II.2.2.2.1 Origines implicites de la pensée évolutionnaire

Sans doute, il est particulièrement difficile de chercher la première mention qui est faite de la théorie évolutionnaire dans la littérature économique. Cependant, certaines inspirations biologiques (encore sans l’adjectif « évolutionnaires ») sont apparues dans l’école historique allemande d’après Hodgson (1998) ou Foster et Metcalf (2001) encore avant Darwin. Les adhérents de cette école ont essayé de comparer des attributs entre organisme biologique et organisme social. Cette école a discerné des méthodes et taxonomies qui ont rendu possible de saisir les spécificités de l’évolution historique (Hodgson, 2003b) et l’importance du changement économique (Mayhew, 1988).

Un peu plus tard, on peut identifier une autre origine implicite, dans l’école historique britannique où de nombreux auteurs se sont intéressés à l’évolution dans des travaux souvent interdisciplinaires. Leur importance est accentuée par le fait qu’ils ont aussi influencé Darwin. On peut y classer aussi Hume (1711-1776) qui s’intéressait, entre autres, à la théorie de l’évolution d’éthique, des institutions et des conventions sociales. Par ces idées il a influencé beaucoup de ses contemporains et successeurs. Smith (1723-1790) a discuté avec lui ses idées et il a apporté beaucoup de suggestions issues des sciences économiques à Darwin et à sa théorie. Ce sont surtout les lois décrivant l’accumulation de la richesse dans l’ouvrage publié en 1776 : « An Inquiry into the Nature and Causes of the Wealth of Nations », qui ont saisi Darwin (Fonseca, Ussher, 2003). Henri Milne-Edwards (1800-1885), un biologiste français, a servi d’intermédiaire dans le transfert des idées entre Smith et Darwin (Niman, 1991). Il était influencé surtout par les réflexions de Smith concernant la division du travail.

On peut constater qu’un autre économiste Thomas Malthus (1766-1834) a influencé Darwin directement. Dans son ouvrage « Essay on the Principle of Population »de 1798, Malthus a cherché les causes de la pauvreté et de la faim. Il a observé que les plantes et les animaux ont un niveau de reproduction supérieur à leur niveau de survie et que la même chose est valable pour l’homme si sa population n’est pas contrôlée (Leakey, 1989). Tandis que la population humaine croît de façon géométrique, la croissance des ressources est arithmétique. Une cause principale de cet état est d’après lui la volonté de Dieu qui ainsi protège l’homme contre la paresse, ce que s’efforce de montrer la citation suivante : « Had population and food increased in the same ratio, it is probable that man might never have emerged from the savage state. » (Malthus, 1798, p. 349, In: Young, 1969, p. 117).