contre lesquelles celle du narrateur principal résiste afin « de faire capoter les silences du sida » 803. En revanche, est réinvestie la « focalisation interne » qui rend omniprésents et, presque, exclusifs, les points de vue discursifs des deux figures littéraires consacrées que représentent les personnages du malade et du médecin. Au premier, est adjointe une expressivité d’où ressortent une conscience de l’« arrachement » 804 et une « glose sur la résistance » qui « lutte contre la cicatrisation de l’événement » 805. Quand la profession de foi, rassemblant la collectivité, la communauté des malades comprise, [« Notre ville entre en guerre contre les ouaouarons rouges et le choléra. Les noces peuvent attendre. » 806], témoigne d'une force intérieure et d'une « hauteur » 807 d’âme. En somme, la gravité, l'enjeu et l'irréductibilité du « différend » qui l'oppose à la maladie, engendrent, chez le patient africain postmoderne, l'envie de s'affirmer différent. Mais il s’agit surtout, pour lui, d'affirmer un discours différent/différend, synonyme d’une stratégie de survie. Au second, à savoir le personnage du médecin, est contesté, désormais, le mythe que des textes littéraires reconnus ont bâti à son endroit, lui tressant sans cesse des lauriers. Sony Labou Tansi prend une voie/voix différente, comprise dans l'intervalle et les nuances interprétatives qui séparent l'humanisme du docteur Rieux, dans La peste d'Albert Camus, du cynisme du médecin qu'est Bardamu, dans Voyage au bout de la nuit deLouis Ferdinand Céline. Le romancier congolais, en élaborant un renversement littéraire et esthétique, revisite l'espace médical africain dans le sens d'un univers dantesques. Ainsi le décrit-il en ces termes :

‘(...) une avalanche d’infirmières en blouses blanches, rouges, jaunes, vertes, un déluge de chefs de clinique, de chirurgiens, d’ophtalmologues, de neurothérapeutes, de dentistes, d’anesthésistes furieux sentant l’alcool et le solucamphre, une apocalypse d’ambulanciers, de gardes-malades, de pharmaciens, de laborantins teintés au bleu de méthylène. Ils huchaient, vociféraient insultaient (…).808

C'est que, pour imaginaire et, peut-être, improbable qu'elle soit, cette caractérisation est ce que l'exception de la catastrophe hospitalière de la canicule de 2003 en France est à la permanence du désastre sanitaire en Afrique, c'est-à-dire le croisement d'une fiction meurtrière et d'une réalité inimaginable. Aussi la surdétermination négative du personnage-médecin à laquelle se livre Sony Labou Tansi, quand il lui prête un discours équivoque, des intentions ambiguës et des préoccupations bassement mercantiles, sonne-t-elle le glas de cette figure romanesque en tant que bonne conscience de son temps. Du même coup, elle annonce un principe de Moralités postmodernes 809 qui, dans une nouvelle approche littéraire de la pathologie, convoque un rapport médecin/patient moins moins unilatéral et/ou dictatorial que symétrique et/ou dialogique :

‘Hoscar Hana Junior, vous avez tué notre gagne-pain en éradiquant la maladie, criait Niaha Portès le cardiologue. (...). Vous ne vous rendez pas compte : toute une profession bazardée sans préavis ni négociations.
Tu pouvais au moins nous laisser les maladies du coeur, criait Alice Yona, la patronne de la clinique du Golzora. (...). Et Michel Devesa, compagnon technique du bourgmestre Palmara, criait à se fendre la rate :
Foutus Hoscar Hana Junior, tu nous as tués en enlevant nos malades bien aimés. Tu ne te rends pas compte: sans malades, nous sommes malades.810

En définitive, ne pas nourrir, d'une part, le mythe du médecin, ce « dieu en blanc » dont l'apologie est inscrite dans la modernité littéraire et, d'autre part, considérer que le personnage du patient revêt, dans la fiction, une épaisseur littéraire qui s’élève bien au-delà d’un « malade imaginaire », c’est dynamiser l’imaginaire africain de la maladie. Pour cela, le romancier congolais substitue aux discours convenus, faits sur ces deux figures romanesques, un nouvel ordre langagier. Celui-ci peut se résumer de façon suivante :

‘(...) il ne s'énonce plus en grands récits constitués, mais seulement en « discours »; c'est tout au plus une phraséologie, un corpus de phrases (…); le mythe disparaît, mais il reste, (…). Comme parole (c'était après tout le sens de muthos), le mythe contemporain relève d'une sémiologie (...).811

Le rapprochement de ces deux points de vue (ceux du médecin et du patient), jusque-là inscrits dans le discours littéraire négro-africain de la maladie selon un régime parallèle, allège le poids de la narration. Il la fait évoluer d'une posture homodiégétique sans partage vers un positionnement hétérodiétique davantage fédérateur dans la fiction. De sorte que cette dernière libère la possibilité que des sens nouveaux, « intra-textuels » et « extra-textuels », émergent à partir de lectures plurielles de la question du sida. Autrement dit, Le principe dialogique,institué dans la fiction, entre personnages soignants et personnages souffrants, s'oriente vers une esthétique médiale. Celle-ci, à l'intérieur comme en dehors du texte, s'articule autour d'une lecture plurielle qui questionne la problématique de « l'expérience esthétique » 812.

Notes
774.

Mann Thomas, La philosophie de Nietzsche à la lumière de notre expérience (1947) in Les maîtres, Paris, Grasset, 1979, p. 234.

775.

Mattéi Jean-François, La crise du sens, Paris, Éditions Cécile Defaut, 2006, p. 64.

776.

Jaccomard Hélène, « Écrire le sida en Afrique Francophone », in La revue française, 12 décembre 2001, pp. 111.

777.

Malcuzynski M-Pierrette, Entre-Dialogues avec Bakhtine ou sociocritique de la (dé)raison polyphonique, Amsterdam, Rodopi, 1992, p.64, qui cite Cros Edmond, Théorie et pratique sociocritiques, Montpellier, Éditions du CERS-Éditions Sociales, 1983 et De l'engendrement des formes, Montpellier, Éditions du CERS, 1991.

778.

Blanckeman Bruno, « Mourir au texte: Sur quelques récits d'Hervé Guibert », in Bouloumié Arlette (sous la direction de), Écriture et Maladie, « du bon usage des maladies », Paris, Éditions Imago, 2003, p. 178.

779.

Boroni Raphaël, La tension narrative. Suspense, curiosité, surprise, Paris, Seuil, 2007, p.18 et p. 406.

780.

Guibert Hervé, A l'ami qui ne m'a pas sauvé la vie, Paris, Gallimard, 1989, p.10.

781.

Le scandale du corps parlant, op. cit.

782.

L'insolation, op. cit., pp. 92-93.

783.

La prise de Gibraltar, op. cit., pp. 26-27.

784.

L'insolation, op. cit., p. 219.

785.

Jameson Frederic, Postmodernism or The Cultural Logic of Late Capitalism, London and New York, Verso [Duke University Press], 1991, p. 29. Le passage est traduit par C. Husti Laboye.

786.

Husti Laboye Carmen, « Écriture et déchirement. L'individu postmoderne dans Hermina de Sami Tchak », in Bengoéchéa Manuel, Chaume Delphine, Riffard Claire et Spiropoulou Katerina (sous la direction de), Discours et écritures dans les sociétés en mutation, Itinéraires et contacts de cultures, Volume 39, Université Paris 13, L'Harmattan, 2007, pp. 58-59.

787.

Gafaïti Hafid, Kateb Yacine : un homme, une œuvre, un pays, Alger, Éditions Laphomic, 1986, p. 45

788.

Lyotard Jean-François, « Malraux et sa légende », in Le magazine littéraire, n° 347, août 1996, p. 27.

789.

Maffesoli Michel, Le temps des tribus. Le déclin de l'individualisme dans les sociétés postmodernes, Paris, Table Ronde, 2000.

790.

Husti-Laboye Carmen, L'individu dans la littérature africaine contemporaine. L'ontologie faible de la postmodernité, Thèse de doctorat , Sous la direction de Beniamino Michel, Faculté des Lettres et des Sciences Humaines, Université de Limoges, France, 2007. En fait, elle reprend et met « sous tropiques » les thèses développées par Vattimo Gianni, La fin de la modernité. Nihilisme et herméneutique dans la culture post-moderne, Paris, Le Seuil, 1987.

791.

Genon Arnaud, Hervé Guibert : Vers une esthétique postmoderne, Paris, L'Harmattan, 2007, pp. 188-189 où le critique, distingue, parmi « (…) les caractéristiques d'un sujet postmoderne (…), perdu dans l'univers hospitalier (…), « un corps postmoderne fait de greffes et d'ajouts (…), travaillé et cousu » (...) ».

792.

Rachid Boudjedra, Greffe, Paris, Éditions Denoël, 1985.

793.

Boutet de Monvel Marc, Boudjedra l'insolé. L'insolation : Racines et Greffes, Paris, L'Harmattan, 1994, p. 157.

794.

Une théorie esthétique de la greffe que Rachid Boudjedra thématise et « fictionnalise » dans L'insolation : « L'histoire était trop complexe. Comment avoir le courage de la lui raconter ? Surtout que me lancinait l'envie de me couper les pieds (...) comme une excroissance, se développant en dehors du reste de mon corps (...). Il valait mieux continuer à lui lire mes trois livres de chevet, en passant de l'un à l'autre, sans transition, déboulant à travers les pages, les mots et les concepts : surgissant là où elle m'attendait le moins, lui donnant d'inexplicables maux de tête (...). », op. cit., pp. 80-81.

795.

La Mothe Jacques, L'architexture du rêve. La littérature et les arts dans Matières de rêves de Michel Butor, Amsterdam, Rodopi, 1999, p. 104.

796.

Baudrillard Jean, L'échange impossible, Paris, Galilée, 1999, p. 72.

797.

Simondon Gilbert, L'individu et sa genèse physico-biologique, Paris, Presses Universitaires de France, 1964. Il désigne par « métastabilité » la crise permanente qui, au niveau des sujets, des institutions et des normes, touche la vie sociale et en est même constitutive. En la déplaçant dans le champ littéraire et langagier, Debaise Didier, « Le langage de l'individuation », in Revue Multitudes, Majeure : Politiques de l'individuation. Penser avec Simondon, n° 18, automne 2004, http://www.multitudes.samizdat.net/Le-langage-de-l-individuation , écrit : « Un des intérêts de la notion d'équilibre métastable est qu'elle met en évidence l'incapacité du régime linéaire (...). »

798.

Derrida Jacques, « Les greffes, retour au surjet », in La dissémination, Paris, Le Seuil, 1972, p. 395 où il appréhende ainsi la pratique de la greffe et ce qui en résulte, en l'occurrence ce qu'il nomme le « surjet »: « Violence appuyée et discrète d'une incision inapparente dans l'épaisseur du texte, insémination calculée de l'allogène en prolifération par laquelle les deux textes se transforment, se déforment l'un par l'autre, se contaminent dans leur contenu, tendent parfois à se rejeter, passent elliptiquement l'un dans l'autre et s'y régénèrent dans la répétition, à la bordure d'un surjet. »

799.

Mimouni Rachid, La malédiction, Paris, Stock, 1993.

800.

L’insolation, op. cit., pp. 148-149.

801.

Le commencement des douleurs, op. cit., p. 155.

802.

Blanckeman Bruno, Les récits indécidables : Jean Echenoz, Hervé Guibert, Pascal Quignard, Villeneuve d'Ascq, Presses Universitaire du Septentrion, 2000.

803.

Dauge-Roth Alexandre, « Koulsy Lamko et Fanta Régina Nacro ou l’art de faire capoter les silences du sida », in Études francophones, Volume 19, n° 1, Printemps 2004, Université de Louisiane Lafayette, pp. 81-98.

804.

Weil Simone, La connaissance surnaturelle, Paris, Gallimard, 1950, p. 232 : « Père, arrache de moi ce corps et cette âme pour en faire de choses à toi et ne laisse subsister de moi éternellement que cet arrachement lui-même. »

805.

« Glose sur la résistance », in Le postmoderne expliqué aux enfants, op.cit,p. 142. J-F. Lyotard y explique que la vraie résistance au totalitarisme de la bureaucratie, dans 1984, tient du fait que « cette résistance [qui] s’inscrit d’abord, ostensiblement, dans le genre romanesque et dans le monde narratif qui sont ceux de 1984 », p. 138. Il écrit au préalable : « L’écriture littéraire (…) parce qu’elle exige un dénuement, (…) ne peut pas coopérer, même involontairement, à un projet de domination », pp. 137-138. Il prolongeait, ainsi, l’étude de Claude Lefort sur 1984, « Le corps interposé : 1984, de Georges Orwell », in Écrire à l'épreuve du politique, Paris, Rééditions Calmann-Lévy, 1992, [Presse Pocket, 1984], pp. 15-36.

806.

Le commencement des douleurs, op. cit., p. 99.

807.

Lévinas Emmanuel, Humanisme de l’autre homme (1972), Paris, Le Livre de poche, 1994, p. 58 où le philosophe écrit : « La hauteur ordonne l’être. La hauteur introduit un sens dans l’être. » Il poursuit en expliquant que la hauteur de l’homme est moins liée à son « expérience de la verticale » (laquelle expérience n’est pas quantité négligeable) que par la conscience qu’il fait du rapport entre son « haut » et son « bas », c’est-à-dire la conscience de ses possibilités, de ses forces et de ses intelligences mais aussi de ses faiblesses, de ses fragilités et de sa fin dont la maladie.

808.

Le commencement des douleurs, op. cit.,p. 153.

809.

Lyotard Jean-François, Moralités postmodernes, Paris, Éditions Galilée, 1993.

810.

Le commencement des douleurs, op. cit.,p. 152.

811.

Barthes Roland, « La mythologie aujourd'hui », in Le bruissement de la langue, Paris, Points/Seuil, 1993, p. 81.

812.

Valverde Monclar, « La réception médiatique comme expérience esthétique », in Sociétés, n° 74 –2001/4, pp. 43-52.